#Hadopi: trouble à l’ordre public

Le 28 mars 2010

L'Inpi refuse à Renaud Veeckman le droit de déposer comme marque le signe Hadopi ? Il adresse un recours démontant les  arguments avancés en taclant au passage l'Etat, qui a effectué une démarche similaire, couronnée de succès, elle.

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Photo CC Flickr minifig

Slips Hadopi, Hadopi photocopies…, ce n’est pas demain encore que vous verrez ces noms. Renaud Veeckman poursuit ses efforts afin d’enregistrer comme marque le signe Hadopi pour un certain nombre de services qui vont de la publicité à la télécommunication en passant par la location de vêtement ou encore… l’établissement d’horoscope et les pompes funèbres. L’homme, qui monte Apiadopi, une plate-forme de téléchargement légal, fervent opposant à Hadopi (la loi), avait entamé sa démarche en mai dernier, pour “contrer le marketing politique” à l’Å“uvre dans le débat. Il vient de déposer un recours contre l’Institut  national de la propriété (Inpi), après le refus de ce dernier d’accéder à sa demande.

L’Inpi a motivé sa décision en avançant deux points : trouble à l’ordre public et risque de confusion dans l’esprit du public. Et on ne rigole pas s’il vous plait. Par exemple, si Renaud crée une entreprise de pompes funèbres nommée “Hadopi rest in peace”, le quidam moyen pourrait croire qu’il s’agit d’une activité émanant officiellement de la Haute autorité. Très perturbant, en effet.

Des arguments réfutés par l’avocat Emmanuel Pierrat, engagé comme son client dans la lutte contre Hadopi. Sur  l’accusation de trouble à l’ordre public, il rappelle d’abord que le signe Hadopi n’est pas le signe officiel de la Haute autorité légalement consacré mais usuel. En effet, pour qu’une appellation soit officielle, elle doit émaner d’un texte légal ou réglementaire. Manque de bol, “ni le projet de loi du 18 juin 2008 ni la loi 2009-669 ne font référence au terme Hadopi.” Et de toute manière, ajoute-t-il malicieusement, l’acronyme aurait dû être Hadopdi, pour Haute autorité pour la diffusion des Å“uvres et la protection des droits sur l’Internet.

L’Inpi interdit à Renaud Veeckman ce qu’il autorise à l’État

M° Pierrat note aussi que “la doctrine définit les marques contraires à l’ordre public et aux bonnes mÅ“urs comme celles qui portent atteinte à des principes essentiels au bon fonctionnement de la société”, inciter à la consommation de drogues par exemple, ce qui n’est pas le cas dans l’affaire examinée. Il souligne aussi que “l’atteinte à l’ordre public suppose qu’un trouble soit établi de manière évidente à la capture-de28099ecran-2010-03-28-a-141502simple perception du signe en cause”, auquel cas est seul habilité à s’opposer à l’enregistrement d’un signe à titre de marque l’ordre public, qui est “absolu et opposable à tous”. Or l’État avait déposé en novembre dernier la “marque semi-figurative” Hadopi (ci-contre), sans que cela pose problème. Si la logique de l’Inpi est exacte, l’État n’aurait pas pu le faire.

Balayé aussi le risque de confusion. L’État a déposé la marque Hadopi pour des services qui n’ont rien à voir avec ses missions. Aucun problème a estimé l’Inpi. Il a en outre accolé l’intitulé exact de l’acronyme, pour éviter tout risque de confusion. L’Institut n’a apparemment pas examiné avec attention les services déposés par Renaud Veeckman : ils sont étrangers aux champs de compétence de la Haute autorité. En conclusion de quoi, “il parait peu probable que le public puisse croire à une filiation entre la Haute autorité et des services d’agences matrimoniales, de crémation ou d’agence de publicité qui porterait le nom Hadopi.” CQFD.

Pourquoi l’État a-t-il déposé la marque commerciale ?

En résumé, l’argumentaire de l’Inpi semble assez bancal. Renaud Veeckman attend donc sereinement la décision de l’Inpi, prêt à aller en appel en cas de nouveau refus. Ce qui serait une nouvelle petite pub pour Apiadopi au passage, ça ne mange pas de pain en période de lancement.

Mais surtout se demande-t-il, “pourquoi l’État a-t-il déposé la marque commerciale Hadopi ? Mystère ! Il était déjà protégé : tout sigle de l’État est déjà protégé par la loi. Vous risquez des poursuites si vous l’utilisez à des fins punies par la loi : diffamation, insulte. À moins de vouloir vendre des tee-shirts…”

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