OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Les eurodéputés ont la biométrique http://owni.fr/2012/04/26/les-eurodeputes-ont-la-biometrique/ http://owni.fr/2012/04/26/les-eurodeputes-ont-la-biometrique/#comments Thu, 26 Apr 2012 16:55:56 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=108010

Les passeports biométriques sont-ils efficaces contre la fraude ?“, titrait la semaine passée le service de presse du Parlement européen.

Quatorze eurodéputés ont en effet adressé, en mars et avril dernier, trois questions parlementaires à la Commission européenne. Toutes tendances confondues, libéraux, socialistes, verts et conservateurs, ils se disent “préoccupés” de découvrir qu’”un nombre toujours très élevé de passeports sont falsifiés“. La socialiste Sylvie Guillaume rappelle que l’introduction d’éléments biométriques avait pourtant été adoptée en 2004, en réaction aux attentats du 11 septembre 2001, afin de “permettre d’améliorer la sécurité des documents de voyage” et, plus précisément, de “lutter plus efficacement contre la fraude et la falsification“. Selon l’eurodéputée :

Une enquête récente (parue dans Le Parisien, NDLR) a montré que 10 % des passeports français seraient faux car leur édition s’appuierait sur des documents extrêmement faciles à falsifier, à savoir la copie d’un acte de naissance.

Dans ce contexte, comment continuer à croire aveuglément que la multiplication des données biométriques et autres puces sécurisées protège les citoyens ?” renchérit Sylvie Guillaume dans une tribune publiée sur le Huffington Post, tout en pointant du doigt la responsabilité des lobbies, en s’appuyant notamment sur l’enquête d’OWNI (voir Lobbying pour ficher les bons Français) :

Ceux qui ont objectivement intérêt à cette surenchère, en tous les cas, ce sont les industriels. Fabriquants de scanners corporels, de puces électroniques, entreprises de collecte de données, il ne faut jamais négliger le lobbying des industriels de la sécurité dès qu’on aborde un sujet de ce type, je le vois bien au sein du Parlement européen. Sans surestimer leur influence, ceux-là n’aident pas non plus à mener un débat apaisé.

20% d’empreintes inutilisables

Les eurodéputés rappellent également qu’aux Pays-Bas, une étude menée sur plus de 400 passeports a révélé que les empreintes digitales étaient inutilisables dans plus de 20 % des cas…

Sophia in ‘t Veld, de l’Alliance des démocrates et libéraux pour l’Europe (ADLE) révéla par ailleurs qu’au Pays-Bas, les passeports biométriques avaient été justifiés au motif de la lutte contre la fraude et l’usurpation d’identité, mais que le ministère de l’Intérieur avait toujours refusé de rendre public le nombre de cas recensés, au motif que le chiffre serait «inconnu», «pas public», «confidentiel» ou «secret».

Or, des documents obtenus par l’ONG Privacy First révèlent que les autorités n’ont dénombré que 46 cas d’usurpation en 2008, 33 en 2009 et 21 en 2010, sur une population de 17 millions d’habitants…

Dans une question commune signée par les groupes PPE (démocrates-chrétiens), S&D (socialistes & démocrates), GUE/NGL (anticapitaliste) et du groupe des Verts, les eurodéputés voulaient ainsi savoir si, et comme ils l’avaient réclamé en 2008, des études avaient depuis été menées pour mesurer :

. la fiabilité et l’utilité des empreintes digitales relevées chez les enfants et les adultes

. la fiabilité du processus de collecte des données biométriques

. des lacunes possibles dans les systèmes d’identification

. des disparités existant dans les documents à soumettre et dans la façon de les produire (les “documents sources”).

Dans une autre question un eurodéputé conservateur voulait de son côté savoir si, “par ailleurs, la Commission a réalisé, récemment, une étude du rapport coût/efficacité des systèmes biométriques de seconde génération ? Enfin, la Commission a-t-elle d’autres recommandations pour traiter les cas de perte, de vol ou de falsification des passeports biométriques ?

Ados portugais

Ces questions ont été reposées, et débattues, le 19 avril dernier, au parlement de Strasbourg. Et force est de constater que plusieurs interrogations demeurent…

Sarah Ludford, eurodéputée libérale-démocrate qui s’est beaucoup intéressée à la biométrie, rappelait ainsi qu’aucun système n’est fiable à 100%, et que son efficacité dépend, non seulement de la technologie utilisée, mais également de la compétence (ou de l’incompétence) de ceux qui sont amenés à s’en servir. A l’appui de sa démonstration, elle citait un rapport du Government Accountability Office (GAO, l’organisme d’audit du Congrès américain) qui avait révélé l’existence de vulnérabilités, de logiciels et antivirus non mis à jour, mais également de fonctionnalités de sécurité inutilisées, dans le système de visa électronique :

Je pense que nous ne devons pas, en aucun cas, continuer à prélever, encore et encore, plus de données biométriques, et élargir leurs conditions d’utilisation, tant que nous n’aurons pas obtenu de réponse à toutes ces questions, et tant que la Commission n’aura pas démontré que les empreintes biométriques sont vérifiables, et que leur collecte, et stockage, ne pose pas de problème ni n’entraîne de tels taux d’erreurs, comme on a pu le voir, notamment, avec les empreintes digitales d’enfants ou de personnes âgées.

Pour toute réponse, Cecilia Malmström, au nom de la Commission européenne, expliqua qu’une étude sur la fiabilité de la reconnaissance biométrique sera présentée aux eurodéputés en juin prochain, mais qu’elle ne portera que sur les empreintes digitales d’adolescents portugais de 12 ans, afin de vérifier si, deux ans plus tard, elles sont encore reconnaissables.

Cecilia Malmström s’est justifiée en expliquant que si l’intégration d’éléments biométriques dans les passeports avaient été décidée au niveau européen en 2004, aucune étude , portant sur l’utilité et l’efficacité de la reconnaissance biométrique en général, pas plus que sur le cas particulier des empreintes digitales abimées des personnes âgées, n’avait jamais à ce jour été envisagée :

Cela dit, si c’est un souhait très fort de la part du Parlement européen, nous pourrions bien évidemment reconsidérer la question sérieusement.

Or, et comme OWNI avait eu l’occasion de le rappeler, la reconnaissance biométrique, qui relève plus de la probabilité statistique que de la preuve scientifique, est loin d’être aussi fiable que cela, et l’on a d’ores et déjà répertorié plusieurs cas de gens, inculpés à tort après que des “experts” aient identifié la trace de leurs empreintes digitales sur des scènes de crime où ils n’avaient jamais été, tout comme on a également démontré, à de nombreuses reprises, qu’il était possible de tromper les dispositifs de reconnaissance biométrique…


Couv : Marion Boucharlat
Photo de Sochacki/Flickr (CC-bysa) remixée par Ophelia Noor pour Owni

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L’Europe délaisse la neutralité du Net http://owni.fr/2012/04/19/leurope-delaisse-la-neutralite-du-net/ http://owni.fr/2012/04/19/leurope-delaisse-la-neutralite-du-net/#comments Thu, 19 Apr 2012 14:01:10 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=106842

Un subtil travail de définition. À l’occasion de la World Wide Web Conference qui se tient actuellement à Lyon, la commissaire européenne en charge des affaires numériques Neelie Kroes a livré ce matin sa vision d’un Internet “ouvert”. Ou plus exactement, les multiples variantes de ce qu’elle entend par “être ouvert en ligne”, pour reprendre l’intitulé de son discours. Résultat : l’ouverture du réseau doit certes être préservée, mais à certaines conditions. Qu’elle fixe.

L’ouverture ? C’est subtil

Après avoir rappelé son attachement à l’ouverture d’Internet, en déclarant dès la première phrase du discours qu’il s’agit “de la meilleure chose” en matière de réseau, Neelie Kroes vient rapidement modérer son propos :

L’ouverture est aussi complexe car sa signification est parfois peu claire.

Car si les bénéfices d’un Net ouvert font consensus dans certains cas, dans d’autres, plus clivants, ils sont plus contestables. Ou tout du moins, sujets à caution de la commissaire européenne. L’Open Data, ou les révolutions arabes, référence désormais incontournable pour tout politique souhaitant aborder publiquement la question numérique, figurent ainsi clairement dans la case “l’ouverture c’est chouette” de Neelie Kroes. Sans qu’un problème de définition ne se pose : dans ces cas-là, “les bénéfices de l’ouverture sont clairs.”

