OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Les vrais prédateurs sexuels http://owni.fr/2011/11/29/itw-les-vrais-predateurs-sexuels/ http://owni.fr/2011/11/29/itw-les-vrais-predateurs-sexuels/#comments Tue, 29 Nov 2011 18:13:29 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=88310 Jean-Pierre Rosenczveig est président du Tribunal pour enfants de Bobigny. Auteur de nombreux ouvrages sur les droits de l’enfant et blogueur, il revient sur la définition des prédateurs sexuels – tels que définis par les associations de lutte contre la pédophilie sur Internet – et les modifications qu’Internet a apporté au cours de ces dernières années.

Comment définir la pédophilie ?

Je revendique une formule qui exprime tout pour moi : les enfants ont droit à l’amour mais pas à ce qu’on leur fasse. On a le droit d’avoir de l’affection pour un gamin ou une gamine mais il y a des limites posées non seulement par la morale et l’éthique personnelle mais surtout par le code pénal. Ce dernier pose une série d’interdits notamment en ce qui concerne les relations entre enfant et adulte et qui sanctionne les faits. Les circonstances sont aggravées lorsque la victime est très jeune et lorsque l’auteur est en position d’autorité sur l’enfant.

La pédophilie est à la fois un fait criminel et un fait sociologique. Au cours de certaines périodes de l’histoire ou dans certaines cultures, le fait n’existerait pas, ce qui est largement contesté. Mais globalement, le sens de l’histoire est d’admettre qu’il puisse y avoir des relations sexuelles entre individus pour des raisons non reproductibles et pour des raisons de plaisir. Pour autant ces relations sexuelles sont effectivement à considérer avec des interdits : ceux de protection pour éviter que certains n’abusent de leur force à l’égard d’autres plus faibles. Dans la pédophilie c’est le plus fort contre plus faible que lui. Certains plus fragiles ne pouvant pas manifester leur opposition. Après jurisprudence, le législateur est venu reconnaître cette position de faiblesse ou de déséquilibre entre deux êtres humains : enfant/adulte.

La définition même de l’enfant évolue aussi ?

Au sens général du terme, l’enfant est une personne de moins de 18 ans et l’enfant de moins de quinze ans est plus spécialement protégé. Mais d’une manière générale, ce concept d’enfant est en train de s’estomper au profit d’une approche plus globale de la personne vulnérable. L’âge et la vulnérabilité ne se cumulent pas sur le plan juridique mais ces critères vont entrer en ligne de compte. Le fait d’être un enfant de moins de quinze ans pose déjà une présomption de faiblesse. De façon purement subjective, dans la période historique que nous sommes en train de vivre, je pense qu’avec le degré de civilisation qu’est le notre, nous prenons plus en compte le respect de l’autre, en particulier de l’enfant. Nous sommes dans une période où il y a moins de maltraitance physique. Ce qui n’a plus rien à voir avec le 17ème siècle en Europe. La vie ne vaut plus la même chose.

Dans ces affaires-là, il n’y a pas d’équilibre de discernement entre ce qui est bien et ce qui est mal de la part de l’adulte ? Comment se définissent-ils ?

Il y a effectivement un certains nombre de personnes qui sont portées vers des enfants dans leurs relations affectives et sexuelles et qu’ils peuvent plus ou moins entretenir. Mais la relation amoureuse et plus la relation sexuelle doit être consentie des deux côté. Or pour qu’elle soit consentie, il faut qu’elle soit équilibrée. Ce qui n’est pas le cas entre un homme de 35 ans et une jeune fille de 14 ou 15 ans. Et même s’il n’y a pas de lien familial ou d’autorité, les histoires sont différentes, la structuration et l’expérience de la vie aussi. La jeune fille de 14 ans découvre la sexualité alors que l’adulte non. Il n’y a plus de négociation à avoir avec une jeune fille qu’on peut embobiner à travers le père qu’elle recherche, une personne qui projetterait une image, ou qui aurait du pouvoir. Celui qui tient ce discours a de l’autorité sur elle. Une jeune fille ou un enfant, ne peut pas imaginer que l’adulte qui vient vers lui soit quelqu’un qui lui veuille du mal. Dans une relation normale, personne ne cherche à faire du mal à l’un ou à l’autre. Dans la relation pédophile, l’adulte pour se dédouaner va soutenir, et ce sera toujours son “mot”, qu’il a été séduit par l’enfant. En d’autres termes, il va reprocher à l’enfant d’avoir développé un art de la séduction et dans son esprit il y a bien une victime et un coupable. Sauf qu’il va essayer de se défausser de sa responsabilité de coupable en se désignant comme victime.

“l’adulte lui est présenté comme étant quelqu’un qui n’est pas dangereux”

Il va toujours prendre un temps pour la séduction, sinon c’est une agression “simple” ou un viol. Je ne connais pas un pédophile qui n’ait pas fait de travail d’approche, sous forme de séduction, pour faire tomber les quelques résistances qui pourraient exister et surtout pour faire fonctionner le dispositifs d’appétence. Mais un pédophile inscrit son comportement dans la relation, dans le temps. Et Internet ou pas, il va utiliser des subterfuges. Petit à petit en levant son masque il aura créé un tel climat de confiance que la jeune personne en face de lui, même si le masque est tombé ne tirera rien d’autre de son aveu que le constat qu’il est vieux et pas elle.

C’est la plus grande différence : la présence de protection et le respect de l’un et de l’autre. On est limité par soi même et par les limites de l’autre, les barrières existent. Mais dans la relation entre un enfant et un adulte, le réseau de protection n’existe pas, l’enfant peut trouver que la situation est naturelle et d’autant plus quand l’adulte lui est présenté comme étant quelqu’un qui n’est pas dangereux et qui ne va pas lui faire de mal. Le pédophile arrive avec des chocolats !

Pourquoi les statistiques sur le sujet ne sont pas forcément fiables et quasi-absentes concernant les agressions suite à de mauvaises rencontres sur Internet ?

Au niveau des statistiques, Sébastian Roché, chercheur en sociologie à Grenoble, démontre qu’on ne connaît qu’un fait de délinquance sur cinq. Un fait est connu quand quatre autres se sont déroulés, à l’image du premier. Dans certains domaines, le taux de non connaissance est plus faible qu’ailleurs. En imaginant celui sur les violences et les abus sur enfants, on les repère plus facilement que les infractions fiscales ou les détournements. Les victimes sont des victimes physiques et autour des enfants il y a tout un système de dépistage, qui doit permettre de réduire au minimum le taux de non visibilité. Aujourd’hui on a réussi à libérer la parole. Mais a-t-on plus de chances de voir un enfant dire qu’il a été victime de violences sexuelles ou que par delà sa parole, on va réussir à le démontrer à travers son comportement ses écrits ou son silence ? Je vois souvent le terme d’“ambiance pédophile” dans des rapports sur une famille. Il y a une ambiance pédophile, des choses qui relèvent de la pédophilie mais il n’y a rien, aucun fait. À l’heure actuelle, il y a une augmentation des faits connus mais personne ne peut affirmer qu’il s’agit d’une augmentation des faits commis.

On peut connaître les variations de cas connus. C’est ce que je fais dans le cadre de mon travail. Et sur 30 ans, nous avons pu contribuer à ouvrir les yeux de ceux qui ne savaient pas entendre et comprendre. Est-ce qu’on peut en déduire une augmentation du nombre d’affaires sexuelles dans les juridictions, ça veut dire qu’il y a une augmentation par dix ou par cent des violences sexuelles imposées aux enfants? Non, ça veut dire qu’on peut multiplier par X le nombre d’affaires connues et qui donnent matière à une poursuite. Il y a toujours X faits de pédophilie par an, simplement à un moment donné, on pouvait en voir dix et aujourd’hui on en voit 25. Mais peut-être il y en a plus que cent …

N’est-il pas alarmiste de dire qu’Internet permet d’augmenter ce genre de pratiques ?

