Hack the CNN /-)
Fondateur et directeur de la publication d'OWNI, Nicolas Voisin a été nommé au Conseil National du Numérique (CNN). Retour sur les raisons qui l'ont conduit à accepter cette nomination.
L’Élysée m’a proposé de faire partie des 18 à 20 “sages” du Conseil National du Numérique (CNN), destiné à réunir les acteurs d’Internet “dans leur diversité”, et qui “sera consulté sur l’ensemble des projets de textes législatifs et réglementaires et sur l’action des pouvoirs publics dans les domaines de la société de l’information”, comme l’a précisé le ministre de l’industrie, ainsi que sur l’ensemble des politiques publiques touchant la société de l’information. Une instance sensée être interrogée à l’avenir avant de mettre en branle la machine législative à tort et à travers, en quelque sorte.
C’était une rumeur persistante, du genre de celle qui fait sourire tant elle parait improbable. “vu comme vous tapez sur l’exécutif, je ne vois pas cela se faire” nous disaient, unanimes, ceux avec lesquels nous discutions de ce qui n’était pas une information, mais des bruits de couloir.
La proposition était d’autant plus étonnante que nous avons lancé OWNI.fr – l’Objet Web Non Identifié dont je suis le Directeur de la publication – au moment de la “bataille de l’Hadopi“, pour incarner et diffuser un certain nombre de valeurs, de libertés, une conception du web que la loi Création et Internet mettait, sinon en péril, tout du moins en danger.
Il n’est pas un Internet sauvage et un autre civilisé, l’un qui faudrait dompter, l’autre auquel nous devrions nous résigner.
Mon approche et ma vision de l’Internet pourraient ainsi être perçues comme entrant de plein fouet en contradiction avec celles portées par l’actuel gouvernement. Je n’en ai pas moins accepté de faire partie du CNN, parce que sa composition et sa feuille de route me laissent à penser que les missions qui lui ont été attribuées ne seront pas vaines, et qu’il pourra bel et bien servir d’instance de concertation, et d’orientation, des politiques publiques appliquées au numérique.
Les pouvoirs publics, en France en particulier, ont le plus souvent fait montre d’une vision biaisée, pour ne pas dire anxiogène, de l’Internet. La création du CNN montre qu’il peut – peut-être – en aller autrement et que notre société a beaucoup à apprendre de ceux qui, chefs d’entreprises, entrepreneurs des nouveaux médias, contribuent à faire de cette société de l’information une partie de la solution, plus que des problèmes, auxquels nous sommes collectivement confrontés. Plus encore, qu’il n’est pas un Internet sauvage et un autre civilisé, l’un qui faudrait dompter, l’autre auquel nous devrions nous résigner.
La tentation quasi adolescente de claquer la porte a été forte. En acceptant cette nomination, j’entends bien me faire le porte-voix de tous ceux pour qui l’Internet constitue une chance pour nos démocraties, et qui défendent donc :
La neutralité du Net et des réseaux, la possibilité pour les citoyens de s’y exprimer, le droit d’accès libre et universel au web, la société du partage, du remix, de l’open-source, de l’open-data et du Creative Commons, notamment.
Enfin, Internet est également une formidable opportunité pour nos économies : le rapport McKinsey a ainsi récemment estimé que l’Internet, qui pèse 60 milliards d’euros dans l’économie française, a créé plus de 700 000 emplois, soit 25% des emplois créés en France depuis 1995.
Je n’ai pas fait l’ENA. Pire, je n’ai pas de diplôme, juste un joli BAC en poche. Mais j’ai créé ma première entreprise à 18 ans et en lançant, en 2006, le PoliTIC’Show, un blog vidéo qui donnait des temps longs aux candidats à la présidentielle de 2007 pour s’exprimer, j’ai tenté de montrer qu’un blogueur, un citoyen, un amateur, pouvait apporter une véritable valeur ajoutée aux débats politiques. Aujourd’hui, avec OWNI, nous tentons de montrer ce qu’Internet peut apporter au journalisme, à la médiation culturelle et à la redéfinition de l’écosystème médiatique. Je me plais à penser que cette nomination au CNN témoigne d’une évolution dans la perception que se font les pouvoirs publics de ceux qui peuvent aujourd’hui contribuer au débat public.
Mais je ne suis pas dupe : le Parlement n’aura probablement guère le temps d’être saisi de textes majeurs relatifs à l’Internet d’ici la présidentielle de 2012. Je n’en fais pas moins le pari que le travail du CNN permettra, d’ici là et je le souhaite par la suite, de contribuer au débat sur ce que peut apporter l’Internet en particulier, et le numérique en général, à notre démocratie – et qu’il serait dommage de s’en priver.
Si tel n’était pas le cas, j’en tirerai les leçons, avec vous et le million et demi d’internautes séjournant ici chaque mois, avec l’ensemble des 38 salariés associés d’OWNI et le millier d’auteurs que nous avons réunis, qui accompagneront, je n’en doute pas un instant, l’exigence qui devra être celle des “sages” du CNN et du petit artisan nommé ce jour, afin de vous représenter.
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MAJ : Suite à sa première réunion, qui s’est tenue ce jour, la Commission Nationale du Numérique [#CNNum] s’est organisée en 3 commissions “Croissance, Accès et Libertés” et a élu :
- Gilles Babinet en tant que Président,
- François Monboisse, en tant que Vice-Président en charge de la Commission Croissance.
- Giuseppe De Martino en tant que Vice-Président en charge de la commission Accès.
- Nicolas Voisin, en tant que Vice-Président en charge de la commission Liberté.
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Crédits photos CC FlickR Rémy Saglier, Quasimodo
Une Marion Boucharlat à partir de Alex No Logo, téléchargez-la /-)
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