Dans d’autres, ceux qui sentent généralement le soufre, ce“n’est pas si simple”. Ainsi les questions de propriété intellectuelle, de sécurité ou d’accès à Internet. Sur tout ça, il s’agit subitement :

[De devoir] être clairs sur ce que nous entendons par ouverture.

Pour Neelie Kroes, l’ouverture mêlée aux droits d’auteur revient à s’ouvrir “à différents business models”. En clair, “ne pas offrir quelque chose pour rien”. Et si la commissaire européenne concède que certains créateurs veulent être reconnus d’une autre façon”, elle affirme aussi que “parfois, la meilleure façon pour les créateurs de tirer profit [de leur travail] est d’en faire payer l’accès.” Et de poursuivre :

Ce n’est pas une limitation de la liberté ou de l’ouverture, pas plus que ne l’est le fait de payer pour un journal.

Quand elle aborde les questions de sécurité, citant par exemple la protections des enfants sur Internet, elle définit l’ouverture en ces termes : “[elle] ne signifie pas l’anarchie” ni ne s’impose “au détriment de la vie privée ou de la sécurité”. Fondamentale en somme, mais placée au cœur d’une échelle de valeurs stricte.

Internet ? Aux usagers de décider

La neutralité déchire l’Europe

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Le Parlement européen appelle la Commission à agir pour protéger la neutralité des réseaux. Une pression politique sur ...

Ça se corse davantage avec la fourniture de l’accès à Internet. Pour Neelie Kroes, la notion d’ouverture est ici particulièrement “subtile”. Il est vrai qu’en la matière, la position de la commissaire est branlante. Et ce n’est pas nouveau. D’abord habituée à souffler le chaud et le froid, la commissaire a progressivement adopté les éléments de langage des opérateurs (début octobre, ou bien encore en juillet dernier) pour les questions de neutralité des réseaux – vite remplacées par la notion d’“ouverture”. Elle va ici plus loin,  se disant “engagée à garantir la neutralité du Net” d’un côté et refusant de l’autre à assimiler ce combat au “bannissement de toutes les offres ciblées ou limitées”. L’ouverture consistant ici pour elle davantage à “être transparent” sur ces offres, et à “laisser aux consommateurs la possibilité de choisir librement et aisément s’ils les souhaitent ou non”.

Pour Neelie Kroes, ce qu’est et doit être Internet ne sera pas fixée et protégé a priori : les usages sont préférés à une loi. Aux consommateur de choisir ! Quitte à ce qu’ils limitent leur propre accès à Internet. Sur ce point, la commissaire se veut d’abord confiante, expliquant que les “environnements isolés” ont “souvent échoué” sur Internet. A ce titre, elle cite l’exemple des ” ‘walled gardens‘ bâtis par les fournisseurs d’accès à Internet dans les années 1990″. Une expression qui renvoie aujourd’hui fréquemment aux empires construits et contrôlés par Apple, ou Facebook. Et qui sont tout sauf désuets ou effondrés.

La commissaire pousse la logique plus loin encore, en expliquant qu’en “pratique, il y a plein de moyen de ‘limiter’ l’accès à Internet que la plupart d’entre nous sont prêts à accepter, et même à utiliser.” En exemple : l’existence de forfaits Internet plafonnés à un certain volume de données par mois et que “beaucoup d’entre nous choisissent volontiers.” Et d’enfoncer le clou :

Et bien très bien. C’est loin d’être de la censure. Si on a seulement besoin de consulter occasionnellement les e-mails en 3G et que quelqu’un est prêt à vous offrir ce service – pourquoi devrait-on subventionner ceux qui consomment des films ?

Une impression de déjà vu ? C’est précisément l’argumentaire déployée l’été dernier en France, à la suite d’un papier d’OWNI sur la fin de l’Internet illimité. Les opérateurs expliquant progressivement qu’il n’était pas normal que tout le monde paye pour les “net-goinfres”, expression sympathique visant les consommateurs de services en ligne gourmands en bande passante (streaming vidéo, jeux vidéo en ligne,… ).

La fin de l’Internet illimité

La fin de l’Internet illimité

Des opérateurs veulent mettre un terme aux forfaits Internet illimités dans les foyers français. Un document de la ...

Si le plafonnement des forfaits existe depuis belle lurette sur mobile, dont le réseau est techniquement limité par ses capacités de transport, il n’existe pas en France sur le fixe – mais on peut le trouver ailleurs, comme au Royaume-Uni. Dans ses déclarations, Neelie Kroes ouvre la voie à l’instauration de ces pratiques sur tout Internet – seul son exemple ne se réfère explicitement qu’au marché mobile. Si les utilisateurs le souhaitent, et si les opérateurs s’alignent, l’exception française de l’illimité risque de sauter.

Il en va de même pour le mobile, dont l’accès à Internet est déjà plafonné à un certain volume d’octets. Et réservé à certains pans de l’Internet : le peer-to-peer ou la voix sur IP (service tel que Skype) en étant par exemple exclus. Neelie Kroes a beau rapidement évoquer les travaux en cours du Berec, le régulateur européen des télécoms, sur les pratiques des opérateurs visant à restreindre l’accès à Internet des usagers, elle ne cherche pas à les limiter. L’idée est que les consommateurs puissent “choisir en toute transparence le service qui leur va, accès à un Internet complet compris s’ils le souhaitent.”

Et après tout, s’ils ne le souhaitent pas, l’accès à Internet pourra progressivement se resserrer. Autour de forfaits allégés, proposant uniquement des services populaires : Facebook, Twitter, YouTube,… Là où le bât blesse, c’est que les attentes des consommateurs se conforment aussi à ce qui leur est proposé : ils piochent dans ce qu’on leur offre. Sans forcément porter leur choix en étendard : en France, l’enthousiasme engrangé par l’arrivée de Free Mobile en est la preuve. Or ce sont les opérateurs qui façonnent l’offre commerciale. Une responsabilité qui engage les contours même d’Internet.


CC FLickR ter bug

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Les torts de Google redressés http://owni.fr/2012/03/21/les-torts-de-google-redresses/ http://owni.fr/2012/03/21/les-torts-de-google-redresses/#comments Tue, 20 Mar 2012 23:25:17 +0000 Rodolphe Baron http://owni.fr/?p=102715

La nouvelle est arrivée mardi en début d’après-midi, Google France tombe sous le coup d’une procédure de redressement fiscal pour un montant d’environ 100 millions d’euros. En cause, une partie du dispositif irlandais de défiscalisation par la firme, qu’OWNI avait décrit au mois d’avril 2011, et qui pourrait lui avoir permis d’échapper à l’impôt sur les sociétés ainsi qu’à la TVA entre 2008 et 2010.

Les îles Bermudes, la planque à billets de Google

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Nous avons recueilli les procès-verbaux des sociétés de Google en Irlande, utilisées pour expédier ses bénéfices vers ...

Cette grosse punition intervient au lendemain de la révélation par le site de l’hebdomadaire L’Express d’une descente de la Direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF) et des Douanes au siège parisien de Google, le 30 juin 2011. Lors de la perquisition, de nombreux “mails, factures et autres contrats” ont été saisis puis conservés comme pièces à conviction pour évaluer le montant de l’impayé. Et déterminer l’origine des opérations menées en France auprès des clients et des fournisseurs de Google.

En d’autres termes, il s’agit d’établir si la facturation des achats de liens sponsorisés peut être légalement établie au siège social irlandais de la firme. C’est de l’évasion fiscale si les ordres ont été enregistrés en France. Sur ce point, Bercy émet des réserves quant à la localisation du centre des décisions commerciales de Google qui pourrait avoir réalisé une partie de ses opérations dans l’Hexagone sans s’acquitter du montant de la taxe.

C’est sans doute le fossé abyssal entre le chiffre d’affaires de Google France (68,7 millions d’euros en 2010) avec son cousin du Royaume-Uni (2,5 milliards d’euros), 37 fois plus important, qui a pu mettre la puce à l’oreille de la DNEF. D’autant que la France reste un pays économiquement important pour l’entreprise américaine, qui détenait 95% du marché des liens sponsorisés en 2010 et pour laquelle l’Hexagone constitue encore le quatrième pays en terme d’activité selon L’Express.

