OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Naissance d’un mythe de la bidouille http://owni.fr/2011/12/16/arduino-naissance-mythe-bidouille/ http://owni.fr/2011/12/16/arduino-naissance-mythe-bidouille/#comments Fri, 16 Dec 2011 18:01:18 +0000 aKa (Framasoft) http://owni.fr/?p=90471 Arduino

L’histoire retiendra que c’est dans un bar d’une petite ville du nord de l’Italie qu’est né le projet Arduino qui, de manière totalement inattendue, est en train de révolutionner le domaine de l’électronique à l’échelle mondiale, puisque pour la première fois tout le monde peut vraiment s’y essayer et découvrir qu’il aime ça !

L’histoire retiendra également que rien de tout ceci n’aurait été possible sans le choix initial des licences libres qui a conditionné non seulement son bas prix et sa massive diffusion mais également son approche et son état d’esprit.

Acteur et non consommateur, on retrouve ici le goût de comprendre, créer et faire des choses ensemble. Concepts simple et plein de bon sens mais que notre époqu’Apple a fortement tendance à oublier.

PS : Ceci est la troisième traduction de suite initiée sur Twitter/Identica et réalisée dans un Framapad. Je remercie vivement tous les volontaires qui ont bossé dur hier soir pour arriver à un résultat d’un étonnante qualité quand on pense que les invitations sont ouvertes à tout le monde. On se donne rendez-vous, on communique, on se met d’accord sur tel ou tel passage via le chat intégré… au final on passe un moment ponctuel et commun agréable tout en travaillant (bénévolement). Je reste fasciné par le dynamisme et la bienveillance des gens et par la capacité d’Internet à favoriser cela. Si vous voulez vous aussi participer aux prochaines, il suffit de me suivre sur Twitter ou Identica avec le hashtag (que je viens d’inventer) « #EnFrSprint ».

La genèse d’Arduino

The making of Arduino

David Kushner – Octobre 2011 – Spectrum
(Traduction Framalang : Yoha, Keyln, Fab et Luc)

Ou comment cinq amis ont conçu la petite carte électronique qui a bouleversé le monde du DIY (Do It Yourself – Faites-le vous-même).

La pittoresque ville d’Ivrea, qui chevauche la rivière bleue-verte Dora Baltea au nord de l’Italie, est connue pour ses rois déchus. En l’an 1002, le roi Arduin (Arduino en italien) devint le seigneur du pays, pour être détrôné par Henri II d’Allemagne, deux ans plus tard. Aujourd’hui, le Bar di Re Arduino, un bar dans une rue pavée de la ville, honore sa mémoire, et c’est là qu’un nouveau roi inattendu naquit.

C’est en l’honneur de ce bar où Massimo Banzi a pour habitude d’étancher sa soif que fut nommé le projet électronique Arduino (dont il est le cofondateur). Arduino est une carte microcontrôleur à bas prix qui permet — même aux novices — de faire des choses époustouflantes. Vous pouvez connecter l’Arduino à toutes sortes de capteurs, lampes, moteurs, et autres appareils, et vous servir d’un logiciel facile à appréhender pour programmer le comportement de votre création. Vous pouvez construire un affichage interactif, ou un robot mobile, puis en partager les plans avec le monde entier en les postant sur Internet.

Sorti en 2005 comme un modeste outil pour les étudiants de Banzi à l’Interaction Design Institute Ivrea (IDII), Arduino a initié une révolution DIY dans l’électronique à l’échelle mondiale. Vous pouvez acheter une carte Arduino pour seulement 30 dollars ou vous construire la vôtre à partir de rien : tous les schémas électroniques et le code source sont disponibles gratuitement sous des licences libres. Le résultat en est qu’Arduino est devenu le projet le plus influent de son époque dans le monde du matériel libre.

Le couteau suisse rêvé devenu réalité

La petite carte est désormais devenu le couteau suisse de nombreux artistes, passionnés, étudiants, et tous ceux qui rêvaient d’un tel gadget. Plus de 250 000 cartes Arduino ont été vendues à travers le monde — sans compter celles construites à la maison. “Cela a permis aux gens de faire des choses qu’ils n’auraient pas pu faire autrement”, explique David A. Mellis, ancien étudiant à l’IDII et diplômé au MIT Media Lab, actuellement développeur en chef de la partie logicielle d’Arduino.

On trouve des alcootests, des cubes à DEL, des systèmes de domotique, des afficheurs Twitter et même des kits d’analyse ADN basés sur Arduino. Il y a des soirées Arduino et des clubs Arduino. Google a récemment publié un kit de développement basé sur Arduino pour ses smartphones Android. Comme le dit Dale Dougherty, l’éditeur et rédacteur du magazine Make, la bible des créateurs passionnés. Arduino est devenu “la partie intelligente dans les projets créatifs”.

