Le portefeuille de BNP : un diamant plus gros que la France
Pied de nez aux envolées de Nicolas Sarkozy sur la régulation, BNP Paribas cumule, grâce aux failles du système, des actifs pour 2240 milliards d'euros... soit plus que le PIB de la France !
Le décompte de Bloomberg a de quoi faire frémir. Les actifs de BNP Paribas ont augmenté de 34% sur les trois dernières années, pour atteindre 2 240 milliards d’euros… soit plus que les actifs de Bank of America (la plus grande banque américaine) et de Morgan Stanley réunis ! Et, surtout, plus que le produit intérieur brut (PIB) français ! Logiquement, une telle niouze aurait dû faire les choux gras de la presse nationale, toujours prompte à enfourcher le coq pour hisser haut notre magnifique drapeau tricolore. Sauf qu’il aurait été difficile d’évoquer cette étude sans… rapporter l’analyse qui va avec.
Car Bloomberg affirme aussi que l’exploit de BNP Paribas a été rendu possible par la nonchalance du législateur français, qui se moque totalement de la régulation bancaire, en flagrante opposition avec les envolées lyriques de Nicolas Sarkozy… devant les caméras tout du moins
Résultat : d’une part, BNP possède certainement l’un des ratios de capitalisation les plus faibles de la place européenne, et, d’autre part, la France (avec l’aide de l’Allemagne) s’emploie systématiquement à torpiller les propositions de régulation avancées dans le cadre des négociations internationales en cours (Bâle III). Au grand dam de la Suisse, de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis, qui ont déjà commencé à serrer la vis.
15% de son capital sur des dettes à risque
Nos banques ne parient pas sur des produits aussi moisis que les subprimes. Certes. Mais il ne faudrait pas oublier que BNP Paribas est exposée à hauteur de 15% de son capital sur la zone (à forte activité sismique) Portugal-Irlande-Grèce-Espagne. Et si l’on rajoute la Belgique et l’Italie, on atteint les 75%. Pas franchement rassurant, alors que les rumeurs d’aggravation de la crise économique se font de plus en plus précises.
Une réunion d’urgence des ministres européens est d’ailleurs planifiée, ce soir [mardi 16 novembre au soir, NdE], sur le sujet. Le risque systémique français grandit, tous les jours, au rythme de la goinfrerie bancaire de nos joyeux financiers. Et la France se retrouve dans la situation de l’Irlande, en début d’année dernière. Que BNP éternue et c’est la France qui s’enrhume.
« Les banques françaises ne seront sans doute pas soumises à des règlementations très strictes, à cause de leur importance économique » a déclaré Dirk Hoffmann-Becking, un analyste londonien de Sanford C. Bernstein. Introduire des règles plus rudes reviendrait à « réduire leur gagne-pain, et le gars qui va payer pour ça, c’est le consommateur français » conclut-il. Prions pour que les analystes ne se mettent pas à avoir raison…
(* : l’évaluation de Bloomberg est délicate car les normes comptables bancaires européennes et américaines sont différentes)
Billet publié initialement sur Les mots ont un sens sous le titre Les actifs de BNP Paribas dépassent le PIB de la France.
Photos FlickR CC Marc Vie ; Caroline et Louis Volant.
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