La problématique de l’enquête du fisc consiste alors à déterminer juridiquement où se trouve cette localisation. S’il s’avérait que les ordres passés en France ont suivi un “cycle commercial complet” avant d’aller directement dans les caisses de l’Irlande, la justice française redressera les bretelles du moteur de recherche avant de lui vider les poches. Dans le cas contraire, où la procédure resterait tout ce qu’il y a de plus réglementaire, Google ne paierait rien. Le ministère du Budget n’a pas souhaité faire de commentaire au nom du secret fiscal. De son côté, un porte-parole de la firme a déclaré à l’AFP :

Google se conforme aux législations fiscales de tous les pays dans lesquels l’entreprise opère, et nous sommes convaincus d’être en conformité avec la loi française.

Les avocats de l’entreprise ont donc tout intérêt à éviter un redressement fiscal qui, même s’il représente une part pouvant sembler dérisoire au regard du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise (29,32 milliards de dollars en 2010), équivaut tout de même 145% du chiffre d’affaires de Google France. Une condamnation du géant américain serait également synonyme de jurisprudence et ouvrirait la porte à des conséquences pour les autres grandes entreprises du marché notamment Facebook, Apple et Amazon connues elles aussi pour leur politique d’optimisation fiscale européenne. Les conduisant à fonder de multiples structures au Luxembourg.

Cette affaire de redressement intervient seulement quelques jours après la proposition par Nicolas Sarkozy de “taxer les géants du net” et notamment Google qui ne paie que 2,4% d’impôts ses bénéfices en Irlande. Problème, la proposition d’une taxe sur la publicité en ligne a déjà été retoquée à la demande du Conseil National du Numérique (CNN), en juin 2011.

Cette fois, le président-candidat semble décider à imposer les grandes entreprises de l’internet qui devront, s’il est réélu, “s’acquitter d’un impôt représentatif des activités dans notre pays”. Le 15 mars dernier, il déclarait à l’hebdomadaire Le Point:

Il n’est pas admissible qu’ils réalisent un chiffre d’affaires de plusieurs milliards d’euros en France sans contribuer à l’impôt


Photos sous licences Creative Commons par Stuck in Customs [CC-byncsa]

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Fantasmes et corsitude http://owni.fr/2012/03/07/fantasmes-et-corsitude/ http://owni.fr/2012/03/07/fantasmes-et-corsitude/#comments Wed, 07 Mar 2012 17:42:09 +0000 Equipe Véritomètre http://owni.fr/?p=101157 OWNI-i>TÉLÉ, alors que François Bayrou se rapproche de la lanterne rouge (Marine Le Pen). Chaque jour, les data-journalists d'OWNI mesurent la crédibilité des candidats à la présidentielle et établissent leur classement grâce aux bases de données de l'application.]]>

Ce mercredi 7 mars à 18 heures, l’indice de crédibilité du Véritomètre place Eva Joly toujours en tête, bien que sa cote baisse légèrement (de 70,5 % en début de semaine à 68,9 % ce 7 mars) alors que François Bayrou et Marine Le Pen continuent à se disputer la dernière place (retrouvez l’ensemble du classement en bas de cet article).

Au cours des dernières 48 heures, l’équipe du Véritomètre a vérifié 59 citations. Résumé des principaux éléments.

L’Europe fantasmée de Marine Le Pen

Retour au franc, protection aux frontières, non-participation au budget européen : pour justifier son programme protectionniste, Marine Le Pen dresse un portrait peu reluisant de l’Europe.
Ainsi déclarait-elle lors de son passage au Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro :

La zone euro [...] a la croissance la plus faible du monde depuis 10 ans.

Nous sommes [en Europe] en situation de récession économique.

ou encore (étonnamment plus positif) :

Il n’y a pas d’inflation en Europe.

Une analyse que ne confirment guère les données d’Eurostat et la Banque Mondiale.
Si l’on se fie à ces organismes reconnus :
- l’indice des prix à la consommation (qui permet de mesurer l’inflation) a augmenté de 13,48 % dans la zone euro entre 2005 et janvier 2012 ;
- la seule année de “récession économique” connue par l’Union européenne est 2009, depuis le taux de croissance du PIB est positif ;
- si la croissance de la zone euro est relativement faible (entre 0,9 % en 2002 et 1,9 % en 2011), d’autres pays font pire, comme le Japon (0,8 % de croissance en moyenne sur les neuf dernières années).

Pour citer le Front national dans son propre programme : “La réalité ne cesse de s’éloigner de cette Europe rêvée.”

La toute petite Corse d’Eva Joly

Eva Joly s’est lancée, lors de son intervention sur RTL soir lundi 5 mars, dans une comparaison géographiquement audacieuse :

la zone d’exclusion de Fukushima fait trois fois la Corse

Les vérificateurs d’OWNI se sont replongés dans leurs formules mathématiques dûment apprises au collège pour aboutir au calcul suivant.
Selon un rapport de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), le rayon de la zone d’exclusion est fixé à 20 kilomètres. Son aire est donc de 1 256 km2, soit un septième de la surface de l’île de beauté (8 680 km2). Eva Joly ne voit donc qu’un tiers de la Corse.

Jean-Luc Mélenchon conquis par la production

Invité à l’émission de TF1 “Parole de Candidat”, Jean-Luc Mélénchon utilisait l’argumentation suivante pour justifier le “partage des richesses” :

Alors que nous produisons plus que nous n’avons jamais produit de toute notre histoire, nous avons 8 millions de pauvres.

Une telle emphase pouvait rendre la citation suspecte quant à sa véracité : Jean-Luc Mélenchon est pourtant dans le vrai, du moins pour la période de “toute notre histoire” pour laquelle les vérificateurs d’OWNI ont réussi à obtenir des données, c’est-à-dire sur la période 1975-2011 (source Eurostat).
Le montant du Produit intérieur brut de la France en 2011 – 1 949 milliards d’euros – est le plus élevé depuis 1975.

Sur les 8 millions de pauvres, Jean-Luc Mélenchon est également dans le vrai : selon l’Insee, 8,17 millions de Français vivaient sous le seuil de pauvreté en 2009 (dernières données disponibles).

Cliquez sur l'image pour une mise à jour des dernières statistiques


Retrouvez l’ensemble de nos vérifications sur Le Véritomètre OWNI-i>TELE
Illustrations par l’équipe design d’OWNI

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La Grèce achète allemand http://owni.fr/2011/10/28/la-grece-achete-allemand/ http://owni.fr/2011/10/28/la-grece-achete-allemand/#comments Fri, 28 Oct 2011 14:36:54 +0000 Frédéric Therin http://owni.fr/?p=84911 Alors que les ventes d’armes françaises sont en chute libre, enregistrant une baisse de 37% en 2010 pour un montant d’à peine plus de 5 milliards, l’Allemagne exporte les siennes à tout va. Rares sont ceux qui le savent, mais la République fédérale est aujourd’hui le troisième plus important vendeur d’armes au monde derrière les Etats-Unis et la Russie avec une part de marché de 11%.

Ses exportations sur la période comprise entre 2005 et 2009 ont doublé par rapport aux cinq années précédentes, selon une enquête de l’Institut international de recherche pour la paix (Sipri). La réputation des tanks allemands n’est plus à faire. Plus du quart de ses ventes à l’étranger concernent des véhicules blindés. Mais ses sous-marins sont aussi très populaires.

Dessous-de-table

La Grèce a ainsi signé un contrat d’un montant total de 3 milliards d’euros pour fabriquer sous licence quatre submersibles allemands. Cet accord montre d’ailleurs le manque de scrupules des marchands de la mort. Selon le parquet de Munich qui a ouvert une enquête, le groupe basé à Essen, Ferrostaal et la filiale du géant ThyssenKrupp, HDW, aurait versé 83 millions d’euros de dessous-de-table pour remporter cet appel d’offre. Ce cas ne serait pas unique. Athènes avait, en effet, pris l’habitude de dépenser bon an, mal an, 3 à 4 milliards d’euros en achats d’armement.

De 2004 à 2008, près du tiers de ses commandes étaient passées à des entreprises allemandes. Après avoir fermé les yeux pendant des années, la justice grecque a enquêté sur plusieurs affaires impliquant des groupes allemands et elle a vite découvert que des paiements douteux avaient été effectués vers des paradis fiscaux comme Chypre, le Libéria ou l’Autriche.