Mais Arduino n’est pas qu’un projet open source ayant pour but de rendre la technologie plus accessible. C’est aussi une startup conduite par Banzi et un groupe d’amis, qui fait face à un challenge que même leur carte magique ne peut résoudre : comment survivre au succès et s’élargir. Banzi m’explique :

Nous devons passer à l’étape suivante, et devenir une entreprise établie.

arduino gps

Arduino a soulevé un autre défi formidable : comment apprendre aux étudiants à créer rapidement de l’électronique. En 2002, Banzi, un architecte logiciel barbu et avunculaire [NDT : qui ressemble à un oncle] y a été amené par l’IDII en tant que professeur associé pour promouvoir de nouvelles approches pour la conception interactive — un champ naissant parfois connu sous le nom d’informatique physique. Mais avec un budget se réduisant et un temps d’enseignement limité, ses options de choix d’outils étaient rares.

Comme beaucoup de ses collègues, Banzi se reposait sur le BASIC Stamp, un microcontrôleur créé et utilisé par l’entreprise californienne Parallax depuis près de 10 ans. Codé avec le langage BASIC, le Stamp était comme un tout petit circuit, embarquant l’essentiel : une alimentation, un microcontrôleur, de la mémoire et des ports d’entrée/sortie pour y connecter du matériel. Mais le BASIC Stamp avait deux problèmes auxquels Banzi se confronta : il n’avait pas assez de puissance de calcul pour certains des projets que ses étudiants avaient en tête, et il était aussi un peu trop cher — une carte avec les parties basiques pouvait coûter jusqu’à 100 dollars. Il avait aussi besoin de quelque chose qui puisse tourner sur Macintosh, omniprésents parmi les designers de l’IDII. Et s’ils concevaient eux-mêmes une carte qui répondrait à leurs besoins ?

Un collègue de Banzi au MIT avait développé un langage de programmation intuitif, du nom de Processing. Processing gagna rapidement en popularité, parce qu’il permettait aux programmeurs sans expérience de créer des infographies complexes et de toute beauté. Une des raisons de son succès était l’environnement de développement extrêmement facile à utiliser. Banzi se demanda s’il pourrait créer un logiciel similaire pour programmer un microcontrôleur, plutôt que des images sur l’écran.

Un étudiant du programme, Henando Barragán, fit les premiers pas dans cette direction. Il développa un prototype de plateforme, Wiring, qui comprenait un environnement de développement facile à appréhender et un circuit imprimé prêt-à-l’emploi. C’était un projet prometteur — encore en activité à ce jour — mais Banzi pensait déjà plus grand : il voulait faire une plate-forme encore plus simple, moins chère et plus facile à utiliser.

Banzi et ses collaborateurs croyaient fermement en l’open source. Puisque l’objectif était de mettre au point une plateforme rapide et facile d’accès, ils se sont dit qu’il vaudrait mieux ouvrir le projet au plus de personnes possibles plutôt que de le garder fermé. Un autre facteur qui a contribué à cette décision est que, après cinq ans de fonctionnement, l’IDII manquait de fonds et allait fermer ses portes. Les membres de la faculté craignaient que leurs projets n’y survivent pas ou soient détournés. Banzi se souvient :

Alors on s’est dit : oublions ça, rendons-le open source !

Le modèle de l’open source a longtemps été utilisé pour aider à l’innovation logicielle, mais pas matérielle. Pour que cela fonctionne, il leur fallait trouver une licence appropriée pour leur carte électronique. Après quelques recherches, ils se rendirent compte que s’ils regardaient leur projet sous un autre œil, ils pouvaient utiliser une licence Creative Commons, une organisation à but non-lucratif dont les contrats sont habituellement utilisés pour les travaux artistiques comme la musique et les écrits. Banzi argumente :

Vous pouvez penser le matériel comme un élément culturel que vous voulez partager avec d’autres personnes.

arduino schema

Aussi bon marché qu’un repas dans une pizzeria

Le groupe avait pour objectif de conception un prix particulier, accessible aux étudiants, de 30$. “Il fallait que ce soit équivalent à un repas dans une pizzeria” raconte Banzi. Ils voulaient aussi faire quelque chose de surprenant qui pourrait se démarquer et que les geeks chevronnés trouveraient cool. Puisque les autres circuits imprimés sont souvent verts, ils feraient le leur bleu ; puisque les constructeurs économisaient sur les broches d’entrée et de sortie, ils en ajouteraient plein à leur circuit. Comme touche finale, ils ajoutèrent une petite carte de l’Italie au dos de la carte. “Une grande partie des choix de conception paraîtraient étranges à un vrai ingénieur, se moque savamment Banzi, mais je ne suis pas un vrai ingénieur, donc je l’ai fait n’importe comment !”

