L’Internet français est Morin 30 décembre
Hervé Morin, président du Nouveau Centre, et ministre de la défense, a mis à jour sa Déclaration des Droits Fondamentaux Numériques , dont la première version avait été présenté en juin dernier.
Titre original :
Hervé Morin : Internet doit être neutre et ouvert, sauf… et en cas de…
Hervé Morin, président du Nouveau Centre, et ministre de la défense, a mis à jour sa Déclaration des Droits Fondamentaux Numériques , dont la première version avait été présenté en juin dernier. « La v.2 s’est nettement améliorée » souligne Fabrice Epelbouin sur le site Read Write Web. Une appréciation générale qu’on a du mal à partager à la lecture des nouveaux textes. Notamment les articles 1et 3, peu changés, alors que les plus critiqués.
A l’article 1er, la première version «Toute personne a le droit d’accéder et d’utiliser librement le réseau Internet, neutre et ouvert» a été remplacée par : « Toute personne a le droit d’accéder et d’utiliser librement Internet, neutre et ouvert, dans le respect des droits d’autrui ».. Une modification de forme qui a le mérite d’annoncer les exceptions apportées aux principes d’ouverture et de neutralité développées ensuite. Le texte indique en effet : «Le droit à une libre utilisation du réseau s’oppose à toute forme de filtrage par les pouvoirs publics, sauf pour des motifs d’ordre public comme, par exemple, la lutte contre la pédophilie. L’utilisation du réseau peut également être encadrée en cas d’atteinte aux droits d’autrui.»
On note que le texte ne décrit à aucun moment ce qu’il entend par « neutre et ouvert », et donc les droits et les libertés qu’elle apporte aux citoyens. Il s’attache uniquement à en définir les restrictions. Ainsi il valide le principe de blocage ou de filtrage de contenus comme prévu par la Loppsi. Et ce n’est qu’un « exemple » précise-t-il. En effet, l’utilisation de la notion d’atteinte à l’«ordre public» permet de ratisser large dans les restrictions envisageables. Une notion juridique considérée comme un « concept très flou », « difficile à définir » par les juristes. En droit administratif, il s’agit d’un état caractérisé par «le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique».
« Toutes les infractions pénales rentrent dans le champ de l’ordre public », nous explique un juriste. Cela peut aussi bien concerner la pédo-pornographie (et non la pédophilie au passage) que la contrefaçon. C’est finalement une application française de ce qu’on retrouve en substance dans l’ACTA ou dans les principes sur la neutralité de la FCC, l’autorité américaine de régulation des télécoms. Soit l’idée d’un Internet neutre, libre et ouvert mais s’appliquant seulement aux contenus licites. Ajouter la notion, également complexe, de « droit d’autrui » permet à une personne physique ou morale de faire ordonner au juge le respect de ses libertés.
Comme le soulignait très justement, en juin dernier,
Jean-Marc Manach : « le “problème des “déclarations des droits de l’homme“, ou des “droits fondamentaux“, c’est qu’elles mettent en avant les droits des gens, des citoyens, pas ceux d’”autrui“, et encore moins ceux de l’”ordre public“. Et heureusement. Aussi, il disait espérer : « qu’Hervé Morin, et ceux avec qui il a rédigé ce projet, comprendront que l’on ne peut pas, d’emblée, définir nos droits et libertés par ce qui ne peut “porter atteinte à l’ordre public et aux droits d’autrui“.
L’article 4 sur la dignité humaine est également flou et sujet à de nombreuses interprétations. Il dit : « la dignité sur Internet se définit comme le refus, via le monde numérique, de porter atteinte à la dignité humaine. La protection de l’enfance, en particulier, justifie le respect d’une vigilance particulière. Le respect de la dignité humaine dans le monde numérique implique également le refus d’utilisation de qualificatifs contraires à l’ordre public et aux bonnes mœurs. Pendaison de Saddam Hussein, intimité volée de Laure Manaudou : l’absence d’autorité de régulation des contenus disponibles sur supports numériques – à la différence du secteur audiovisuel – ne doit pas conduire à autoriser sur Internet ce qui est interdit ailleurs« .
Hormis que les termes « vigilance particulière » ne signifient en soi pas grand chose (ou beaucoup de choses), il est bon de rappeler que l’« absence d’une autorité de régulation » ne signifie en aucun cas vide juridique et zone de non-droit. Comme le rappellent fréquemment de nombreux juristes, il existe à l’heure actuel de nombreuses lois qui sont applicables et appliqués sur Internet, par exemple en cas de diffamation.
Comme pour la première version, les internautes sont invités à commenter en ligne la Déclaration.
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