L’hebdomadaire Spiegel a ainsi révélé qu’un intermédiaire grec aurait reçu 60 millions de dollars à Nevis et dans les îles vierges britanniques pour son travail de “consultant” auprès de Krauss-Maffei Wegmann (KMW) au moment même où la compagnie allemande décrochait à Athènes une commande de 170 tanks pour un montant proche de 1,7 milliard d’euros.

Berlin a aujourd’hui beau jeu de condamner la Grèce et ses dépenses mirobolantes. Mais ses dirigeants politiques se font beaucoup plus discrets quand il s’agit de préciser les noms des entreprises qui ont profité de cette “générosité”. Certaines voix commencent toutefois à s’élever contre ce système pour le moins opaque.

Si le porte-parole social-démocrate pour les questions de défense, Rainer Arnold, estime que la vente d’armes à des membres de l’OTAN n’a “rien de choquant”, il souhaiterait que ces exportations soient davantage contrôlées. La chef de file des Verts, Claudia Roth, voudrait pour sa part que le Parlement ait un droit de regard sur la politique gouvernementale dans ce domaine. Le chef adjoint de Die Linke, Jan van Aken, souhaiterait, lui, interdire purement et simplement les ventes d’armes à l’étranger.


Article initialement publié sur MyEurop sous le titre : “L’Allemagne, un marchand de canons sans scrupules”

Illustrations CC [by-nc-sa] Marion Boucharlat

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Les télécoms gagnent Bruxelles http://owni.fr/2011/10/10/bruxelles-adopte-le-lobby-des-telecoms/ http://owni.fr/2011/10/10/bruxelles-adopte-le-lobby-des-telecoms/#comments Mon, 10 Oct 2011 10:20:25 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=82573
Entre Neelie Kroes et les opérateurs, c’est décidément le grand amour. La commissaire européenne en charge de la “société numérique” a réaffirmé son attachement aux idées des industriels des télécoms, lors d’une rencontre entre professionnels, le 3 octobre à Bruxelles.

Sur la fin de l’illimité ou les infrastructures, en particulier la fibre optique, Neelie Kroes s’est montrée très favorable aux “opérateurs en place”. Ultime témoignage de la victoire du lobby des télécoms à Bruxelles, comme OWNI le signalait en juillet dernier.

L’illimité, meurtrier de l’innovation

L’offensive a été particulièrement dure lorsque la commissaire européenne a évoqué, en fin de discours, la préservation d’un “Internet ouvert” – et non d’un Internet “neutre”, qualificatif évacué depuis longtemps des discours au profit du vocable qui préserve le mieux les intérêts industriels. Un “Internet ouvert” dont Kroes a d’abord rappelé l’“importance”, avant de s’attaquer aux initiatives un peu trop citoyennes à son goût.

Tels les Pays-Bas. En inscrivant le principe de neutralité des réseaux dans leur loi, les Néerlandais ont en effet agacé la commissaire européenne, qui leur reproche “d’avancer unilatéralement sur ce sujet”. Et de rajouter, cinglante :

Nous devons agir à partir de faits, et non dans l’émotion; agir rapidement et sans réflexion peut être contre-productif.

Exemple de décisions rapides, irréfléchies et contre-productives : la conservation des forfaits illimités. Neelie Kroes ajoute sa voix au débat lancé en France par OWNI en déclarant :

Exiger des opérateurs qu’ils fournissent uniquement du “full Internet” pourrait tuer de nouvelles offres innovantes.

“Vous connaissez ma philosophie, lance Neelie Kroes, la meilleure façon de fournir un Internet ouvert est au travers de marchés compétitifs”.

Le nœud gordien de la fibre

Ingrats, les opérateurs ont pourtant trouvé à redire. Sur l’épineuse question des infrastructures et du déploiement de la fibre optique en Europe, ils n’ont pas été pleinement satisfaits par la position de la commissaire, certains la jugeant même de “tout simplement folle”.

Neely Kroes

Neelie Kroes a en effet remarqué la réticence des opérateurs à se lancer dans la fibre, alors même que le cuivre, vecteur de l’ADSL, rencontre encore aujourd’hui un franc succès.

Malheureusement, nous le constatons, pour le moment, les compagnies de télécommunication hésitent à engager des fonds significatifs pour le déploiement de la fibre.

Une remarque accompagnée d’une proposition très commentée par la presse spécialisée : baisser le prix d’accès au réseau ADSL, afin d’inciter les opérateurs à basculer sur la fibre. Présentée comme une “attaque” contre la rente qu’ils entretiennent grâce aux revenus du cuivre, le tableau est pourtant moins rose qu’il n’y paraît. Car si la vice-présidente de la Commission européenne a effectivement évoqué l’éventualité d’une baisse de l’accès au haut débit, celle-ci est bordée d’un ensemble de conditions.

Le premier scénario envisagé par Neelie Kroes aborde certes une “baisse du prix d’accès aux réseaux de cuivre mais celle-ci se ferait “graduellement” et “après un certain temps”. Il se verrait complété d’une seconde approche, qui préserverait les opérateurs qui se montrent conciliants en investissant dans la fibre.

Si le mécanisme est incitatif, il reste néanmoins mesuré, la commissaire européenne soufflant surtout le chaud et le froid. Dans ce même discours, elle affirmait aussi :

J’ai l’impression qu’en l’état, il serait en effet difficile de déployer de nouveaux réseaux fibre compétitifs en parallèle de réseaux de cuivre bon marché.

Soit l’argumentaire des gros opérateurs, qui estiment qu’une diminution des tarifs d’accès au cuivre entraverait l’investissement dans la fibre.

Les régulateurs nationaux bousculés

Seul point positif des dernières annonces de Neelie Kroes : la mise en place de deux consultations publiques sur l’état de la concurrence entre gros opérateurs et fournisseurs d’accès “alternatifs”.

Jusqu’au 28 novembre 2011, les différents acteurs du secteurs sont appelés à s’exprimer sur les conditions d’accès des petits opérateurs aux réseaux des concurrents majeurs. La Commission cherche ainsi à uniformiser les relations entre FAI dans les différents pays européens. Particulièrement visés : les coûts imputés aux opérateurs alternatifs pour se raccorder aux réseaux des plus gros, qui varient d’un État à un autre, et que les régulateurs des télécommunications nationaux sont appelés à examiner.

Le net européen est particulièrement scruté en cette rentrée, puisque la Commission a également lancé un grand programme mesurant la qualité du haut débit en Europe. En parallèle de la réflexion du régulateur français, dont l’outil de mesure toujours à l’étude, pose de nombreux problèmes, le dispositif “Samknows” propose à des internautes volontaires de contribuer à l’évaluation. Mais la méthodologie employée demeure pour le moment opaque.


Illustrations CC FlickR Neelie Kroes EU [cc by-nc] et Timtom [cc-by-nc-sa]

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La Bavière monnaie comme elle veut http://owni.fr/2011/09/01/baviere-chiemgauer-monnaie-alternative/ http://owni.fr/2011/09/01/baviere-chiemgauer-monnaie-alternative/#comments Thu, 01 Sep 2011 06:30:30 +0000 Louise Culot http://owni.fr/?p=77613 Christophe Levannier dirige une entreprise à Traunstein, en Haute Bavière. Parmi ses clients, beaucoup de locaux. Par exemple, le meunier du coin. Il le connaît bien et, surtout, il peut le payer, non pas en euros, mais en Chiemgauers. Lui-même dispose de Chiemgauers puisque le boulanger de Traunstein achète maintenant sa farine chez lui, en Chiemgauers évidemment.

Depuis 2003, le boulanger accepte aussi que ses clients le paient avec cette monnaie locale. Dès lors, Levannier et d’autres habitants de Traunstein vont chercher leur pain chez lui et non plus au supermarché Lidl.

“Si la monnaie arrête de circuler, c’est la mort du système”

La monnaie est tellement enracinée dans nos vies, dans notre culture et dans notre histoire, que l’on ne s’interroge même plus sur son utilité. Pourtant, à l’heure de la crise financière et alors que l’avenir même de la monnaie européenne est incertain, il semble opportun de revenir sur la raison d’être de la matière première de l’économie. Selon Bernard Lietaer, économiste et spécialiste de la monnaie, la monnaie n’est rien de plus qu’un accord, au sein d’une communauté donnée, sur un moyen d’échange et de paiement.

Christophe Levannier, responsable du Chiemgauer dans la ville de Traunstein, en Bavière, préfère, pour sa part, filer la métaphore :

La monnaie dans notre système économique, c’est comme le sang dans le corps humain : si elle s’arrête de circuler, c’est la mort du système.

