J’en ai rêvé, Sony l’a fait
Le retentissant procès de ThePirateBay, le leader des sites “de téléchargements pirates”, dont la première édition a conclu à des condamnations à de la prison ferme, est un rêve pour les majors… et un cauchemar pour les politiques. The Pirate Bay, une fourmilière particulièrement active…. ThePirateBay est l’un des site “de piratage” les plus populaires au monde. [...]
Le retentissant procès de ThePirateBay, le leader des sites “de téléchargements pirates”, dont la première édition a conclu à des condamnations à de la prison ferme, est un rêve pour les majors… et un cauchemar pour les politiques.
The Pirate Bay, une fourmilière particulièrement active….
ThePirateBay est l’un des site “de piratage” les plus populaires au monde. On n’y trouve pas – techniquement – de fichier copyrightés, mais des fichiers “torrent” permettant de se connecter à un réseau d’utilisateurs partageant un fichier (pas toujours copyrighté d’ailleurs). Ce détail technique rend la condamnation d’un tel site délicat d’un point de vue juridique. En Espagne, des sites similaires se sont vu relaxés dans des procès identiques, et tous les espoirs sont permis dans le procès en appel de ThePirateBay.
La popularité de ThePirateBay est liée à de multiples facteurs. Plus de 20 millions de membres, et de nombreuses initiatives destinées à promouvoir la culture du Libre : une plateforme de blogs “libres” (sur la même technologie qu’owni), un hébergeur d’images anonymes et non censurées, des sponsorings de films tels que ‘steal this film’ I & II, un service d’emails jetables et anonymes, de sublimes Tshirts, et bien sûr, le très attendu service de VPN anonyme destiné à contourner les lois telles qu’Hadopi, un hit annoncé qui promet de faire la fortune de ses fondateurs sous peu.
Le coup de pied dans la fourmilière
Le procès, aux yeux des majors, était censé mettre un fin à cela, mais ses conséquences désastreuses pour les politiciens Suédois ont de quoi remettre en question l’alliance observée un peu partout entre politiques et lobbys du disque.
En décembre dernier, alors que le procès n’en était qu’à ses débuts, 21% des Suédois se disaient prêt à voter pour le parti Pirate. Depuis, le nombre d’inscriptions au parti Pirate a explosé, le transformant en l’un des plus importants partis politiques Suèdois, et lui garantissant de façon quasi certaine une place au parlement Européen lors des prochaines élections. Les derniers chiffres annoncent que plus de la moitié des Suédois de moins de trente ans sont tentés par le vote Pirate…
Brutal rappel à l’ordre pour les politiques, qui avaient semble-t-il oublié un instant qu’il contrôlaient de façon précaire un régime qui n’avait rien d’une dictature.
La démocratie a ses inconvénient, que voulez vous…
Un rappel à l’ordre que semble avoir entendu la parti socialiste en France, qui semble-t-il a finalement décidé de prendre le parti d’internet plutôt que celui des majors.
De leur coté, les artistes, dont l’unanimité à condamner Hadopi s’est avéré n’être au final qu’une opération de propagande de plus, taillée en pièce par la Quadrature du Net, commencent désormais à se poser de vrais questions, comme celle de choisir entre leur public et leur employeur.
Un Parti Pirate aux Européennes, et aux élections suivantes, c’est d’autant moins de postes de députés pour les partis traditionnels. Un calcul qu’on fait trop tard les politiques Suédois qui regardent désormais arriver les Européennes avec inquiétude.
Et en France ?
Il faut l’avouer, nous somme en France loin d’être aussi avancés qu’en Suède. Le réseau des pirates – l’organisation la plus proche de ce qu’est le Piratpartied Suédois – n’est pas structuré en parti, et compte un peu moins de signatures que le Piratpartied (ce qui, ramené à la population Française, n’est pas encore énorme).
Mais ajoutez à cela les 50.000 signatures de la pétition anti Hadopi de SVM et l’incroyable succès de l’opération de blackout de l’internet organisée par la Quadrature du Net (près de deux millions de participants), et vous avez là les signes avant coureurs d’un mouvement… populaire.
Même si le passage en force d’Hadopi a toutes les chances d’assurer au Réseau des Pirates (ou à ses émanations) un succès grandissant, le timing des européennes est serré, et la tâche est immense.
Les coûts que représentent la participation à une élection sont par ailleurs considérables, et même si le réseau peut compter sur de généreux mécènes, la gestion d’une élection Européenne est une tâche colossale. Une organisation complexe à mettre en oeuvre, difficile, mais pas impossible, tant l’on retrouve dans les signataires du réseaux des pirates bon nombre de personnalités qui apporteraient à une telle aventure un savoir faire incontestable.