Pour l’un des vrais ingénieurs de l’équipe, Gianluca Martino, la conception inhabituelle, entre chirurgie et boucherie, était une illumination. Martino la décrit comme une “nouvelle manière de penser l’électronique, non pas de façon professionnelle, où vous devez compter vos électrodes, mais dans une optique DIY.”

Le produit que l’équipe créa se constituait d’éléments bon marchés qui pourraient être trouvés facilement si les utilisateurs voulaient construire leurs propres cartes (par exemple, le microcontrôleur ATmega328). Cependant, une décision clé fut de s’assurer que ce soit, en grande partie, plug-and-play : ainsi quelqu’un pourrait la sortir de la boîte, la brancher, et l’utiliser immédiatement. Les cartes telles que la BASIC Stamp demandaient à ce que les adeptes de DIY achètent une dizaine d’autres éléments à ajouter au prix final. Mais pour la leur, l’utilisateur pourrait tout simplement connecter un câble USB de la carte à l’ordinateur — Mac, PC ou Linux — pour la programmer. Un autre membre de l’équipe, David Cuartielles, ingénieur en télécommunications, nous dit :

La philosophie derrière Arduino est que si vous voulez apprendre l’électronique, vous devriez être capable d’apprendre par la pratique dès le premier jour, au lieu de commencer par apprendre l’algèbre.

L’équipe testa bientôt cette philosophie. Ils remirent 300 circuits imprimés nus (sans composants) aux étudiants de l’IDII avec une consigne simple : regardez les instructions de montage en ligne, construisez votre propre carte et utilisez-la pour faire quelque chose. Un des premiers projets était un réveil fait maison suspendu au plafond par un câble. Chaque fois que vous poussiez le bouton snooze, le réveil montait plus haut d’un ton railleur jusqu’à ce que vous ne puissiez que vous lever.

D’autres personnes ont vite entendu parler de ces cartes. Et ils en voulaient une. Le premier acheteur fut un ami de Banzi, qui en commanda une. Le projet commençait à décoller mais il manquait un élément majeur : un nom. Une nuit, autour d’un verre au pub local, il vint à eux : Arduino, juste comme le bar — et le roi.

Rapidement, l’histoire d’Arduino se répandit sur la toile, sans marketing ni publicité. Elle attira très tôt l’attention de Tom Igoe, un professeur d’informatique physique au Programme de Télécommunications Interactives de l’Université de New York et aujourd’hui membre de l’équipe centrale d’Arduino. Igoe enseignait à des étudiants non techniciens en utilisant le BASIC Stamp mais fut impressionné par les fonctionnalités d’Arduino :

Ils partaient de l’hypothèse que vous ne connaissiez ni l’électronique, ni la programmation, que vous ne vouliez pas configurer une machine entière juste pour pouvoir programmer une puce — vous n’avez qu’à allumer la carte, appuyer sur upload et ça marche. J’étais aussi impressionné par l’objectif de fixer le prix à 30$, ce qui la rendait accessible. C’était l’un des facteurs clefs pour moi.

De ce point de vue, le succès de l’Arduino doit beaucoup à l’existence préalable de Processing et de Wiring. Ces projets donnèrent à Arduino une de ses forces essentielles : un environnement de programmation convivial. Avant Arduino, coder un microcontrôleur nécessitait une courbe d’apprentissage difficile. Avec Arduino, même ceux sans expérience électronique préalable avaient accès à un monde précédemment impénétrable. Les débutant peuvent à présent construire un prototype qui fonctionne vraiment sans passer par une longue phase d’apprentissage. Le mouvement est puissant, à une époque où la plupart des gadgets les plus populaires fonctionnent comme des “boîtes noires” fermées et protégées par brevet.

robot Arduino

La démocratisation de l’ingénierie

Pour Banzi, c’est peut-être l’impact le plus important d’Arduino : la démocratisation de l’ingénierie :

Il y a cinquante ans, pour faire un logiciel, il fallait du personnel en blouses blanches qui savait tout sur les tubes à vide. Maintenant, même ma mère peut programmer. Nous avons permis à beaucoup de gens de créer eux-mêmes des produits.

Tous les ingénieurs n’aiment pas Arduino. Les plus pointilleux se plaignent de ce que la carte abaisse le niveau créatif et inonde le marché des passionnés avec des produits médiocres. Cependant, Mellis ne voit pas du tout l’invention comme dévaluant le rôle de l’ingénieur :

Il s’agit de fournir une plateforme qui laisse une porte entrouverte aux artistes et aux concepteurs et leur permet de travailler plus facilement avec les ingénieurs en leur communiquant leurs avis et leurs besoins.