En tout cas Internet ou la pédophilie par Internet ne doit pas différer de ce qu’il s’est toujours passé dans ce domaine là. Simplement les nouvelles techniques viennent à la fois faciliter les choses, ouvrir de nouvelles voies. Mais comme par le passé ! On sait tous qu’avant on parlait plus d’hommes qui pouvaient aller dans les jardins publics et qui s’exhibaient, voire qui cherchaient …. Est-ce que fondamentalement, les attitudes et les mécanismes, les ressorts, sont différents d’aujourd’hui ?

“Sur les cent personnes avec qui votre enfant discute sur Internet, il n’y peut-être aucun pédophile !”

Il faut aussi savoir être réaliste, on peut développer la thèse du “plus on en parle et plus on accentue le phénomène” , mais …. En étant un peu les pieds sur terre, vous vous méfiiez des vieux messieurs dans les parcs qui pouvaient agresser votre enfant. La solution pour éviter ce genre de situation était de quitter le parc ou de ne jamais laisser votre enfant seul. Vous aviez la capacité de mettre en oeuvre une protection autour de votre enfant. Aujourd’hui, vous tournez le dos, vous êtes dans la cuisine et votre enfant dans sa chambre discute avec plusieurs contacts que vous pouvez ne pas connaître. Vous pensez votre enfant en sécurité mais peut-être pas … Après sur les cent personnes qu’il connaît ou avec qui il discute, il n’y peut-être aucun pédophile !

Quel est le vrai rôle d’Internet dans ce cas ?

Il y a 35 ans il n’y avait pas internet, et c’est vrai que les nouvelles technologies facilitent le “travail”, l’approche qu’un certain nombre de gens développent en direction des populations les plus fragiles. Mais sans le nier, il n’y a pas non plus à paniquer. Quand j’avais moins de 25 ans, on nous a appris à savoir lire le journal et à maîtriser l’accès à l’information. Plus que jamais cette démarche d’apprendre à maîtriser les instruments s’impose et il faut apprendre aux enfants à connaître l’offre de services qu’est internet. C’est un instrument extra-ordinaire de culture et de distribution du savoir, de l’accès au savoir. Nous verrons très bien demain la ligne de clivage entre ceux qui ont accès à internet et ceux qui n’ont pas accès à internet. Avant ça, comme tout instrument, il faut savoir s’en servir ! Avec un simple crayon noir on peut écrire un document diffamatoire, déborder d’injures comme écrire un chef d’oeuvre. Et avec un montblanc on peut écrire quelque chose de totalement stupide. Donc c’est pas l’instrument qui est en cause, c’est la maîtrise de l’instrument.


Illustrations pedobear via 4Chan et Kevin Jacobs [ccbyncsa] via Flickr

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Drogues: le succès du modèle portugais http://owni.fr/2011/06/15/drogues-la-succes-du-modele-portugais/ http://owni.fr/2011/06/15/drogues-la-succes-du-modele-portugais/#comments Wed, 15 Jun 2011 12:37:13 +0000 Marie-Line Darcy http://owni.fr/?p=68026

A gauche le périphérique, à droite des immeubles flambants neufs. Entre les deux un immense terrain vague où subsistent les murs délabrés d’une usine désaffectée. Ce décor banal de banlieue se trouve à Lumiar, une ville champignon de la périphérie de Lisbonne.

L’endroit s’appelle “croix rouge”, et à mieux y regarder, il est moins paisible qu’il n’y parait: le sol est jonché de plastiques et de-ci de-là, des seringues et des bouts de papier aluminium. Au loin, près des ruines d’anciens baraquements, des silhouettes occupées à se shooter.

Une camionnette à la rencontre des usagers en banlieue de Lisbonne

Les cris des enfants de l’école toute proche renforcent cette étrange impression de malaise. C’est ici, tous les jours de la semaine que s’installe la camionnette de l’association “Crescer na Maior”, quelque chose comme “Grandir le mieux possible”).

Un véhicule très spécial d’où sortent deux jeunes femmes, Alexandra et Elisabeth, qui sans tarder ouvrent le coffre rempli d’un matériel hétéroclite: boites en plastique au couvercle percé, caisses en carton remplies de kits de drogue, et tout un matériel fait de bric et de broc.

Notre rôle est d’établir le contact avec les drogués. Grâce à notre présence régulière la confiance s’est établie, ils viennent nous voir en cas de problème. Mais notre premier objectif est de distribuer des kits de drogue: un kit propre contre une seringue usagée. Cela contribue grandement à la protection sanitaire des consommateurs par injection.

Lumiar, banlieue champignon en périphérie de Lisbonne.

Moins de deux minutes après l’installation du véhicule utilitaire, un homme s’approche. Dans sa main, une grosse poignée de seringues. Il les introduit une à une dans une boite au couvercle percé. Emilio compte à voix haute: une, deux, trois, … trente seringues, sous le regard attentif d’Elisabeth et d’Alexandra. Avec un large sourire il explique:

Non, ce n’est pas moi qui ai tout utilisé. Je récolte les seringues, et je ramène des kits propres aux autres drogués. Et pour me remercier, ils me fournissent en doses.

L’homme détaille le contenu d’un kit: une seringue, un minuscule récipient en métal, des doses d’eau distillée, des préservatifs… A 54 ans, Emilio bénéficie, comme près de 21 000 personnes, d’un programme de substitution de méthadone (ou Subutex). Mais il laisse entendre qu’il est loin d’avoir décroché. “Ce sera comme ça jusqu’à ma mort. Mais ça va beaucoup mieux, grâce au programme, grâce aux filles”, confie-t-il en montrant les deux intervenantes du programme de prévention, avant de repartir avec son chargement de kits propres.

Pour l’association, l’essentiel est d’établir puis de maintenir le contact. Apparemment le petit trafic instauré par Emilio n’est pas un problème.

Nous savons qui il approvisionne. Il sert d’agent de liaison avec l’accord des drogués. Et il signale les problèmes qui apparaissent. Mais nous ne donnons jamais plus que le nombre de seringues rendues.

“C’est la règle”, explique Elisabeth. L’association “Crescer na Maior” a été constituée par un groupe de psychologues et travailleurs sociaux. Leur projet de prévention et d’accompagnement de la consommation de drogue , un travail de proximité intitulé “Diminution des risques associés”, a été retenu par l’IDT, l’Institut de la drogue et de la toxicomanie.

Envoyer les consommateurs devant une commission de dissuasion plutôt qu’au tribunal

Depuis dix ans, l’Institut, qui dépend directement du ministère de la Santé, a mis en place un programme opérationnel de réponses intégrées (PORI) reposant sur un postulat : le consommateur de drogue n’est plus un criminel mais un malade.

Le modèle portugais de lutte contre la drogue passe d’abord par une décision politique importante : la loi votée en novembre 2000 a mis fin aux politiques répressives en dépénalisant l’acquisition et l’usage de tous les stupéfiants. Objectif : réduire la demande par la prévention et la multiplication des offres de traitement, et endiguer la progression du VIH parmi les toxicomanes.

La loi, audacieuse, ne rend pas légale la consommation de drogue, mais elle évite d’envoyer devant le tribunal un consommateur occasionnel qui n’a pas l’objectif de devenir trafiquant. A condition toutefois de ne pas être en possession de plus de 5 grammes de haschisch , d’1 gramme d’héroïne et de 2 grammes de cocaïne. Cela correspond à dix jours de consommation moyenne “personnelle”.

Au-delà, en cas de contrôle policier, c’est le pénal. En deçà, la prise en charge sociale, psychologique et éventuellement médicale du patient.