Le choix de l’alliance
Le Réseau des Pirates s’est constitué autour d’une autre initiative, celle du Pacte des Libertés Numériques. Véritable plateforme de revendication, ce Pacte a déjà été signé par la liste Europe-Ecologie et l’Alliance Démocratie Libérale. Il y a de fortes chances que d’autres partis rejoignent les signataires, ce qui ouvrirait la voie à des alliances.
En imaginant que cette stratégie digne de Nicolas Hulot soit plus efficace que celle qui a fait de ce dernier le dindon de la farce présidentielle, une alliance pourrait être une solution efficace pour voir défendre au niveau Européen les revendications du Pacte des Libertés Numériques.
L’alliance pourrait prendre une multitude de formes, au delà de l’appel solennel fait aux signataires du Pacte à voter pour telle ou telle formation, les compétences que l’on trouve parmi les premiers signataires du Pacte ont de quoi faire saliver tous les partis politiques de France (ou trembler, c’est selon). Presque tous les spécialistes de la communication politique en ligne sont signataires. Si une telle force de frappe se mettait au service d’un groupe politique (ou se mettait à son propre service), sa capacité à utiliser internet serait infiniment supérieure à tout ce qu’un parti traditionnel peut espérer mettre en œuvre d’ici 2012.
Au delà des Européennes
Une fois de plus, dans la perspective de 2012, le Réseau des Pirates peut exercer une pression considérable sur tous ceux qui, parmi les politiques, pensent que les futures éléctions présidentielles et législatives, tout comme la présidentielle Américaine de 2008, se jouera sur internet.
On peut lui imaginer un rôle de vigie, d’alerte, ou même de proposition, qu’il lui faudra composer en complément à celui déjà très efficace de la Quadrature du Net.
Si la campagne des Européennes n’est pas un enjeux majeur, car trop précipité, les accords passés à cette occasion, et plus encore les positions des partis politiques Français dans les années qui viennent face aux futures lois e-liberticides (LOPSI, paquet Télécom…), construiront – sur internet – l’échiquier de la présidentielle de 2012. De quoi faire peur à certains si l’on considère qu’en terme d’usages, les Français ont toujours eu 3 ans de retard sur les américains, et qu’internet fut un élément déterminant de la campagne 2008 d’Obama.
Ajoutez une presse qui s’est comporté jusqu’au dernier moment avec le plus grand mépris pour internet : beaucoup ont pris conscience que certaines informations ne peuvent compter sur la presse pour arriver au public. Il va leur falloir se débrouiller autrement. Un boulevard pour la presse alternative, les “pure players” et les nouveaux entrants (Owni, au passage, est né de ce constat).
La presse en 2012, qui sera alors largement subventionnée par l’état (et toujours, à moins d’un coup de théâtre incroyable, en grande partie détenue par les amis du pouvoir), ne sera vraisemblablement pas, et pour la première fois, en état de jouer les arbitres du jeu politique présidentiel. Son autorité, sa crédibilité et sa légitimité ne seront, pour beaucoup de Français, pas au rendez vous. Les quelques pourcents qui font toute la différence sur le résultat d’une élection ne seront plus dans ses mains.
Le prix de la gloire
En faisant éclater au grand jour l’affaire Hadopi, qui jusqu’au coup de théâtre des socialistes à l’Assemblée avait soigneusement été étouffé par la presse traditionnelle, l’échiquier politique et la position des technologies dans celui ci à profondément changé.
Les lois portant sur les technologies seront désormais regardés d’un autre oeil, les plus curieux voudront trouver un éclairage fait par des spécialistes, et ils savent désormais où les trouver, chez ceux qui depuis 2008 se battent contre Hadopi, dont les écrits on été à la base de la plupart des amendements proposés (et rejetés) lors du débat à l’assemblée, qui ont fourni aux représentants de la nation tous les éclairages techniques nécessaires pour faire de ce débat un modèle du genre : une opposition qui argumente, point à point, une majorité qui ne sait technologiquement pas de quoi elle parle, et qui tente d’y aller au bluff, puis, finalement, décide de passer en force, au plus grand mépris du débat démocratique, et ce devant des centaines de milliers de spectateurs médusés… qui commentent, s’indignent… et votent.
Le rendez vous des Européennes promet d’être brouillon, mais celui des prochaines présidentielles, lui, ne le sera pas. Trois années, sur internet, c’est une éternité, cela laisse pleinement le temps de s’organiser.
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