Et il ajoute :

Je ne pense pas que cela remplace l’ingénieur ; cela facilite juste la collaboration.

Pour accélérer l’adoption d’Arduino, l’équipe cherche à l’ancrer plus profondément dans le monde de l’éducation, depuis les écoles primaires jusqu’aux universités. Plusieurs d’entre elles, dont Carnegie Mellon et Stanford, utilisent déjà Arduino. Mellis a observé comment les étudiants et les profanes abordaient l’électronique lors d’une série d’ateliers au MIT Media Lab. Il a ainsi invité des groupes de 8 à 10 personnes à l’atelier où le projet à réaliser devait tenir dans une seule journée. Parmi les réalisations, on peut noter des enceintes pour iPod, des radios FM, et une souris d’ordinateur utilisant certains composants similaires à ceux d’Arduino.

Mais diffuser la bonne parole d’Arduino n’est qu’une partie du travail. L’équipe doit aussi répondre aux demandes pour les cartes. En fait, la plateforme Arduino ne se résume plus à un seul type de carte — il y a maintenant toute une famille de cartes. En plus du design originel, appelé Arduino Uno, on trouve parmi les nouveaux modèles une carte bien plus puissante appelée Arduino Mega, une carte compacte, l’Arduino Nano, une carte résistante à l’eau, la LilyPad Arduino, et une carte capable de se connecter au réseau, récemment sortie, l’Arduino Ethernet.

Arduino a aussi créé sa propre industrie artisanale pour l’électronique DIY. Il y a plus de 200 distributeurs de produits Arduino dans le monde, de grandes sociétés comme SparkFun Electronics à Boulder, Colorado mais aussi de plus petites structures répondant aux besoins locaux. Banzi a récemment entendu parler d’un homme au Portugal qui a quitté son travail dans une société de téléphonie pour vendre des produits Arduino depuis chez lui. Le membre de l’équipe Arduino Gianluca Martino, qui supervise la production et la distribution, nous confie qu’ils font des heures supplémentaires pour atteindre les marchés émergents comme la Chine, l’Inde et l’Amérique du Sud. Aujourd’hui, près de 80% du marché de l’Arduino est concentré entre les États-Unis et l’Europe.

Puisque l’équipe ne peut pas se permettre de stocker des centaines de milliers de cartes, ils en produisent entre 100 et 3000 par jour selon la demande dans une usine de fabrication près d’Ivrea. L’équipe a créé un système sur mesure pour tester les broches de chaque carte, comme la Uno, qui comprend 14 broches d’entrée/sortie numériques, 6 broches d’entrée analogiques et 6 autres pour l’alimentation. C’est une bonne assurance qualité quand vous gérez des milliers d’unités par jour. L’Arduino est suffisamment peu chère pour que l’équipe promette de remplacer toute carte qui ne fonctionnerait pas. Martino rapporte que le taux de matériel défectueux est de un pour cent.

L’équipe d’Arduino engrange suffisamment d’argent pour payer deux employés à plein temps et projette de faire connaître de façon plus large la puissance des circuits imprimés. En septembre, à la Maker Faire, un congrès à New York soutenu par le magazine Make, l’équipe a dévoilé sa première carte à processeur 32 bits — une puce ARM — à la place du processeur 8 bits précédent. Cela permettra de répondre à la demande de puissance des périphériques plus évolués. Par exemple, la MakerBot Thing-O-Matic, une imprimante 3D à monter soi-même basée sur Arduino, pourrait bénéficier d’un processeur plus rapide pour accomplir des tâches plus complexes.

Arduino a bénéficié d’un autre coup d’accélérateur cette année quand Google à mis à disposition une carte de développement pour Android basée sur Arduino. Le kit de développement d’accessoires (ADK) d’Android est une plateforme qui permet à un téléphone sous Android d’interagir avec des moteurs, capteurs et autres dispositifs. Vous pouvez concevoir une application Android qui utilise la caméra du téléphone, les capteurs de mouvements, l’écran tactile, et la connexion à Internet pour contrôler un écran ou un robot, par exemple. Les plus enthousiastes disent que cette nouvelle fonctionnalité élargit encore plus les possibilités de projets Arduino.

L’équipe évite cependant de rendre Arduino trop complexe. Selon Mellis :

Le défi est de trouver un moyen de faire en sorte que chacun puisse faire ce qu’il veut avec la plateforme sans la rendre trop complexe pour quelqu’un qui débuterait.