Jaime a accepté de parler à condition qu’on respecte son anonymat. Il se présente devant la “commission de dissuasion” de la rue José Estevão, dans le centre de Lisbonne. Cette commission a pour but de conseiller le consommateur occasionnel et de lui proposer l’arsenal de moyens destinés à l’empêcher de plonger dans la consommation dure et de dériver vers la délinquance. Mais rien de coercitif : la commission n’est pas un tribunal.

Jaime, qui s’est fait arrêter par la police, s’est rendu volontairement au centre de dissuasion. Il est entendu par une psychologue et un travailleur social, puis passe devant la commission. Pas de discours moralisateur, une information claire et précise sur sa situation, les étapes qu’il risque de franchir sans même sans apercevoir, l’illusion de la drogue douce, et le dérapage. Le mot “prévenu”reprend tout son sens. “J’ai un enfant maintenant. Je travaille. Je dois faire attention. Cette fois encore, je m’en sors bien”, confie rapidement Jaime.

Pour Nuno Capataz, coordinateur de l’un des 18 centres de dissuasion du pays, il s’agit d’empêcher la récidive, d’éviter au patient qu’il ne mette le doigt dans l’engrenage.

La suite dépend entièrement de Jaime. Nous lui proposons un encadrement. A lui de s’emparer des moyens qui sont mis à sa disposition. Il est dans la situation limite. Une prochaine interpellation, et il sera sanctionné”.

Des structures d’aide médicales adaptées dans les hôpitaux

Le système prévoit en effet des sanctions qui s’apparentent à ce qui est en application dans le code de la route. Une comparaison très utile pour faire comprendre aux consommateurs qu’une récidive sera punie d’amendes ou de travaux d’intérêt général.

Les toxicomanes sont pour leur part dirigés vers les hôpitaux où des structures d’aide médicale ont été mises en place pour permettre les cures de désintoxication, les thérapies comportementales ou psychomotrices, et le traitement par la méthadone ou autre substitut.

Nous sommes à la fin d’un cycle, celui des grands dépendants, qui ont commencé à se droguer il y a 20 ou 30 ans. Il s’agit pour nous d’éviter qu’une nouvelle génération ne fasse le grand saut. La dépénalisation de la consommation est un élément qui rend le système de lutte plus cohérent, basé sur une approche sanitaire du problème.

explique João Goulão, le directeur de l’IDT, et l’un des mentors du système intégré de lutte contre la toxicomanie.

Le succès du modèle portugais est incontestable: le nombre d’héroïnomanes a baissé de 60% en une décennie. D’après le rapport 2009 de l’IDT, le Portugal est le pays où la consommation de canabis des 15-64 ans est la plus faible d’Europe (moins de 8% contre 23% environ en France plus de 30% au Royaume-Uni). Pareil pour la consommation de cocaïne – même si elle est en augmentation – avec moins d’1% contre 2,2% en France, 4,6% en Italie ou encore 6,1% au Royaume-Uni.

João Goulão, président de l'IDT.

Au plan sanitaire, le dispositif est également une réussite. Le nombre de décès liés à l’usage de drogue a été divisé par plus de six, passant de 131 en 2000 à 20 en 2008. Le nombre de contaminations au VIH imputables aux injections de drogue a été divisé par quatre : de 1 430 à 352 sur la même période.

Pourtant, ces chiffres n’ont pas donné la folie des grandeurs à João Goulão, qui lance un avertissement: toute tentative de dépénaliser la drogue est vouée à l’échec si la décision ne repose pas sur une structure solide des services de santé. En clair l’aventure ne peut être tentée que s’il y a un réel choix de société et un véritable engagement politique pour encadrer les décisions.

Au Portugal, aucun triomphalisme exacerbé. Ni angélisme ingénu. Si le nombre de morts par overdose continuent de diminuer, le nombre de décès liés à la drogue augmente en raison de l’apparition de nouveaux produits. Les professionnels associés au dispositif le reconnaissent volontiers: le problème de la drogue est un tonneau des Danaïdes, un puit sans fond.

Mais ce sont aujourd’hui les spécialistes qui sont chargés d’en colmater les brèches. C’est long et difficile. Mais les résultats sont encourageants : 38 875 personnes sont actuellement suivies par le service public de santé.


Article publié initialement sur MyEurop sous le titre Drogues: le succès du modèle portugais. A litre également sur le même sujet :

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S’en griller une pour oublier les photos anti-tabac http://owni.fr/2011/04/29/sen-griller-une-pour-oublier-les-photos-anti-tabac/ http://owni.fr/2011/04/29/sen-griller-une-pour-oublier-les-photos-anti-tabac/#comments Fri, 29 Apr 2011 14:42:46 +0000 Robert Molimard http://owni.fr/?p=34708 Dès son ouverture à la Belle Époque, les foules se pressaient au théâtre de la rue Chaptal à Paris, pour frémir d’horreur, de dégoût, d’angoisse et de plaisir aux spectacles qui rivalisaient d’atrocités, dans un flot d’hémoglobine. Le Grand Guignol a fermé en 1963, ne pouvant soutenir la concurrence des films d’horreur qui arrivaient à faire beaucoup mieux. Le relais est désormais pris par les présentoirs des buralistes.

Le problème à résoudre avant de prendre de grandes mesures spectaculaires est celui de l’effet réel des images réalistes. Répulsion ou attraction ? Quelle action sur les fumeurs, qui sont les porteurs du tabagisme ? En 2000, le Canada a introduit des images-choc sur les paquets de cigarettes. Une enquête téléphonique a été menée 9 mois plus tard auprès de 611 fumeurs. Relancés après 3 mois, 432 ont répondu . Un tiers (36 %) avaient cherché à se cacher les images, en changeant d’étui, mais cela n’avait modifié en rien leur tabagisme ultérieur. Peur (44 %) et répulsion (58 %) étaient les réactions émotionnelles qu’elles suscitaient. Le groupe ayant le plus fortement réagi a déclaré avoir plus fortement “diminué sa consommation, eu l’intention, ou tenté d’arrêter”.

La différence avec les moins émotionnés est faible (R=1,35). Elle n’est statistiquement significative que parce que la tentative d’arrêt, seul critère un peu objectif, a été mélangée dans un critère global avec des données peu fiables, comme la diminution de consommation. De plus ces données sont très sensibles aux effets de suggestion d’une telle étude aux objectifs déclarés. Enfin, les 30 % d’absence de réponses 3 mois plus tard peuvent constituer un tel biais de sélection qu’on ne peut accorder aucune confiance à cette statistique. Ajoutons que seule la comparaison avec un groupe semblable de fumeurs qui n’auraient pas été exposés à ces images aurait pu permettre d’affirmer leur efficacité. En l’état, le pouvoir de conviction d’une telle étude est absolument nul.

Des questions orientées

On ne trouve dans la littérature aucune autre étude sur l’efficacité. Une mise au point de 2009, à l’occasion de l’entrée en vigueur de ces avertissements en Suisse, conclut que ces images sont “utiles” . Mais cette affirmation ne repose que sur cette seule étude canadienne ! Le titre d’une des références qu’elle cite était alléchant, laissant penser que les fumeurs prêts à s’arrêter tireraient bénéfice de ces images . En fait ce travail porte, comme beaucoup d’autres, sur leur impact immédiat subjectif, leur perception, les sentiments qu’elles éveillent. On a demandé aux fumeurs si cela les incitait à s’arrêter, si cela les faisait réfléchir sur les risques. Il en est de même d’une enquête hollandaise auprès d’adolescents . Les questions induisent clairement les réponses. Aucune ne mesure l’efficacité en termes de tentatives d’abandon de la cigarette. L’intention n’est pas l’action.