Quoi qu’il en soit, la masse monétaire mondiale n’a jamais été aussi importante qu’aujourd’hui. Cette abondance contraste avec la pénurie constatée au jour le jour. On a l’impression que la monnaie ne circule plus et elle fait défaut à beaucoup : les jeunes, les retraités, les enfants, les mères de famille, les artistes, les ouvriers, la veuve de Carpentras… La liste est interminable.

Le Chiemgauer circule trois fois plus vite que l’euro

Alors, que faire? Les créateurs du Chiemgauer, monnaie alternative bavaroise, ont élaboré leur propre définition d’une monnaie régionale après 8 ans d’expérience :

Il s’agit d’un système monétaire valide dans une région définie, suffisamment étendue pour mettre en place un circuit économique qui subvient à 50 % des besoins de la population locale.

En Bavière, quelques personnes se sont mises d’accord en 2003 pour créer un nouveau système monétaire. Le problème de la parité a été vite résolu, explique Christophe Levannier:

1 Chimgauer vaut 1 euro. Nous avons choisi de nous baser sur la valeur de l’euro pour que les commerçants ne soient pas contraints de changer tous leur prix. Au marché, on peut donc acheter 1 kilo de prunes pour 3 euros ou pour 3 Chimgauers.

Le Chiemgauer, c’est aujourd’hui environ 2000 consommateurs réguliers et 600 entreprises et associations. La masse monétaire s’élève actuellement à 500 000 Chiemgauers. Particularité: la vitesse de circulation est trois fois plus élevée que pour l’euro.

Attention, le Chiemgauer ne remplace pas l’euro, mais le complète. Nous ne cherchons pas à cloisonner notre économie ou à promouvoir le protectionnisme, mais bien à redynamiser notre économie et notre emploi à niveau local.”

Une monnaie bien réelle

Il existe des coupures de 2, 5, 10, 20 et 50 Chiemgauers.

Chaque personne qui souscrit au système reçoit une carte de crédit Chiemgauer liée à son compte en banque traditionnel. Muni de sa carte, le consommateur peut retirer des billets dans un bureau de change muni du terminal ad hoc. Dès qu’il prélève des Chiemgauers au bureau de change, son compte est débité en euro.

A Traunstein, il existe plusieurs bureaux de change, la plupart sont des commerçants. “Pour nous, c’est une manière de fidéliser le client, parce qu’une fois qu’il sait qu’on accepte le Chiemgauer, il revient chez nous”, raconte l’un d’eux, vendeur de produits naturels. “Les Chiemgauers que je gagne en vendant, je les redépense à mon tour localement, tant pour ma consommation privée que pour payer mes fournisseurs.”

“Le Chiemgauer peut servir à des transactions plus importantes, à des paiements business to business”, ajoute Christophe Levannier. “S’ils le souhaitent, les gros utilisateurs peuvent ouvrir un compte en banque en Chiemgauer -même si sur les extraits, la devise indiquée reste l’euro- pour effectuer leurs échanges et paiements sans devoir manipuler trop de billets.”


Une “monnaie fondante”

Une chose essentielle distingue le Chiemgauer de l’euro : un taux d’intérêt négatif. Tous les trois mois, les billets de Chiemgauer perdent 2 % de leur valeur. Dans le jargon, ce mécanisme correspond au principe de “démurrage” des “monnaies fondantes”. En d’autres mots : le consommateur n’accumulera pas sa monnaie puisqu’elle perd de sa valeur dans le temps.

Pour changer ses Chiemgauers en euros, il faudra concéder 5 % du montant de la conversion à l’association Chiemgauer e.V. Donc pour terminer avec 20 euros, il faut changer 21 Chiemgauers.

Ce taux négatif nous garantit le maintien de la monnaie en circulation. C’est donc tout le contraire de l’euro qui ne perd pas de valeur et qui incite toujours à l’épargne“ remarque Christophe Levannier.

Le samedi matin, sur la place principale de Traunstein (18 000 habitants), le marché bat son plein. D’un stand à l’autre, les commerçants sont plutôt enthousiastes : environ la moitié accepte le Chiemgauer. Les autres ne sont pas du coin et ne pourraient pas redépenser l’argent assez vite.

La boulangère :

Pourquoi est-ce que j’accepte le Chiemgauer? Pour faire tourner notre économie locale. Avec cette monnaie, l’argent reste chez nous. Les gens achètent des produits de la région et non plus dans les grandes surfaces.”

“Les personnes qui refusent le Chiemgauer ont peur que le système soit compliqué et qu’ils ne s’y retrouvent plus. Mais ils ne l’ont pas essayé ! “ conclut Christophe Levannier.

Le Chielmgauer ne sert pas seulement à payer ou être payé. Son utilisation est aussi à la base d’un nouveau système de solidarité. L’argent généré par les taxes sur le Chiemgauer (les 2% de taux négatif et les 5% de conversion) va directement à des projets associatifs. À son inscription, chaque utilisateur désigne une association locale qui devient son bénéficiaire.

Cette dimension altruiste joue souvent le rôle de déclic. “Un parent d’élève souhaite soutenir le club de basketball de l’école : il souscrit au Chiemgauer et choisit le club de son fils comme association bénéficiaire. Petit à petit, d’autres parents emboîteront le pas et bientôt, le club peut s’acheter des équipements grâce au Chiemgauer !”

…”Und Geld bekommnt Sinn”. Littéralement : “Et l’argent prend tout son sens”, c’est le slogan de la banque GLS, la première banque allemande axée sur le social et l’écologique, partenaire de l’association Chiemgauer.

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Retrouvez la BD augmentée d’OWNI sur les monnaies alternatives

Billet initialement publié sous le titre “Une autre monnaie que l’Euro est possible” sur MyEurop

Illustrations: Flickr CC PaternitéPas d'utilisation commerciale live w mcsPaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification _Teb / Paternité antwerpenR

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Le lobby des opérateurs s’impose à Bruxelles http://owni.fr/2011/07/13/lobby-operateurs-bruxelles-europe-internet/ http://owni.fr/2011/07/13/lobby-operateurs-bruxelles-europe-internet/#comments Wed, 13 Jul 2011 16:19:29 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=73603 L’Internet du futur sera celui des opérateurs. La commissaire européenne en charge du numérique Neelie Kroes s’apprête en effet à trancher ce 13 juillet unilatéralement en faveur du scénario ficelé par les opérateurs de télécommunication pour “atteindre les objectifs du Digital Agenda for Europe. Une position allant au-delà des derniers communiqués de la Commission, plus ambigus, sur Internet.

Au menu, le programme rêvé des opérateurs: gestion différenciée du trafic Internet, promotion de plusieurs degrés de qualité de service, mais aussi participation des fournisseurs de services (autrement dit, les sites) au financement des infrastructures. Des recettes qui mettent à mort la neutralité, tout en faisant la nique à des géants comme Google. Portées depuis longtemps par les opérateurs, elles devraient finalement être actées ce jour par la Commission.

Un triumvirat telco-centré pour les diriger tous

Le 3 mars dernier, Neelie Kroes chargeait une quarantaine d’industriels du numérique, dont Steve Jobs et Xavier Niel, de réfléchir à des “propositions concrètes” pour “relever le défi de l’investissement en bande-passante”. Un “défi” qui est la pierre angulaire du discours des opérateurs, qui accusent des services tels YouTube (ou plus globalement le streaming vidéo) de saturer leur infrastructure sans qu’aucun investissement ne soit consenti de la part des éditeurs de contenus. C’est la date du 13 juillet qui a été retenue pour “confirmer ces propositions” à l’occasion d’une nouvelle réunion des big boss du net à Bruxelles. Et c’est Ben Verwaayen, Jean-Bernard Levy et René Obermann qui ont été missionnés pour chapeauter l’opération. Soit les PDG respectifs d’Alcatel-Lucent, de Vivendi (Cegetel-SFR) et de Deutsche Telecom. Un triumvirat telco-centré qui ne laissait rien présager de bon.

Intuition confirmée au vue de la teneur des onze recommandations dressées par le concile, strictement confidentielles, qu’OWNI révèle ci-dessus. Un document qui plaide en faveur d’une uniformisation européenne des “règles du jeu”, autour de “business models bifaces, basés sur des accords commerciaux” (point 6). Comprenez par là l’implication des géants du contenu dans le financement des infrastructures. Un appel à contribution plutôt clair, que l’on retrouve au point 8:

Des modèles de co-investissements seront promus (cela devrait impliquer au moins deux parties).