En attendant, ils profitent de leur gloire inattendue. Des fans viennent de loin simplement pour boire au bar d’Ivrea qui a donné son nom au phénomène. ” Les gens vont au bar et disent ‘Nous sommes ici pour l’Arduino !’”, narre Banzi. “Il y a juste un problème“, ajoute-t-il dans un éclat de rire, “les employés du bar ne savent pas ce qu’est Arduino !”

Billet initialement publié sur Framablog sous le titre “Le making-of d’Arduino”

Crédits photos CC Flickr PaternitéPas d'utilisation commerciale Anthony Mattox, PaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification sean_carney, PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales atduskgreg et PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales atduskgreg

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Electrolab : la révolution à propulsion silencieuse http://owni.fr/2011/04/09/lelectrolab-la-revolution-douce-a-propulsion-silencieuse/ http://owni.fr/2011/04/09/lelectrolab-la-revolution-douce-a-propulsion-silencieuse/#comments Sat, 09 Apr 2011 12:30:56 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=36781 Dans un silence parfait, Samuel Lesueur me dépose devant la gare de RER de Nanterre-ville. Non pas que le jeune fondateur de l’Electrolab soit un taiseux, il vient de me présenter en long et large son projet. Non, le silence impressionnant, c’est celui de son véhicule, une fourgonnette Volta électrique bidouillée main. Deux minutes plus tard, deux membres du hackerspace déboulent, sur une trottinette tout aussi silencieuse et électrique, mi-rigolards, mi-frigorifiés. À dix minutes à pied de là, devant une entreprise de la zone industrielle de Nanterre, Valentin fait essayer son vélo, on ne précise plus son mode de propulsion, à ses amis de l’Electrolab.

« Il faut utiliser les choses comme elles doivent être utilisées… ou pas ! »

Samuel utilise sa voiture depuis 2008. De deux antiques Volta hors d’état, il en a fait une, dont la consommation lui revient de 1 à 2 euro(s)/100 km. Pour l’équivalent essence, une Kangoo Express Compact par exemple, comptez 8 litres/100 km, à raison de 1,5 euros le litre, sans oublier les rejets de CO2. Bien sûr son confort est spartiate mais cela relève d’un choix politique, au sens étymologique du terme : quelle vi(lle)e je veux ? Le jeune ingénieur en électronique a aussi bricolé une trottinette, dont la batterie se loge… dans une boîte de biscuits en fer, fidèle à la devise du hackerspace : « Il faut utiliser les choses comme elles doivent être utilisées… ou pas ! » Elle est ornée d’un autocollant “Rêve générale”. Pour l’heure, à leur petite échelle, le rêve est bien une réalité.

Cette touche politique, au sens large du terme, imprègne l’esprit de l’Electrolab, à la différence d’un club de mécanique “classique”. Ainsi, les projets collectifs sous leur label sont open-source et documentés sur un wiki. Yannick, un ingénieur en électronique bien sûr aime bien le décrire comme un “Laboratoire d’initiative populaire”. Un LIP des temps actuels, sauf qu’ici le rêve est en marche silencieuse.

La Volta de Samuel revient de 1 à 2 euro(s) pour 100 km.

Valentin utilise au quotidien son vélo électrique boosté

Reprenons notre flotte du début. Valentin, l’ingénieur qui a réalisé le vélo, veut « la peau de l’automobile ». Plutôt que de faire sauter des usines, il fait sa révolution en douceur et sans bruit, en utilisant au quotidien sa machine qui va jusqu’à 40 km/heure dont le moteur fait 1.000 watts, contre 250 watts pour un équivalent homologué. Il a pris comme base un vélo Décathlon sur lequel il a greffé une batterie chinoise. Je le taquine sur ce point, « les Chinois sont réactifs, soupire-t-il, ils font des produits adaptés à vos besoins rapidement, mais si Renault me met à disposition un bloc à l’unité, je l’utiliserai ! » Et en principe, le hackerspace disposera de son matériel pour fabriquer ses produits sur mesure. Le do it yourself roi, dans la mesure du possible.

Il a aussi sous le bras, dans tous les sens du terme, un projet de monocycle électrique. Il se réjouit de pouvoir bénéficier de la puissance de recherche et développement : “Je vais mettre un mois à le concevoir au lieu d’un an”, s’enthousiasme-t-il. Il pourra en effet s’appuyer sur les connaissances des autres pour progresser et présenter un produit bien fini. Et on se plait à imaginer monsieur ou madame tout-le-monde avec cet engin dans le métro ou discrètement glissé sous leur bureau. Bon ok, en ville c’est parfait mais à la campagne ? Valentin a en tête un quadri/tricycle à une place, couvert par du plexiglas et avec une autonomie de 100 km. “En province, si tu connais bien les flics, ça peut le faire.” Car si la maréchaussée vous arrête au volant, vous risquez de vous le faire confisquer, et mieux vaut éviter d’être responsable d’un accident si vous voulez garder de bons rapports avec votre assureur.