Une seule voix un peu dissonante s’est manifestée . Demander à une population de fumeurs s’ils ont l’intention d’arrêter recueillera automatiquement un bon pourcentage de velléitaires. Les auteurs soulignent qu’il n’y a aucune preuve que l’introduction de ces avertissements ait augmenté les tentatives d’arrêt. Ils reprochent à l’équipe canadienne d’ignorer les travaux importants sur l’efficacité des communications basées sur la peur. Les fumeurs expriment une forte intention d’arrêter après les messages qui induisent la peur, car ils les espèrent efficaces. Cependant, lorsqu’on leur demande ensuite leurs priorités, celle d’arrêter de fumer devient très faible par rapport à d’autres comportements de santé. Leurs réactions déclarées sont positives, mais les réactions observées sont négatives, y compris les changements de comportement qui sont moindres chez ceux le plus à risque. Les réactions défensives ont pour but de “se libérer de la peur, pas nécessairement des menaces”.

Fumer pour faire fuir l’angoisse

C’est tout à fait ce que j’ai retiré de mes premières expériences voici 50 ans. Si, dans une conversation de salon, on me demandait si c’était bien vrai que le tabac donnait le cancer du poumon, je n’avais aucune peine à décrire un tableau qui n’avait rien de rose. À mon étonnement, la réaction n’était pas de me demander quand et où se tenait ma consultation. En fait, une main atteignait le paquet de cigarettes dans une poche, une cigarette était allumée presque en catimini, mais quelques minutes plus tard tous les fumeurs en avaient allumée une et la fumaient à l’aise, renversés sur leur fauteuil, m’écoutant poliment discourir comme si je faisais un reportage sur des mœurs exotiques.

En fait, ce discours avait suscité leur angoisse. Pas de secours dans la médecine ! Leur seule défense était de se persuader que le cancer ne les toucherait pas, qu’ils étaient génétiquement invulnérables. Mais à quoi reconnaît-on les invulnérables ? Simple : ils peuvent fumer sans risque ! Si je crains d’en allumer une, c’est que je ne suis pas certain de mon invulnérabilité ? Alors je l’allume. Je me prouve ainsi que je me considère réellement invulnérable… et cette cigarette lève l’angoisse. Gribouille, qui se jette à l’eau par crainte de la pluie. Etudiant l’impact des images par le délai de détournement d’attention qu’elles suscitent, des auteurs allemands trouvent de plus que, chez les fumeurs de plus de 20 cigarettes, elles augmentent l’anxiété et le besoin de fumer !

Voici donc encore une de ces mesures démagogiques, populistes, qui ont d’autant plus de succès qu’elles sont moins scientifiquement fondées. C’est une agitation stérile, du bruit pour rien. Les activistes à la psychologie de café du commerce ont conscience d’avoir agi, ce qui va les satisfaire au moins pour un temps. Les hérauts de l’anti-tabagisme pavoisent et crient victoire à la télévision. Mais hélas susciter la peur est encore le plus sûr moyen d’asservir les peuples, et d’accrocher plus fortement le fumeur à sa cigarette, pour le plus grand bonheur des compagnies tabagières, de l’État et de quelques graphistes.

>> Article initialement publié sur Formindep

>> Photos Flickr CC-BY-ND Paternité Pas de modification par Peter Rosbjerg, CC-BY-NC-ND par alphadesigner, et CC-BY-NC-SA par LeRamz.

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Police: le boomerang des moyens contre le gouvernement http://owni.fr/2011/02/15/police-le-boomerang-des-moyens-contre-sarkozy/ http://owni.fr/2011/02/15/police-le-boomerang-des-moyens-contre-sarkozy/#comments Tue, 15 Feb 2011 12:09:59 +0000 Jean-François Herdhuin http://owni.fr/?p=46752 La confrontation permanente de l’ancien ministre de l’Intérieur aujourd’hui Président de la République Nicolas Sarkozy avec la justice ne se cantonne plus aux seules questions de sécurité. Il a d’abord considéré que les décisions judiciaires ne répondaient pas aux attentes des citoyens qui demanderaient plus de répression.

Nous pourrions  démontrer qu’il y a moins de crimes de sang, moins de « serial killers », mais il y a toujours eu et il y aura toujours des crimes horribles. L’opinion publique réclame toujours plus de sécurité, elle est effrayée par les crimes de sang, mais c’est la petite et moyenne délinquance qui la frappe le plus souvent et qui la préoccupe. La tentation est grande d’agir sur ce terrain propice aux manœuvres politiques.

Rompre avec cette idéologie du tout sécuritaire de la droite

Je me demande toutefois ce qu’il adviendrait si un crime horrible survenait  à moins d’un mois de l’élection présidentielle de 2012. Cela sauverait-il le gouvernement actuel ou bien serait-ce au profit de l’extrême droite ? Les risques de manipulation de l’opinion existent et des relais sont disponibles dans certains médias pour amplifier l’impact d’un fait divers.

L’abandon de la police de proximité peut expliquer tant l’état d’inquiétude de la population que l’échec du gouvernement dans la lutte contre la délinquance. Mise en œuvre à partir de 1998, cette police de proximité avait été mal conçue et très mal présentée, de manière idéologique, intraduisible dans l’organisation et les stratégies de la police. La gauche devait rompre avec cette idéologie du tout sécuritaire de la droite, mais bien qu’ils s’en défendent, les responsables de la police nationale avaient alors ignoré la notion de répression. Les policiers se sont alors sentis démunis et la population mal protégée. J’étais alors à la tête du commissariat de Beauvais qui avait été choisi comme un des sites pilotes.

Le concept répondait à un besoin de modernisation de l’institution policière, et du service public. Cependant les réformes engagées par la gauche n’ont pas pu être achevées. En 2002, sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy qui avait la main sur les questions de sécurité, le nouveau gouvernement balaie tout se qui pouvait se rattacher à la notion de prévention. On oublie même ce qui pouvait rapprocher la police des citoyens pour ne retenir que la dimension sécuritaire.

Dans la Police Nationale, il est conseillé aux commissaires de police d’oublier les idées du passé pour axer leur action répressive sur les techniques de maintien de l’ordre, qui se sont avérées inefficaces. En effet contrairement aux affirmations du ministre de l’intérieur les chiffres de la criminalité n’ont pas baissé depuis 2002, ils ont même augmenté dans les rubriques les plus sensibles: les atteintes aux personnes.

Les techniques de maintien de l’ordre sont-elles utiles ?

Depuis 2002 la Police Nationale et la gendarmerie disposent d’outils plus modernes, les fichiers automatisés ont été améliorés, la police technique et scientifique largement développée. Cette modernisation entamée depuis Pierre Joxe lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, poursuivie par des ministres de gauche comme Jean-Pierre Chevènement, n’a pas profité à la police généraliste, celle des petits commissariats qui traitent la masse de la petite et moyenne délinquance.

Dans les commissariats on vit toujours dans des locaux mal adaptés, même lorsqu’ils sont récents. Parfois les gardiens de la paix vivent dans l’insalubrité, comme les personnes gardées à vue, mais pour la police c’est en permanence. Les policiers sont toujours à la recherche de véhicules en état de marche. Souvent on se cache les clés afin de préserver les véhicules en bon état. Là où il faudrait les personnels les plus expérimentés on affecte des jeunes sortis d’école, avec les risques que cela comporte. Il s’agit de risques physiques bien sûr mais aussi des responsabilités qu’on encourt en cas de dérapage : l’action des policiers peut engager leur responsabilité pénale, civile, et administrative. Les syndicats de policiers parlent à juste titre « d’insécurité juridique » pour ceux d’entre eux, de plus en plus nombreux, qui sont exposés au sein des quartiers difficiles.