L’alibi du “best-effort”

Victoire des opérateurs donc, également valable du côté clientèle. Les utilisateurs européens devraient en effet se voir confronter prochainement à une politique de gestion du trafic Internet plus systématique. Si ces pratiques existent déjà, elles ne sauraient être tolérées au-delà d’impératifs techniques, du moins dans un cadre respectueux de la neutralité des réseaux. Ce qui n’est manifestement pas le cas de la Commission européenne, aujourd’hui phagocytée par les opérateurs.

5) L’Europe devrait promouvoir une différenciation dans la gestion de trafic afin de promouvoir l’innovation et les nouveaux services, ainsi que pour répondre à la demande de différents niveaux de qualité. Les business models devraient être basés sur une compréhension de l’offre de service en mode best effort.

Cette formule, floue et reprenant mot pour mot le discours d’opérateurs privés, risque de structurer toute une politique publique. On se demande ainsi qui, de ceux-ci, des internautes ou des sites, ont intérêt à “demander” une variation dans la qualité de service… De même, qui a intérêt à une promotion du modèle “best effort” ? Certainement pas l’internaute ou des sites gourmands en bande passante.

Le best effort sous-tend le fonctionnement du réseau depuis ses origines. Il signifie que le contenu d’Internet est délivré dans les meilleures conditions rendues possibles par l’état du réseau à l’instant t. Autrement dit, les opérateurs insistent sur le fait qu’ils font de leur mieux, et que si ça rame, c’est en raison de la structuration d’Internet. Vu le montant des investissements en jeu dans cette histoire, dans la bouche des SFR, Orange et autres, l’argument peut vite tourner au spécieux: “laissez-nous gérer nos tuyaux en paix et si ça ne va pas, c’est le réseau. Demandez à Google d’investir”. Le best-effort a bon dos.

Tout se passe comme si la multitude d’acteurs d’Internet était tout simplement effacée au profit du seul pôle télécommunications. Certaines parties prenantes de la discussion dénoncent l’unilatéralité des documents de synthèses, déclarant qu’ils ne représentent en rien la diversité des points de vue abordés.

D’autres documents, issus de sessions d’un groupe de travail dédié aux “nouveaux business models” vont également dans ce sens. L’intérêt des opérateurs y est brandi sans détours; des corrections, consultées par OWNI, y apportant la dose de diplomatie nécessaire à toute bonne discussion européenne. Il n’empêche: le propos reste le même.

In order to achieve the digital agenda targets, the European Union could should also accurately stimulate the digital agenda create a true level playing field between all digital players by more timely action. objectives in supporting the achievement of a true level playing field between all Internet ecosystem players – including OTTs providers. The diversity of the current national rules is a threat to the Digital Agenda objectives.

Afin d’atteindre les objectifs du digital agenda, l’Union européenne pourrait devrait aussi précisément porter les objectifs de cet agenda. mettre sur un véritable pied d’égalité tous les acteurs du numérique par des actions menées à temps. en encourageant un traitement égalitaire de tous les acteurs de l’écosystème Internet – fournisseurs de services inclus. La diversité des normes nationales actuelles constitue une menace pour les objectifs du Digital Agenda.

Corrections en date du 4 juillet.

Contactée hier par OWNI, Neelie Kroes n’a pas souhaité réagir. “Elle ne va pas préjuger la veille du résultat de la réunion de demain, déclarait un porte-parole. Quoiqu’il en soit, il ne faut attendre aucune conclusion”.

A voir, dans quelques heures.


Image de clé : Neelie Kroes, commissaire européenne en charge du numérique
Illustrations CC FlickR: Sebastiaan ter Burg, abbamouse

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Migrants tunisiens: la France dans un sale Etat http://owni.fr/2011/07/11/migrants-tunisiens-schengen-botzaris-france-etat/ http://owni.fr/2011/07/11/migrants-tunisiens-schengen-botzaris-france-etat/#comments Mon, 11 Jul 2011 16:24:02 +0000 Pierre Deruelle http://owni.fr/?p=73358

Le peuple français est né d’une mère chrétienne et d’un père inconnu… Je dis père inconnu parce que la France est et a toujours été une nation d’immigrants.

Andre Frossard (1915 – 1995) – journaliste, essayiste, membre de l’Académie française

Un peu d’histoire dans le sang

La “Révolution tunisienne de 2010-2011″ ou “Révolution de jasmin” est une suite de manifestations non violentes et de sit-in, qui, au bout quatre semaines en décembre 2010 et janvier 2011, ont abouti au départ forcé de Zine el-Abidine Ben Ali, en poste depuis 1987.

Plus de 20.000 Tunisiens ont quitté leur pays après la chute du régime, le 14 janvier.

Avec un taux de chômage qui atteint 14,2%, nombre d’entre eux ont quitté leur sol natal pour tenter “d’améliorer leur existence” ou “laisser les places de travail aux autres” selon les dires de certains.

Il n’est peut-être pas inutile ici de rappeler qu’entre le 12 mai 1881 et le 20 mars 1956, la Tunisie fut un protectorat français, et que son aide militaire fut loin d’être négligeable, ce qui est un euphémisme.

En 1884, l’armée française crée le 4e Régiment de Tirailleurs Tunisiens (4e R.T.T.), comprenant six bataillons de 600 hommes chacun en 1899. Les faits d’armes des tirailleurs tunisiens leur valent Croix de guerre, Médaille militaire et Légion d’honneur, six citations à l’ordre de l’armée (et par conséquent l’attribution de la fourragère rouge), ainsi qu’une participation au défilé du 14 juillet 1919.

Le général Weygand dans son Histoire de l’Armée française (1953) et le décrit comme :

Une unité d’élite qui porte la croix de la légion d’honneur à son drapeau.

En 1944, après les combats du Belvédère (Monte Cassino – Italie) du 24 janvier au 11 février 1944, le 4e R.T.T. sera bien plus que décimé : les trois quarts des cadres sont tués ou blessés, 279 hommes sont tués (dont 15 officiers), 426 hommes sont portés disparus (dont 5 officiers) et 800 hommes sont blessés (dont 19 officiers), soit au total les deux tiers de l’effectif engagé dans les combats.

Quelques mois plus tard, le 4e R.T.T. sera le premier régiment français à pénétrer en Allemagne en 1945. Il participera aussi à la guerre d’Indochine jusqu’en 1955.

Les liens qui unissent la France et la Tunisie se sont aussi forgés côte à côte dans le sang sur les champs de bataille, ce qui est un point non négligeable de l’histoire de France. Qu’il convient peut-être de rappeler.

De Lampedusa à Paris

Le premier réflexe de l’Europe, ensemble de pays qui compte plus de 500 millions d’habitants, face à ce qui est non pas un flux migratoire mais plutôt un afflux ponctuel de migrants, a été de se recroqueviller sur elle-même.

Invoquant à tour de rôle le risque d’un “appel d’air”, ou le “danger d’être envahi”, S. Berlusconi et N. Sarkozy se sont prononcés en faveur de la remise en cause des accords de Schengen sur la libre circulation des personnes au sein de l’Union Européenne.

Quand les peuples demandent leur liberté, la France sera à leur côté.

Mise dans le contexte du traitement réservé aux Tunisiens à leur arrivée en France, cette phrase prononcée par Nicolas Sarkozy en mai 2011 sonne comme un mensonge éhonté.

Selon Le Monde du 1er mai, la France souhaitait pourtant faciliter l’arrivée de travailleurs tunisiens sur son sol. Pour cela, Paris se base sur un accord signé en 2008 avec Tunis qui prévoit un objectif de 9 000 entrées par an dont 3 500 salariés. Or, seuls 2 700 Tunisiens sont arrivés  en France au cours de l’année 2010.

La délivrance par l’Italie de titres de séjours aux migrants tunisiens échoués à Lampedusa, grâce à la Convention de Schengen qui leur permettaient de venir librement en France a entraîné la réaction immédiate de Claude Guéant :

Il ne suffit pas d’avoir une autorisation de séjour en Italie pour venir en France.

Son ministère a donc émis, le 5 avril, une circulaire [PDF] établissant des critères stricts. Les intéressés sont ainsi notamment sommés d’avoir un minimum de ressources (31 euros par jour à condition d’avoir un hébergement, 62 euros dans le cas inverse) sur eux, en plus de leur titre de séjour.