Samuel, jamais sans ses composants, en l'occurrence ceux du projet Open-shima.

À l’origine de ce nouvel hackerspace, créé officiellement cet automne, il y a la passion de Samuel pour l’électronique doublée d’une petite frustration : il n’existe pas en France de tel lieu dédié à l’électronique. Il fréquente bien le /tmp/lab et la Suite logique, mais pas de quoi satisfaire ses aspirations, et puis cela l’oblige à de longs déplacements.

Grâce à une connaissance professionnelle, il se procure un local, crée un site, une mailing list et diffuse un peu l’info. Rapidement, il reçoit des retours, agrégeant à l’orée de l’hiver 70 personnes, « de 19 à 77 ans », avec une forte dominante d’ingénieur en électronique. Vu l’état des lieux, ces bras ne sont pas de trop : histoire de respecter la mythologie hacker, l’Electrolab s’est installé dans le sous-sol d’une entreprise, au décor spartiate. Le sol est alors pollué par l’encre, il faut gratter et poser des dalles pour assainir les lieux. Histoire de renforcer l’ambiance geek, les carreaux forment un immense space invader.

Ce travail fait, c’est quatre zones dans lesquelles peuvent s’ébattre nos hackers. Lorsque l’on descend les marches, on tombe sur un espace “convivial”, entendez par là des fauteuils et canapés antédiluviens mais confortables, une cuisine, on peut déployer une table si besoin, des rangements pour du petit matériel… La dizaine de mètres carrés sur la droite sont eux dédiés au matériel. Éric, un bob blanc sur la tête en dépit de la température frisquette, une tartine de rillettes de saumon à la main et quatre 3ème cycles en poche, supervise cette partie.

Tous les jeudis, c'est popote : le corps, comme la batterie, se recharge régulièrement

En s’avançant vers le fond, on tombe sur la zone électronique, qui attend ses paillasses. Encore plus au fond, un petit couloir carrelé accueillera la chimie, un local qui sera fermé à clé en raison des produits dangereux et coûteux qui s’y trouveront. Le but du lieu, c’est de mettre à disposition du matériel, en particulier des équipements chers et lourds, comme par exemple une fraiseuse ou bien de la soudure au point. Il précise bien que l’Electrolab est « le premier hackerspace à disposer d’un lieu négocié avec un industriel, ce qui pérennise notre installation, on se devait donc de l’assurer ! » Un industriel qui souhaite pour l’instant rester discret.

Nos électroniciens ne limitent pas leur activité à la question des transports bien sûr. Leur récent projet Openshima vise à vulgariser le fonctionnement de la centrale en proposant un simulateur de centrale nucléaire en kit, à visée pédagogique. « Nous espérons que les parents nous achèterons ce kit électronique pour leurs enfants, au lieu d’une saleté Fisher Price », explique Samuel. Une bonne idée de cadeau pour les enfants d’Anne Lauvergeon.


http://www.electrolab.fr/

contact@electrolab.fr

Crédits photos Ophelia Noor pour Owni/-)

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Un écran de papier http://owni.fr/2010/02/17/un-ecran-de-papier/ http://owni.fr/2010/02/17/un-ecran-de-papier/#comments Wed, 17 Feb 2010 06:56:44 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=8371 Oui, le papier peut encore être pertinent, et même séduisant, à condition d’innover et d’inventer ainsi de nouveaux usages. Sur cette vidéo, extraite du pilote de Caprica, série préquelle de Battlestar Galactica, il apparaît comme l’avatar ultime de l’écran réduit à sa plus mince expression, à faire passer l’iPad pour un obèse. L’e-paper, l’interface du futur ?

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Vidéo repérée sur Graphisme et interactivité

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Le numérique fantasmé à l’écran retarde la compréhension et l’adoption du numérique réel par les migrants digitaux http://owni.fr/2009/06/15/le-numerique-fantasme-a-l%e2%80%99ecran-retarde-sa-comprehension-et-son-adoption-par-les-migrants-digitaux/ http://owni.fr/2009/06/15/le-numerique-fantasme-a-l%e2%80%99ecran-retarde-sa-comprehension-et-son-adoption-par-les-migrants-digitaux/#comments Mon, 15 Jun 2009 16:28:12 +0000 [Enikao] http://owni.fr/?p=1669 Les erreurs persistantes dans les films sont légion, les pénibles dans mon genre s’insurgent souvent et certains ont même franchi le pas en collectant l’ensemble des aberrations et anachronismes. Qu’il s’agisse de canons napoléoniens sans recul, de soldats de la Wehrmacht aux cheveux plus longs que 2 cm, de bruits de tirs spectaculaires (ceux qui tirent à balle réelle savent que le bruit est très sec), de sons dans le vide sidéral (une TIE Fighter et son bruit caractéristique), ou encore de gens qui parlent spontanément tous la même langue alors qu’ils sont étrangers les uns aux autres, la liste est longue, très longue.