Toutefois les techniques de maintien de l’ordre, qui sont favorisées aujourd’hui, exposent davantage les personnels à ces risques. Ce sont en effet des actions collectives qui engagent des personnels en compagnies, sections ou groupes dont il est difficile d’orienter précisément l’action, surtout quand on est coupé du commissariat local et qu’il n’y a pas eu de préparation en amont. Ces techniques sont très peu efficaces. On pourra toujours afficher des dizaines ou des centaines d’arrestations, et dire que 10 000 cages d’escalier ont été visitées, au bout du compte « les prises » sont bien maigres par rapport aux efforts déployés.

Derrière l’affichage statistique il faut apprécier la gravité des infractions relevées. Il s’agit d’outrages, d’usage de stupéfiants (cannabis le plus souvent), au mieux de port d’arme (armes blanches). Des procédures, de plus en plus complexes, sont diligentées pour des infractions mineures qui découragent les fonctionnaires de police. Leur capacité d’initiative est oubliée et ils se mettent à la tâche sur ordre, sans illusion. Ces procédures n’intéressent pas les magistrats qui ne peuvent pas suivre ce flot statistique inutile. En procédant de la sorte c’est tout juste si l’on a pu lutter contre le sentiment d’insécurité. Si la population et les élus réclament une présence policière, ce n’est pas pour deux heures.

On ne fait pas de la police par impulsions, en créant un climat dans lequel la police est plutôt mal perçue. En procédant de la sorte, on ne remplit pas la mission qui est dévolue aux forces de sécurité.

Magistrats et policiers doivent faire des choix

L’étude de la délinquance et son traitement ne peuvent se limiter à l’angle réduit des statistiques. Un fait constaté n’est pas égal à un autre fait : il faut mesurer son impact sur les victimes, sur l’environnement immédiat et même estimer l’atteinte portée aux intérêts de la société. S’il convient d’évaluer les performances, les phénomènes de délinquance n’autorisent pas à utiliser les mêmes instruments de mesure que ceux des activités industrielles et commerciales. Si l’on observe les effets néfastes sur les salariés comme sur les entreprises de ces secteurs, ils ont montré leurs limites. L’évaluation de l’activité des services de police et de gendarmerie devrait être partagée à l’échelon local avec les maires et les conseils municipaux. Il en est de même de la définition des objectifs qui guident l’action des services de sécurité. Le rôle de l’État ne serait pas contesté par ce partenariat local.

Aujourd’hui les magistrats comme les policiers sont contraints de faire des choix faute de ne pouvoir tout appréhender. Il convient de remarquer ici que tous les petits désordres ne devraient pas être judiciarisés. Si l’on veut respecter le principe de la séparation des pouvoirs il ne faut pas « gâcher » l’usage des institutions à vouloir tout traiter.

Dans mes commissariats je consacrais parfois une journée à lire toutes les plaintes, toutes les mains courantes, tous les rapports de police. C’était une façon de percevoir l’activité générale du service sur 24 heures. J’en concluais à chaque fois que nous ne pouvions aller à l’essentiel face à la sollicitation de la population de plus en plus exigeante, devenue inapte à assurer ce que l’on pourrait appeler le contrôle social. Comme nous ne pouvions garder les procédures pour nous (sous réserve de mes considérations sur la vérité des statistiques) tout était adressé au parquet. Je me suis toujours demandé comment les magistrats pouvaient faire le tri de manière sérieuse, sans jamais se tromper sur le devenir d’une procédure.

C’est la cohérence de la chaine pénale qu’il faut renforcer dès l’origine par des actions concertées sur le terrain avec des objectifs communs. Le cas de délinquants récidivistes pourraient être examinés, notamment quant à leur dangerosité dans leur environnement. Les Groupes locaux de traitement de la délinquance, dirigés par des magistrats avec des acteurs de terrain, semblent être une solution à privilégier pour éviter de s’épuiser à traiter le flot statistique de la délinquance.

C’est peut-être la première fois que l’on voit les syndicats de police,  commissaires de police inclus, être solidaires des magistrats. Des courriers de soutien ont été adressés aux syndicats de la magistrature. J’ai comme le sentiment que le Président de la République se trouve face à un front d’acteurs qui se trouvent aujourd’hui placés en « insécurité juridique et matérielle ».

Pour oublier certaines vives querelles plus ou moins récentes, dans le respect de l’indépendance de la justice, on pourrait espérer que des liens se créeront entre magistrats et policiers qui exercent des métiers difficiles, comportant des enjeux si importants pour notre démocratie.

Article initialement publié sur Police et Banlieue sous le titre “Police-Justice: un front commun?”

Crédits Photo CC FlickR par eisenbahner, Alain Bachellier, xtof, biloud43

Image de Une par ToAd

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Ces soldes au rayon justice qui provoquent l’ire des magistrats

Nicolas Sarkozy et la justice: le triomphe du populisme pénal

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Culpabilisation, cocaïne et inaction politique http://owni.fr/2011/01/23/culpabilisation-cocaine-et-inaction-politique/ http://owni.fr/2011/01/23/culpabilisation-cocaine-et-inaction-politique/#comments Sun, 23 Jan 2011 09:00:11 +0000 Denis Colombi (Une heure de peine) http://owni.fr/?p=43463

Ce billet a été publié sur Une heure de peine, et repéré par OWNIpolitics

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C’est avec pompe et une certaine bienveillance médiatique que l’Inpes, institut national de prévention et d’éducation pour la santé, lance une énième campagne publicitaire contre la consommation de drogue. Le thème de l’année ? « Contre les drogues, chacun peut agir ». Sous-entendu : si vous ne faites rien, c’est de votre faute. Sous-entendu aussi : on se drogue parce qu’on est faible ou que les autres sont faibles.

La campagne publicitaire étant devenue le degré zéro de l’activité politique, regardons donc un des clips de cette nouvelle campagne : on y rencontre Michaël, un jeune homme qui, nous dit-on, prend de la cocaïne.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Mais pourquoi Michaël prend-t-il de la cocaïne si on s’en tient à cette vidéo ? On ne le sait pas. De fait, cela semble du point de vue des concepteurs de cette campagne assez hors sujet. Ce qui compte, c’est que si « ceux qui l’aiment » lui avaient dit de ne pas le faire, il ne l’aurait pas fait. Des motivations de Michaël lorsqu’il a pris de la drogue pour la première fois, de ses motivations pour continuer, du fait qu’un jeune lycéen soit en mesure de s’en procurer ou encore de sa situation économique, psychologique ou sociale, on ne saura rien, car cela ne semble pas tellement compter. « Quand on veut, on peut » : ne pas se droguer, c’est un effort de la volonté, si ce n’est de la sienne, au moins de celle de ses parents ou de sa copine.

La drogue : un « enjeu collectif » réduit à une « épreuve personnelle »

De fait, cela ne compterait pas si Michaël était le seul jeune à prendre de la cocaïne. On pourrait alors voir cela comme une simple « épreuve personnelle ». Mais lorsqu’il s’agit d’une pratique plus nettement répandue dans la population des jeunes et des moins jeunes, il est difficile de continuer à penser qu’il n’y a là qu’un écart personnel : la drogue devient, à ce niveau, un « enjeu collectif de structure sociale » comme le disait Charles Wright Mills dans ce classique des classiques qu’est L’imagination sociologique :

Qu’on songe au chômage. Que, dans une ville de 100 000 habitants, un seul homme soit au chômage, il traverse là une épreuve personnelle ; pour le soulager, il faut tenir compte de son caractère, de ce qu’il sait faire et des occasions qui peuvent se présenter. Mais lorsque, dans une nation de 50 millions de salariés, 15 millions d’hommes sont au chômage, on a affaire à un enjeu, et ce n’est pas du hasard qu’on attendre une solution. La structure même du hasard est détruite. L’énoncé correct du problème réclame, au même titre que ses solutions possibles, l’examen préalable des institutions économico-politiques de la société, et non plus des seules situations et des caractères propres à une diaspora d’individus.