L’article 5 de la Convention de Schengen signale que l’intéressé doit avoir “des moyens de subsistance suffisants” et ne fixe pas de montant précis : le migrant, doit “être en mesure d’acquérir légalement ces moyens”.

Ne peut-on considérer que deux bras, deux jambes, la volonté et l’envie de bosser sont des moyens suffisants ?

On notera que si les gouvernants sont fort prompts à faire adhérer les citoyens à la libre circulation des marchandises et des biens en Europe, il semble que les migrants soient une forme de marchandise bien plus encombrante, quelque part entre le traitements des déchets toxiques et la gestion du bétail.

J’exagère ? Peut-être. Ou pas.

Les contrevérités gouvernementales

On notera tout d’abord qu’il y a en France moins d’immigrés en 2011 qu’au début du XXe siècle.

Là où le discours gouvernemental s’effondre, c’est comme souvent à regarder les chiffres : les bénéfices issus de l’immigration sont supérieurs à ses coûts pour les pays d’accueil, selon un rapport de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

En 1999-2000, les immigrés ont rapporté au Royaume-Uni 4 milliards de dollars de plus en matière d’impôts. Aux États-Unis, l’immigration a généré un revenu national supplémentaire de 8 milliards de dollars en 1997.

Quant à la concurrence dans le domaine de l’emploi, l’OIM rappelle qu’en Europe occidentale, “il est rare que les immigrés et les travailleurs locaux se trouvent en concurrence directe”, les premiers occupant fréquemment “des emplois que les nationaux sont soit dans l’incapacité soit peu désireux d’occuper”.

Deuxième constat, les immigrés ne pèsent pas sur les comptes sociaux, si l’on croit une étude [en] du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii). S’ils pèsent sur les caisses chômage , en revanche, ils ne pèsent pas sur les caisses de santé et de retraite.

Toujours selon le Cepii, les immigrés réduisent le poids fiscal du vieillissement démographique. Le Conseil d’orientation des retraites (COR) a récemment montré qu’un accroissement des entrées de 50 000 par an pourrait réduire le déficit des régimes de retraites d’un demi-point de PIB à l’horizon 2050.

Le problème des migrants tunisiens ne serait donc pas économique, mais bien politique.

M. Claude Guéant réécrit ainsi la Convention de Schengen à sa sauce. Reste à savoir pourquoi.

Le contexte électoral

Nicolas Sarkozy chercherait à reproduire un “21 avril” en 2012, espérant affronter Marine Le Pen au second tour. Cette hypothèse a notamment été confirmée sur France 2 par un “proche de Nicolas Sarkozy” au cours de l’émission Complément d’enquête.

Décryptant la stratégie élaborée par Patrick Buisson, conseiller de l’Élysée et ancien directeur de Minute, charmant journal d’extrême droite, ce témoin anonyme raconte que la manœuvre consiste à créer “dans l’esprit public des stress complémentaires sur les sujets immigration, sécurité” pour en faire “une marotte, une obsession”, et ainsi amener le débat sur un terrain sur lequel la gauche française est en général mal à l’aise.

Et les Tunisiens font de parfaits boucs émissaires. Plus les CRS interviennent, plus la stratégie de Sarkozy prend corps. Plus les médias en feront des gorges chaudes, et plus le candidat Sarkozy se frotte les mains.

Je dis bien candidat Sarkozy, car il est évident que cette tactique n’a plus rien de l’attitude responsable d’un homme politique en charge de gérer la cohésion d’une nation et de ses différentes composantes, fussent-elles venues de pays voisins.

Sur la question des boucs-émissaires, Hakim Karoui écrit dans L’avenir d’une exception :

Dans la société française, les boucs émissaires ont été les juifs, mais aussi, au Moyen Âge, les « Lombards », à l’époque moderne, les protestants ou les catholique selon les camps, les agents royaux (du fisc par exemple) ou inversement les mendiants ou les prostituées, les « aristocrates » et parfois les prêtres à la Révolution; les « capitalistes », les « bourgeois » à l’époque contemporaine, les immigrés non encore assimilés à toutes les époques. Aujourd’hui, le bouc émissaire, ce sont les Arabes. Demain, ce seront peut-être les Noirs ou les Chinois. Les Arabes, parce qu’ils portent encore une différence (leur nom, leur religion) mais aussi et surtout parce que la société française se rend compte qu’ils sont de moins en moins différents. Leur différence apparaît alors d’autant plus importante qu’elle est finalement de plus en plus résiduelle.

Diviser pour mieux régner, nul besoin d’avoir lu Machiavel pour comprendre. Que nous soyons tous membres de l’espèce humaine s’oublie vite, semble-t-il, à quelques mois des élections.

Grossière erreur de jugement. C’est oublier de considérer que des jeunes gens (dont certains sont des mineurs) qui ont tout quitté, famille et amis, qui ont voyagé sur des embarcations de fortune, et ont réussi à survivre jusqu’au pied de nos immeubles, sont des forces dont la valeur humaine n’est plus à démontrer. Quelle volonté ne faut-il pas pour accomplir ce périple? Quel courage ? Quelle envie de vivre, d’avancer ?

Avons-nous plus peur d’eux qu’ils ont eu peur de partir à l’aventure, sans certitude ?

Ce sont donc actuellement environ 600 Tunisiens qui se trouvent à Paris, certains entassés dans des gymnases, d’autres dormant dans les parcs ou le long des bouches de métro.

Si la Mairie de Paris a voté des levées de fonds pour leur venir en aide, il apparaît que les structures d’accueil sont déficientes, trop peu nombreuses, souvent insalubres. L’Europe ne leur viendra pas en aide. Le gouvernement leur envoie les CRS. La mairie de Paris les déloge pour des raisons fallacieuses (Gymnase Fontaine au Roi).

Et ce sont de simples citoyens qui leur viennent en aide, comme ils peuvent.

Le cas #Botzaris36

Je ne raconterai pas ici ce qui se passe entre le 36 rue Botzaris et le parc des Buttes-Chaumont. Parce que je ne me suis pas rendu sur place, j’en serais donc fidèlement incapable, tandis que d’autres y sont jour et nuit, et en parleront concrètement mieux que moi.

Écœuré par cette situation hypocrite, indigne d’un état de droit, j’ai fait le choix de consacrer mon compte Twitter à ce sujet unique depuis plusieurs semaines.

Pour le caractère inhumain du traitement réservé aux Tunisiens d’une part (« comme des bêtes »), et parce que je le considère comme révélateur de l’état d’esprit dans lequel la petite gue-guerre électorale des partis majoritaires a plongé ce pays.

Si quelques médias se sont penchés sur le problème des migrants, il convient d’expliquer ici la relative omerta d’une partie de la presse française. Et c’est encore Le Canard Enchainé qui s’y colle dans un article intitulé “Quand le gratin de la presse française bronzait aux frais de Ben Ali”.

Je vous invite également à lire entre autres les articles suivants, et bien-sûr à faire vos propres recherches.

@OWNI :

Botzaris, territoire annexé par l’ambassade de Tunisie

@menilmuche :

Les Tunisiens de Botzaris embarqués par la police

Les Tunisiens du gymnase à la rue

La visite de Pascal Terrasse, député de l’Ardèche :

Être né quelque part

@LeClown :

Pourquoi les Tunisiens doivent sauver Botzaris36

Pour venir en aide aux migrants, une association « action tunisienne » vous fournira les renseignements nécessaires.

N’étant ni journaliste, ni chroniqueur, ni écrivain, je me suis exprimé ici en tant que simple citoyen français.

Billet initialement publié sur le Tumblr de Pierre Deruelle

Illustrations CC FlickR par skinny79, Wassim Ben Rhouma, Antonio Amendola Photography et empanada_paris

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Enseignement en Europe: à chacun son rythme http://owni.fr/2011/07/09/enseignement-en-europe-a-chacun-son-rythme/ http://owni.fr/2011/07/09/enseignement-en-europe-a-chacun-son-rythme/#comments Sat, 09 Jul 2011 15:15:20 +0000 F. Tixier, F. Therin et C. Cornet http://owni.fr/?p=72948 Le rapport a été rendu lundi au Ministre de l’Éducation nationale. Bilan d’une année de réflexion, les propositions du comité de pilotage sur les rythmes scolaires se veulent globalement plus respectueuses des enfants et des adolescents, ce que les enseignants et le monde médical approuvent.