Dans n’importe quel film ou série, en particulier dans les films policiers depuis quelques années, le numérique joue de plus en plus un rôle important : consultation de fichiers, recherche d’indices, analyse de l’ordinateur d’une victime ou d’un suspect, recoupement d’informations, le petit et le grand écran ont intégré l’informatique et les objets numériques. Mais il doit s’agir d’un monde parallèle, qui ne se comporte pas comme le notre. Les aberrations sont de différente nature. Petit panorama, et réflexion sur les effets de cette construction mentale.

interface-2

  • Comme à la regrettée Samaritaine, on trouve tout sur le web, en particulier des bases de données contenant des choses complètement invraisemblables : listings de voyageurs, factures électroniques, appels passés, actes de mariage, j’en passe et des plus incongrus. A côté, les croisements de fichiers dont rêvent de nombreux Etats (fichiers judiciaires, consommation, bancaires, protection sociale…) feraient presque pâle figure.
  • Les réseaux se forcent comme un rien et on peu pirater à peu près tout très facilement, films et séries adorent avoir un petit malin (plus rarement au féminin, en France il y eut la pimpante Pimprenelle) capable de pénétrer dans un réseau sécurisé, de forcer des accès, de remonter jusqu’à des ordinateurs maîtres à partir d’un esclave, d’espionner des caméras d’un réseau de surveillance, de faire fonctionner certains automates… Voilà qui participe à la crainte aveugle moranoïaque pour les néophytes qui se disent qu’à partir d’une simple adresse mail leurs comptes bancaires risquent d’être siphonnés et leur vie personnelle mise sur la place publique.
  • Le temps d’attente n’existe pas : tout charge instantanément, ou le plus vite possible quand il faut vraiment montrer quelque chose qui défile comme par exemple un rapprochement d’informations ou un listing défilant. On imagine sans mal la puissance de calcul colossale de ce genre de bécanes.
  • Personne n’utilise de services ou de logiciels connus du grand public, qu’il s’agisse d’un navigateur, d’une page d’accueil de fournisseur d’accès à Internet, d’un portail du service public ou encore d’un simple client e-mail. Peut-être est-ce une question de placement de produit, toujours est-il que le débutant ne reconnaîtra rien de son quotidien.
  • Les logiciels sont très avancés. Ergonomiques et modernes, graphiquement beaux, ils sont complets, fonctionnant par pop-up ou widgets pour les rapprochements photo / identité / empreinte : jamais on ne voit deux fenêtres ouvertes, ou une navigation entre deux fenêtres. Tout se fait uniquement au clic gauche, et en un seul clic s’il vous plaît ! Ces logiciels affichent d’ailleurs tout en gros, en très gros. Ainsi même à 10 mètres on peut voir ce qui se passe à l’écran.
  • Technique, ligne de code, analyse et outils informatiques restent l’apanage de quelques spécialistes. Parmi les personnages de la fiction, les rôles sont nécessairement partagés, il y a ceux qui savent s’en servir et les autres, ceux qui demandent l’information. Jamais on n’assiste à une démonstration, un apprentissage. Les outils numériques sont du ressort de spécialistes. Chasse gardée !
  • Il y a encore très peu d’usage des réseaux sociaux, mais ça devrait arriver prochainement. Les possibilités sont pourtant nombreuses pour les scénaristes: trouver une piste dans les commentaires d’un blog, regarder qui sont les friends sur Facebook et MySpace pour établir un graphe social, vérifier l’historique des conversations MSN pour identifier un réseau, analyser par stéganographie des images échangées par courrier électronique pour voir si des photos anodines ne comportent pas un message codé, découvrir un profil bis qui permet une double vie en ligne… Gageons que la présentation des nouveaux moyens de communication interpersonnels se fera sous l’angle négatif.
  • Le plus risible reste encore le son. N’importe quelle application produit de petits bruits (blip, xzzz ou encore bidibidibidi) et ce même si personne ne touche à rien et que l’ordinateur est simplement allumé en arrière plan, sans tâche de fond particulière. Un moyen d’indiquer qu’il y a une âme dans la machine ? Plus fort encore, la plupart du temps les ordinateurs qui semblent par leurs petits couinements rendre un hommage numérique à R2D2 ne sont même pas équipés de haut-parleurs…

Côté mobilité, les films et téléfilms sont également à la traîne par rapport aux pratiques déjà courantes.