L’imagination sociologique, c’est précisément de prendre garde à la façon dont les biographies, les trajectoires individuelles, celle de Michaël qui l’ont conduites à la drogue, s’inscrivent dans des enjeux collectifs, dans une histoire plus large. C’est faire le lien constant, et de diverses façons, entre ce qui se passe à un niveau individuel, ou micro, et ce qui se passe à un niveau collectif, ou macro. C’est dans cette tension constante que réside précisément la sociologie. C’est :

L’idée que l’individu ne peut penser sa propre expérience et prendre la mesure de son destin qu’en se situant dans sa période.

Certains seront sans doute tentés de penser qu’il n’y a là qu’une manière à bon compte de trouver des excuses aux gens : se réclamant le plus souvent du libéralisme, ils diront que cette imagination nie la rationalité des acteurs en faisant d’eux de simples jouets des forces sociales. Ils ont tort. Si on regarde la publicité ci-dessus, on se rend compte que l’éthique qu’elle propose, cette éthique de la responsabilité individuelle, du « quand on veut, on peut », fait également l’économie de la rationalité et de la logique propre des individus. Michaël n’a-t-il pas de « bonnes raisons » de se droguer ? Sa prise de cocaïne n’a-t-elle pas quelque chose de rationnel ? Visiblement, c’est également hors sujet. On ne s’adresse pas à l’intelligence des personnes, mais on les suppose faibles et sans volonté : le drogué a forcément un manque, ce n’est pas un individu solide. C’est dommage car savoir pourquoi Michaël se drogue permettrait peut-être de comprendre pourquoi la récurrence de ce type de campagne n’a jamais été suivi d’effets réels…

La sanction individuelle pour toute forme d’action

Mais cette éthique de la responsabilité individuelle, qui fait reposer les problèmes collectifs sur un simple défaut de volonté de la part des individus, est puissante : sa simplicité fait qu’elle se glisse partout. On la retrouve dans cette publicité britannique (signalée en son temps par Sociological Images, mais je ne parviens pas à retrouver la note) pour lutter contre l’obésité infantile, où la responsabilité des mères vient effacer toute la structure sociale qui propose et impose aux enfants des produits gras et sucrés :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Là encore, on ne dit rien de la motivation des parents (d’ailleurs ramenés ici à la seule mère, parce que, comme on peut le supposer, nourrir les gosses, c’est un truc de gonzesse…), dont le souci peut être, simplement, de faire plaisir à un enfant qui réclame ce qu’on lui dit être pour lui. Des parents qui se coltinent entre les contradictions inhérentes à l’exercice d’une autorité parentale non autoritaire où l’on devrait aimer ses enfants tout en les privant.

Cela me rappelle cette conversation récurrente dans de nombreuses salles des profs : comment se fait-il que des élèves dont on sait que les parents ne roulent pas sur l’or soient dotés de rutilants téléphones portables et de vêtements de marque aux prix parfois exorbitants ? Et chacun de mettre en cause la mauvaise gestion des parents. Ce qui revient le plus souvent, si on pousse l’argument à bout, à dire que les pauvres sont pauvres parce qu’ils ne savent pas gérer leur argent : une explication explicitement en vogue aux Etats-Unis, comme en témoignent des débats récents sur le Montclair Socioblog. Qui se dira que, lorsque sa situation économique n’est guère brillante, accepter quelques sacrifices pour donner à son enfant ce dont il rêve – parce que comme tous il fait partie d’une société où la possession de ces choses est quelque peu valorisée… – n’est pas si irrationnel ? Que c’est là un moyen de montrer à ses enfants qu’on les aime ou de leur éviter de ressentir un stigmate trop fort lié à la pauvreté… Bref que c’est plus parce que les parents se soucient de leurs enfants et répondent à des normes dominantes que parce qu’ils ne savent pas gérer leur maison.

Mais l’éthique de la responsabilité individuelle nous cache tout cela. Elle nous fait préférer le « quand on veut on peut ». Le problème réside tout entier dans la célèbre remarque de Maslow : si le seul outil dont vous disposez est un marteau, alors tous les problèmes ont l’air d’être des clous. De même, si la seule explication dont vous disposez est la responsabilité individuelle, alors tout peut se régler par la sanction individuelle. Et on abandonne toutes les autres formes d’action, comme par exemple améliorer la situation des jeunes pour qu’ils aient moins de tentation de se droguer. L’imagination sociologique pourrait venir au secours de l’imagination politique. C’est pas gagné.

Billet initialement publié sur Une heure de peine sous le titre L’éternel retour de la responsabilité individuelle.

Photo FlickR CC Cher Amio ; Andres Rodriguez.

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ElBlondo, jeune internaute (sans amis) en quête d’un iPod http://owni.fr/2010/07/11/eric-jeune-internaute-sans-amis/ http://owni.fr/2010/07/11/eric-jeune-internaute-sans-amis/#comments Sun, 11 Jul 2010 12:11:31 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=21692 Encore un discours de plus sur l’Internet fondé sur des a priori. En l’occurrence, les liens tissés via les réseaux sociaux ne sont pas de vraies relations et cachent une solitude bien réelle, sous-entendu la superficialité n’existe pas déjà IRL. C’est ce message que Net Écoute, “une ligne d’assistance dédiées aux jeunes sur toutes les problématiques liées à l’Internet, le téléphone mobile et les jeux vidéo” fait passer dans un spot diffusé justement sur les chaînes de partage (allons chercher le djeune délaissé sur ses terres d’errance). Cet objet non identifié a gagné un concours organisé à l’attention des jeunes via DailyMotion. Une soixantaine a répondu présent et c’est un nommé Quentin qui a remporté la palme enfin une caméra semi professionnelle pour ce chef d’œuvre de communication. On peut aussi voir la chose à la télévision. Le site est soutenu par de nombreux partenaires “sérieux” mais malheureusement, un logo du ministère ou de l’Union européenne ne garantit pas des contenus de qualité. Dans ce nouvel exemple malheureux, on ne dit pas que les jeunes n’utilisent majoritairement pas Internet pour se faire de nouveaux amis mais pour renforcer des relations déjà existantes. La solitude commence dans la cour de récréation…

“Tenez vous prêts, le prochain concours de vidéo net ecoute aura lieu prochainement et ce sera peut être votre film qui sera diffusé à la TV”, peut-on lire sur leur site. Tiens, si OWNI envoyait sa propal ? /-)

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Dégoté grâce à l’œil sagace de Maître Eolas.

Mise à jour lundi 12 juillet : Quentin, qui a réalisé la vidéo, a lu notre billet et réagit. Voilà résolue l’énigme : comment un “vrai” jeune avait-il pu se caricaturer ? Réponse : pour gagner un iPod. Le garçon, loin d’être un demeuré, a juste utilisé Net Écoute, leurs attentes en terme de discours sur l’Internet, pour tenter de remporter l’objet convoité. Futé et non dénué d’un fort sens de l’humour :)

“Wow un article (un peu) sur moi ! ça fait bizarre.  Je pense que je peux quand même m’expliquer là dessus :

Alors oui mon idée de vidéo n’est pas géniale du tout, ça peut être cliché… mais à la base je l’ai fait pour un concours et jamais je n’aurais imaginé qu’elle passerait à la télé. D’ailleurs je visais la 2ème place pour avoir un Ipod Touch (ba oui j’en ai pas =/)

Ensuite si j’ai choisi cette idée, c’était tout simplement pour me démarquer des autres candidats qui avaient tous choisis le même thème : sur internet y a des pédophiles !

Donc c’était plus une “super stratégie méga intelligente” pour me démarquer et avoir une chance de remporter l’Ipod !