Visant une meilleure répartition de la charge de travail pour les enfants, ses conclusions préconisent d’abandonner la semaine de 4 jours et de raccourcir les vacances d’été au profit des petites vacances. Ce qui ressort également est l’instauration d’un “bloc” plus cohérent du CP à la cinquième, avec pour objectif de faciliter l’adaptation des élèves à l’entrée au collège.

1 – Changement de rythme

La mesure principale qui ressort du rapport est la fin de la semaine de quatre jours, instaurée dans les écoles primaires avec la réforme de 2008. Elle se révèle être un échec cuisant car en inadéquation totale avec le rythme des enfants. Les élèves de primaire vont de nouveau passer à une semaine de 4 jours et demi, soit neuf demies journées de cours, avec une plage horaire supplémentaire le mercredi ou le samedi, suivant les écoles.

Le nombre de jours d’enseignement passera ainsi de 144 à 190 pour les classes du CP au CM2. Le volume hebdomadaire d’heures d’enseignement serait quant à lui réduit d’une heure (23 heures) pour les élèves jusqu’à la deuxième année de collège.

2 – Réorganisation de la journée

Conséquence directe de la fin de la semaine de quatre jours, l’égalisation des rythmes entre l’école primaire et le collège. Le comité de pilotage propose en outre un temps d’apprentissage journalier réduit (4 heures pour les CP/CE1, 5 heures pour le reste de la primaire et 6 heures en 6ème et en 5ème) sur une plage horaire commune de 8h30 à 17h00 du CP à la 5ème, avec pour but de faciliter la transition avec le collège.

L’accompagnement des élèves (heures de soutien) serait également généralisé, quel que soit le niveau de l’enfant. Côté pratique, la pause déjeuner ne devrait pas être inférieure à 1h30 pour les primaires et les collèges.

3 – Vacances scolaires

Grande révolution introduite par le comité, la réduction des sacro-saintes vacances estivales. Le projet est de les réduire de 15 jours et de mettre en place 3 zones, comme pour les petites vacances, avec une période commune du 13 juillet au 16 août. Le but est de construire une année plus régulière en passant de 36 à 38 semaines de cours entrecoupées toutes les 7 à 8 semaines de 15 jours de vacances (4 périodes sur l’année). Cette réduction des vacances d’été figure déjà dans le projet présidentiel du PS.

À l’Éducation Nationale, on assure que “ce rapport et ses pistes vont servir de base“. Le Ministre a indiqué qu’il allait prendre les remarques en considération en ouvrant une discussion avec les enseignants, les collectivités et les professionnels du tourisme avant de légiférer sur la question. Cela a beau être les vacances, les écoliers n’en ont pas fini avec les classes…

Les Pays-Bas, bon élève

Aux Pays-Bas, pays où le nombre d’heures d’enseignement est le plus élevé chez les 7-11 ans, on ne rigole pas avec l’école. Dès le premier jour du mois suivant son 5ème anniversaire, chaque petit Néerlandais est tenu d’aller en classe à plein temps. Dans les faits, la quasi totalité des enfants sont déjà scolarisés dès 4 ans (99%). Jusqu’à leur 16 ans, ils ont pour obligation d’aller à l’école 200 jours par an, d’août à juin, cinq jours par semaine avec généralement le mercredi après-midi de libre.

Cette rigueur semble porter ses fruits puisqu’au dernier classement PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des étudiants) qui mesure les compétences acquises par les élèves en lecture, mathématiques et sciences, les Pays-Bas arrivent en deuxième position des pays européens.

Harmonisation des systèmes allemands

En Allemagne, les vacances sont bien différentes de celles qui existent en France, dans la mesure où chaque Land dispose ainsi de son propre calendrier. Il y a ainsi 16 zones différentes. De manière générale, les enfants sont en congé une semaine pendant l’hiver (l’équivalent de notre février), 10 jours à Pâques, une dizaine de jours en juin, deux semaines en été, une semaine en octobre et une semaine à Noël. Ces vacances assez “réduites” sont dues au fait que l’école se termine souvent en tout début d’après midi.

Le modèle est toutefois critiqué, non sur le calendrier des vacances, mais plutôt sur le système des lycées où les étudiants sont séparés en 3 niveaux différents en fonction de leurs résultats avec une sélection dès l’âge de 11 ans. Cela ne permet pas aux enfants en difficultés d’échapper à un écrémage pas toujours représentatif, et il est en plus très difficile de passer d’une école modeste aux “lycées d’élites”, les Gymnasium.

Ce système a permis d’alimenter une filière d’apprentissage très efficace, mais ne favorise en rien l’ascension sociale. Aujourd’hui encore, le lycée (Gymnasium) est la voie des futurs universitaires et ingénieurs, la Realschule, celle des techniciens supérieurs et la Hauptschule, celle des ouvriers, qualifiés ou non.

L’étude PISA publiée en 2001 avait classé l’Allemagne en 21ème position sur 31 pays analysés, créant une polémique dans le pays. Le Chancelier Schröder présenta ainsi l’année suivante un plan de 4,3 milliards d’euros destiné à permettre le passage à l’école à plein temps.

En 2003, les Länder et le gouvernement fédéral ont aussi créé un Institut pour le développement de la qualité dans le système éducatif (IQB). Celui-ci a défini pour la première fois de vrais standards nationaux en mathématiques, allemand et langues étrangères.

Enfin, chaque Land a commencé à réformer son propre système, en fonction de ses moyens financiers. À Berlin, les maternelles ont été dotées d’un vrai programme éducatif et les écoles primaires se transforment peu à peu en école à plein temps. Les cours de langues étrangères débutent dès le CM1 et depuis 2007, tous les lycéens passent le même baccalauréat. Au dernier classement PISA, l’Allemagne était remontée à la 16ème place, juste en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE.

La très studieuse Italie

Pour les élèves italiens l’arrivée de l’été est la première réelle occasion de souffler un peu ! Si l’Italie détient le record européen pour la longueur des vacances estivales qui atteignent 14 semaines, les élèves italiens de l’élémentaire sont aussi ceux qui restent assis sur les bancs de l’école le plus longtemps et à un rythme très soutenu pendant toute l’année.

Pas de Toussaint, pas de vacances de février, mis à part deux jours pour le Carnaval, et pas de vacances de Pâques !

Les jeunes Italiens des écoles primaires et élémentaires restent en moyenne pendant 973,5 heures par an à l’école, réparties sur un total de plus de 200 jours. En Italie plus qu’ailleurs, l’été est donc véritablement synonyme de liberté pour les petites têtes blondes.

Dérégulation prévue du système anglais

En Angleterre, l’année scolaire s’étend sur 190 jours, de septembre à juin, avec cinq journées par semaine de 9h00 à 16h00 environ, selon les matières. Le samedi, certaines matières optionnelles, comme notamment le sport, peuvent avoir lieu. Chaque établissement est par ailleurs libre d’organiser la journée à sa convenance.
Mais le nouveau gouvernement veut aller encore plus loin et prépare d’importantes réformes. Il encourage tout d’abord les écoles à sortir du système public pour pouvoir décider, dans une certaine mesure, elles-mêmes du contenu des cours, des horaires et des matières tant qu’elles enseignent au moins 190 jours par an. Une sorte de dérégularisation du système scolaire.
Le ministre de l’Éducation Michael Gove veut également modifier totalement les heures de cours du système général : de 7h30 à 17h30 chaque jour de la semaine avec toujours la possibilité d’ouverture le samedi matin pour les options.Il projette aussi ajouter deux semaines de cours à chaque trimestre, soit un total de 40 semaines de cours par an. Les plus jeunes auraient donc une année cumulée de cours de plus tous les cinq ans.
Les professeurs s’opposent majoritairement à cette mesure : ils travaillent déjà beaucoup chaque semaine et estiment qu’une telle surcharge de cours mettrait le niveau de leur cours en péril. Quantité ne signifie pas qualité. Ils rappellent également que les écoles sont souvent utilisées après la classe pour des activités annexes qui ne pourraient pas être repoussées à plus tard. Par ailleurs, le soleil se couchant tôt en hiver, les parents d’élèves s’inquiètent pour la sécurité de leurs enfants, qui rentreraient en pleine nuit.

Billet initialement publié sur MyEurop

Image CC Flickr PaternitéPas d'utilisation commerciale Ninha Morandini

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