  • Les sonneries de téléphone mobile, même les appareils qui manifestement des smartphones dernier cri, sont pathétiques de nullité et ressemblent à un mauvais fichier midi. Aucun personnage de fiction ne personnalise ses sonneries, mais aucun ne regarde son écran pour savoir qui appelle avant de décrocher. Et personne ne met son téléphone portable en mode vibreur.
  • Personne n’envoie d’e-mail ou ne consulte Internet depuis un téléphone mobile ou un ordinateur portable, même en 3G. Internet, c’est encore réservé à la machine posée sur le bureau. Alors que les offres commerciales existent depuis longtemps déjà… et l’usage aussi !
  • Le Wi-Fi (si on en parle, mais comme de toute façon ce n’est pas montrable à l’écran…) fonctionne toujours, les réseaux ne coupent jamais (sauf cas rare et pour les besoins du scénario).

Tout ceci paraît bien anodin, mais en réalité c’est assez gênant car petit et grand écran participent à la création d’un imaginaire collectif. Pour celui qui n’est pas historien, policier, technicien, réparateur auto, balisticien, physicien, l’image fait plus ou moins foi. Car on peut se dire légitimement, si on ne cherche pas à aller plus loin et/ou si l’on ne dispose pas des connaissances spécialisées, que c’est une reconstitution à peu près fidèle et que ça doit ressembler (ou ressemblait) à ce que l’on nous montre. Il est dommage que l’on nous présente une version faussée de l’histoire, ou de la physique dans certains cas bien particuliers, mais de toute façon cela ne nous touchera pas dans notre quotidien, d’abord parce que le voyage dans le temps ne fonctionne que dans un sens dans un même référentiel (au rythme d’une seconde par seconde), ensuite parce que les voyages dans l’espace, le tir à balles réelles ou les cascades en voiture ne concernent pas encore grand monde.

En revanche, pour ce qui est du numérique, c’est bien plus dommageable, car nous sommes dans un univers plein d’objets électroniques, où les réseaux, les télécommunications et Internet sont une réalité… au quotidien ! Pour un migrant digital, l’image qu’on lui propose des outils numériques de ces mondes virtuels (ou de cette nouvelle couche ?) est néfaste et angoissante. C’est un monde d’outlaws sans sheriffs, un univers de spécialistes qui s’y connaissent où les autres se font plumer ou dénigrer, un domaine qui tient de la magie car les choses s’y font comme par miracle et sans rapport avec d’autres univers plus grand public. Il n’y a aucune notion de limites : on trouve absolument tout, on peut toujours tout obtenir et pénétrer impunément n’importe quel réseau, rien ne demande de temps il suffit d’avoir le bon outil et la bonne technique, personne ne se heurte à des problèmes de compatibilité de formats ou d’interopérabilité.

Parce que petit et grand écran contribuent à la fabrique de nos représentations mentales de notre société et de notre histoire comme de notre présent (on dira Weltanschauung pour faire chic et briller dans les salons), il serait temps qu’ils contribuent également à vulgariser l’informatique, Internet, les réseaux sociaux et les appareils électroniques du quotidien avec davantage de fidélité à la réalité. Vulgariser au sens de démystifier, rendre populaire, faire comprendre, effectuer un peu du travail pédagogique qui manque dans les parcours scolaires. Les fictions françaises peinent déjà côté audiences en raison de scénarios planplan, de rythmes lents, d’un manque cruel de créativité dans les intrigues autant que dans les stéréotypes de personnages (faire d’un médecin toxicomane et misanthrope notre héros ? vous n’y pensez pas !) et d’un ancrage dans un proche passé intemporel (aucune référence à un événement historique daté) rassurant qui éloigne un moment le téléspectateur des turpitudes de son quotidien.

Et si on commençait à faire preuve d’ambition, de créativité, et de réalisme ? La connivence que prônent les grandes chaînes (le slogan de France 3 est : De près on se comprend mieux, la signature de la campagne publicitaire de TF1 est On se retrouve sur TF1) est encore au stade des mots. Il s’agit de s’y mettre dans les faits. Ou résumé en deux mots : moteur, action !

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http://owni.fr/2009/06/15/le-numerique-fantasme-a-l%e2%80%99ecran-retarde-sa-comprehension-et-son-adoption-par-les-migrants-digitaux/feed/ 4