Je sais que ce que je viens de dire fait super matérialiste, mais bon quand on peut avoir un truc gratuitement on va pas dire non =)

Je tiens aussi à préciser qu’à la base j’avais plutôt fait cette vidéo avec humour et ironie, d’où le “sans amis” mais elle n’a pas été perçue comme ça…

Mais bon je ne vais pas m’en plaindre. Ha oui au fait cette vidéo est une 2ème version à leur demande car dans l’originale je cite des marques (et on voit bien que quand je fais le petit discours, je ne suis pas sérieux) Je l’ai cependant rendu plus “crédible” pour l’association lors de la 2ème version.

Je comprends parfaitement que la vidéo fasse rire, grincer, peut-être même déprimer qui sait ? Mais bon lors d’un entretien pour la formation que je voulais intégrer (j’ai été pris héhé) j’ai marqué quelques points avec ce concours, mes parents sont contents car ils m’ont vu à la télé, et moi ba j’ai une caméra toute neuve =) Donc pour moi ce n’est que du bonus.

Par contre je suis désolé de vous avoir infligé cette souffrance à la télévision =/ C’était pas mon but je vous le promet !

Mais comme on dit : Si il est blond, c’est pas sa faute !”

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Télécharger tue http://owni.fr/2010/06/16/telecharger-tue/ http://owni.fr/2010/06/16/telecharger-tue/#comments Wed, 16 Jun 2010 08:59:49 +0000 Astrid Girardeau http://owni.fr/?p=18830 Télécharger tue les artistes.

C’est le message d’FreeMusicHK, une nouvelle campagne anti-piratage lancée par RE: SPECT, une publication chinoise sur la musique. Un site, parodiant une plate-forme de téléchargement (illégal), propose une petite sélection d’albums (Madonna, Amy Winehouse, Moby, Blur, etc.).

Sur la page descriptive d’un album, s’affiche sa pochette ornée d’un bouton “Full album download” invitant donc à le télécharger.

En cliquant dessus, l’artiste se reçoit au choix une balle, une grenade ou des explosifs. Au bout de plusieurs clics, apparaît le message : “Let the music live on. Stop illegal downloads”.

En fait, il ne s’agit pas des vraies pochettes, ni des vrais artistes. Ce sont soit des animations, soit des sosies animés. Ce qui fait dire, ironiquement, à TorrentFreak que c’est sûrement pour des questions de droit d’auteur :”on doute que Moby ait signé“.

Et TorrentFreak de souligner que :

Pour une campagne anti-piratage, celle-ci est plutôt bonne. Mais, pour autant, cela va t-il empêcher les gens de télécharger ? Sans doute pas.

En revanche, si l’on veut voir un sosie asiatique d’Amy Winehouse prendre peur quand on lui clique dessus ou Moby qui disparaît inopinément, c’est tout à fait réussi:

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Internet et les jeunes: désolé, ça se passe plutôt bien http://owni.fr/2010/04/24/internet-et-les-jeunes-desole-ca-se-passe-plutot-bien/ http://owni.fr/2010/04/24/internet-et-les-jeunes-desole-ca-se-passe-plutot-bien/#comments Sat, 24 Apr 2010 16:47:20 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=12730 Bonne nouvelle pour vos enfants : Internet est moins dangereux que la vie puisque seulement 82,5% des jeunes y ont fait une expérience “malheureuse”, contre 100% dans la vie réelle, de la souffrance à la naissance lorsque l’air pénètre les poumons en passant par les griffes aux genoux et autres garçons expurgeant leur trop-plein d’hormones d’une main aux fesses. C’est la conclusion d’une étude récente menée par Fréquence écoles, association d’éducation des jeunes aux médias, intitulée “Comprendre le comportement des enfants et adolescents sur Internet pour les protéger des dangers.”
Plus sérieusement -quoique…-, l’enquête en question, offre une vision dédramatisante sur le sujet, soulignant l’inadéquation entre la prévention et la réalité des risques.

Il faut dire que les auteurs, Barbara Fontar et Elodie Kredens, sont parties sans a priori quant à la définition du terme danger et sur la hiérarchie, une méthodologie appréciable en ces temps de lutte anti-Hadopi et de reportages racoleurs.

“Il est difficile d’appréhender [la notion de danger] sans être tenté de lui appliquer des principes normatifs. Si le danger est une situation dans laquelle un individu est menacé sur le plan physique, psychologique ou social, sa définition, sa perception et son expérimentation restent pour partie subjectives.”

“Afin de minimiser les biais et pour ne pas influencer les jeunes dans leurs réponses nous avons pris soin de ne jamais suggérer les dangers potentiels d’Internet. En entretien, nous avons fait en sorte que les jeunes initient eux mêmes la thématique des risques ou bien nous avons l’avons abordée sans pour autant orienter leurs visions des dangers. Cette précaution s’est traduite dans la phase qualitative par le choix d’une question ouverte.”

Au terme de leur enquête, il ressort que les jeunes n’ont globalement pas un comportement à risques sur le web. Loin de l’image de l’ado naïf errant sans but, facile proie du premier cyber-pervers venu, ils ont ainsi un usage extrêmement bordé du Net :

Chez les jeunes, les « aventuriers de la toile » sont plutôt rares comparés aux « voyageurs organisés ». Une majorité a d’ailleurs balisé ses sentiers en utilisant des moteurs de recherche, en allant toujours sur les mêmes sites et en créant des « favoris ». Certains ont même des rituels de navigation et surfent selon un ordre déterminé.

En outre, Internet est avant tout pour eux un outil de loisir et de socialisation avec leurs pairs. 9 sur 10 regardent des vidéos (films, clips) et écoutent de la musique, 8 sur 10 s’en servent pour jouer. Sur le podium de leur sites favoris, on retrouve Facebook, Youtube et MSN. Enfin, 3 sur 4 utilisent Internet pour discuter et rester en lien avec leur cercle de connaissances :

La grande majorité des jeunes n’utilise pas Internet pour élargir son réseau relationnel. On constate que la plupart des inconnus rencontrés sur le Net le restent. Si 1/3 du panel a déjà noué des relations amicales avec des gens sur Internet, lorsque les jeunes entament des relations, elles sont éphémères et peu approfondies. Si quelques cas d’amitiés nous sont rapportés lors des entretiens, ils débouchent très exceptionnellement sur des appels téléphoniques ou sur une rencontre. Ce sont donc plus de deux jeunes sur trois qui s’abstiennent de nouer des contacts avec des personnes inconnues.

En clair, ils chattent chez eux avec leurs potes de la cour ou ils écoutent de la musique (voire les deux en même temps, petits malins).

Si inconnu il y a, il faut le relativiser :

Derrière chaque inconnu sur Internet ne se cache pas un/une pervers(e). L’inconnu est aussi celui qui répond à des questions sur un forum, qui laisse des commentaires sur un blog, qui devient un partenaire de jeu le temps d’une partie et qui s’en retourne sans que des liens se soient créés pour autant.

Ils font également montre de prudence :

S’ils ont été contactés par des gens qu’ils ne connaissent pas, la majorité des jeunes, quel que soit leur âge, n’accepte pas de discuter avec eux. Ils refusent ainsi d’ajouter des contacts inconnus sur MSN ou Facebook, ils déclinent des invitations sur les jeux en ligne pour devenir partenaire temporaire ou membre d’une guilde et n’ouvrent pas les mails d’incon- nus. Rappelons qu’un tiers des jeunes a noué des relations amicales avec des gens sur Internet. En outre, c’est moins d’un jeune sur trois qui discute en ligne avec des inconnus.

De même, les forums ne les intéressent pas puisque seulement 8% y naviguent souvent et plus de la moitié (54,8%) n’y met jamais la souris.

Sur le décalage entre les représentations des jeunes comme des parents et le réel expérimenté, les chiffres sont éloquents. Le danger n’est pas du tout là où ils pensent :

Ainsi, alors que 44,9% d’entre eux considèrent la mauvaise rencontre comme le danger n°1, ce sont 7,7% d’entre eux qui se sont vus fixer un rendez-vous par un inconnu. Une question se pose sur la sensibilisation aux risques : sans remettre en cause le potentiel de gravité de tels faits, l’abondance des informations sur les mauvaises rencontres ne conduit- elle pas à rendre moins visibles d’autres expériences fâcheuses plus fréquemment rencontrées par les jeunes ?

La pédopornographie, cet épouvantail si commode, affiche un misérable 1,4%, un chiffre logique. Et en tête, on retrouve… le virus et/ou piratage, avec 36, 4%, talonnée par la pornographie (un chiffre à relativiser toutefois car les jeunes seraient moins enclins à confier avoir vu du porn.)

Certes, il est déplaisant de voir un méchant virus flinguer votre ordi, voir surgir une image de fellation peut aisément choquer, mais c’est bien moins traumatisant et dangereux que de se retrouver avec un vilain monsieur de vingt ans votre aîné dans une chambre glauque d’hôtel. En revanche, c’est moins vendeur médiatiquement.

Si les reportages racoleurs ont peut-être eu un effet positif, notent les auteurs, c’est d’inciter à plus de prudence. À défaut d’honorer la profession de journaliste par leur déontologie.

Si la plupart des jeunes ont fourni des données personnelles, c’est parce qu’il est difficile dans l’état actuel du web de faire autrement, contextualisent les auteurs. Et encore, certains font preuve de prudence, parmi les plus âgés, en en donnant de fausses. Guillaume (16 ans) explique ainsi : « et puis quand t’as un formulaire à remplir sur Internet je mets jamais mon nom. Je mets ” Durand”, “Dupond”. L’adresse, je mets une connerie. » Au demeurant, ce type d’attitude n’a rien d’étonnant.

Donc Dieu merci, la situation n’est pas catastrophique, loin de là. Loin de nous l’idée de nier l’existence de  risques, simplement, ils appellent prévention sans diabolisation. La demande est bien réelle, de la part des jeunes mais aussi bien sûr des parents qui ont une image réductrice du grand méchant Net, “prenant les symptômes pour des causes”. Plus de quatre jeunes sur cinq pensent que la prévention est importante. Leurs inquiétudes vont à la mauvaise rencontre (44,9%), puis aux virus, spams… (33,6%) et enfin aux contenus violents ou choquants (14,8%)

En conclusion, les auteurs de l’étude appellent à reformuler la prévention aux dangers de l’Internet en partant de ce portrait plus réaliste du comportement de nos enfants. Malheureusement, l’étude laisse sur sa faim concernant la suite à donner, égrenant juste quelques pistes à la fin. On va essayer d’y remédier ;-)

Télécharger le rapport complet

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Photo CC Flickr aldoaldoz

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Owni police secours: phase opérative http://owni.fr/2010/04/14/owni-police-secours-phase-operative/ http://owni.fr/2010/04/14/owni-police-secours-phase-operative/#comments Wed, 14 Apr 2010 12:53:51 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=11518 Un blog et un wiki pour aider à l’élaboration de la plaquette de prévention sur Internet destinée aux élèves : voilà ce qu’il est ressorti de l’échange de visu avec le capitaine Olivier Guerry, qui chapeaute toutes les missions prévention et communication de Paris.

Une rencontre IRL fructueuse. Image CC Flickr @cdharrison

Trêve de critique, passons à la collaboration : suite à la proposition d’Olivier Guerry, chef de l’Unité de Prévention de la Direction  Territoriale  de la Sécurité de Proximité de Paris (ouf) de travailler avec Owni pour élaborer le contenu d’une mallette pédagogique sur Internet, nous nous sommes rencontrés. L’occasion déjà de replacer le contexte dans lequel a été conçu le document initialement incriminé, un texte caricatural sur “les dangers de l’Internet”.

Polyvalence et manque de temps

Temps de formation sur les stupéfiants et la violence : quatre semaines. Internet : une journée sur Internet et ses éventuels dangers en général par une société extérieure (en 2006 !) + une journée sur la cyberpédopornographie par la brigade des mineurs. L’association Jeunes violences écoute organise aussi des rencontres auxquelles les policiers des unités prévention et communication peuvent participer.

En outre, ils sont amenés à intervenir aussi bien à propos des violences envers les personnes âgées que sur le tabac. Si l’on ajoute des effectifs qui n’ont rien de luxueux, un à quatre policiers par arrondissement, on comprend que le contexte n’est pas forcément idéal pour créer des contenus toujours pertinents. C’est bien pour cela que les missions s’appuient sur des partenaires extérieurs qui les aident à concevoir leurs documents. Problème, les interlocuteurs légitimes sur Internet ne sont pas légions. Le bât blesse une première fois.

“Proposer un discours éducatif et non alarmiste” Olivier Guerry

C’est là qu’Owni intervient, tatatam, afin d’aider à la conception de la mallette pédagogique sur Internet, prévu pour septembre prochain. Nous sommes partis sur l’idée d’un blog et d’un wiki, ouverts à tous : les policiers, des professeurs, la brigade des mineurs et bien sûr la communauté d’Owni, entre autres.

Le cadre défini par Olivier Guerry : “proposer un discours éducatif et non alarmiste, percutant et adapté. il faut aussi créer du débat pour que les adolescents prennent conscience de leur image et de leur responsabilité. Les enfants doivent agir librement en connaissance de cause.” Le public visé, ce sont les élèves mais aussi leur proche entourage, parents mais aussi grand frère, tatie…

Les différents outils de la mallette sont déjà calés : un clip, réalisé par une société de production extérieure, conjointement avec la brigade des mineurs, une plaquette (a priori format A4 plié en trois, texte et dessins), tous deux téléchargeables et des chroniques audio disponibles en podcast.

Les sites institutionnels -préfecture, rectorat, diocèse -établissements privés oblige- ainsi que celui de Jeunes violence écoute relaieront ses informations. C’est là que le bât blesse une seconde fois. Le jeune ne va pas sur le site de la préfecture, il préfère Facebook, et on le comprend. La collaboration avec Owni sera aussi un moyen de faire circuler l’information dans d’autres circuits moins web 1.0.

Pour contribuer, c’est ici : le blog Pedagogeek et le wiki

La genèse du projet de collaboration : Dangers du Net : la curieuse leçon en uniforme de la police ; #DangersduNet: Owni, police secours

Photo jdhanckock

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Si tu veux vraiment montrer ton cul sur Facebook… http://owni.fr/2010/04/10/si-tu-veux-vraimment-montrer-ton-cul-sur-facebook/ http://owni.fr/2010/04/10/si-tu-veux-vraimment-montrer-ton-cul-sur-facebook/#comments Sat, 10 Apr 2010 10:31:04 +0000 Sacha Declomesnil http://owni.fr/?p=11953 … fais-le au moins de manière intelligente, en supportant une cause.

C’est ce que propose lassociation canadienne du cancer colorectal avec sa campagne faitesvoirvosfesses.ca

Cliquer ici pour voir la vidéo.


Pas sur que tout le monde cultive vraiment le fantasme de mettre son auguste séant sur Facebook, mais bon… j’avoue aussi que sensibiliser à cette cause n’est peut-être pas évident, et que certains ont atteint des sommets dans le mauvais gout. Au moins ici, on cultive le sens de l’humour, et vu le sujet, c’était pas gagné d’avance…

La campagne a donné lieu au premier mobfesse (ou buttmob) de l’histoire, la première collection de fesses sur Fessebook, ca méritait d’être souligné non? Encore une utilisation de Facebook connect, que les publicitaires commencent à maitriser de plus en plus. Le secteur caritatif n’y échappe pas, et c’est tant mieux. C’est la mouvance du fan-to-fan advertising, qui gagne en popularité (et en efficacité)

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Billet initialement publié sur La fontaine de pierres, blog canadien dédié à la philanthropie 2.0

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