OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 On achève bien les dinosaures http://owni.fr/2012/10/25/on-acheve-bien-les-dinosaures/ http://owni.fr/2012/10/25/on-acheve-bien-les-dinosaures/#comments Thu, 25 Oct 2012 16:04:07 +0000 Laurent Chemla http://owni.fr/?p=124147

Longtemps, j’ai mis sur le compte de l’incompréhension – donc de la peur – l’étrange tendance qu’ont les professionnels de la politique à intervenir en permanence pour tenter de “réguler”, “légiférer”, “contrôler” les nouvelles technologies de l’information.

De mon point de vue de simple programmeur informatique, vouloir à toutes forces modifier un logiciel parfaitement fonctionnel est incompréhensible: si la règle “If it ain’t broke, don’t fix it” était à l’origine politique, elle a été largement reprise depuis par la communauté des informaticiens flemmards dont je me réclame. C’est donc tout naturellement que je pensais naïvement qu’une telle volonté de vouloir “corriger” le comportement d’un écosystème tout à fait viable ne pouvait venir que d’une totale incompréhension de son fonctionnement.

Comme toujours, j’avais tort.

L’excellent Stéphane Bortzmeyer l’a rappelé cette année lors du non moins excellent “Pas sage en Seine” : qu’ils le comprennent ou non, on s’en fout. Ils ne savent que rarement comment ça marche, et pourquoi, mais ils savent que l’effet produit sur la société n’est pas en adéquation avec leur projet politique, et donc ils agissent de manière à limiter ou à faire disparaître cet
effet. Un point c’est tout.

De leur point de vue, le “logiciel” Internet est un virus qui modifie l’état d’une société dont ils pensent être responsables, et – de gauche comme de droite – ils se prennent pour l’antivirus qui va éradiquer le méchant.

Le réseau permet au simple citoyen – pour la première fois dans l’Histoire – d’exercer son droit à la liberté d’expression “sans considérations de frontières” ? On multipliera alors les déclarations à l’emporte-pièce : il est important de convaincre madame Michu qu’Internet, c’est le mal, pour que la censure puisse s’installer un jour avec sa bénédiction. La preuve, c’est que des pédophiles l’ont utilisé pour regarder des photos, si si, alors on vote LOPPSI2 qui permettra de filtrer tout ce qu’on veut. Na.

Internet permet à d’autres qu’au seul personnel politique d’avoir en temps réel les sondages “sortie des urnes” des élections ? Surtout ne changeons rien à la loi et rappelons ce que risquent nos médias nationaux si jamais ils osent publier ce qu’on trouvera si facilement au-delà de nos frontières. Si ça ne suffit pas, on envahira la Suisse et la Belgique. Na.

L’abondance des sources d’information rend à peu près caduque la mission de “garantir la liberté de communication audiovisuelle en France” du CSA ? Qu’à celà ne tienne : on étudiera sa fusion avec l’ARCEP, au mépris du principe de neutralité des opérateurs consacrée par le 5e alinéa de l’article L31-1 du Code des Postes et Communications. Qui contrôlerait ce qu’on peut dire en public dans ce pays, sinon ?

Twitter et les réseaux sociaux ont facilité les révolutions du printemps arabe ? Fabuleux ! Vite, demandons-lui de mettre en place des méthodes de censure géolocalisée pour que nous puissions interdire la diffusion de ce que nos lois interdisent (et tant pis si demain ces outils permettront à des dictatures de garder la main-mise sur leur population). Na.

Bref. Là comme ailleurs, je pourrais continuer longtemps à dénoncer les idioties passées et à venir. Et surtout à rappeler encore et toujours le clientélisme qui semble inscrit dans les gènes de nos représentants :

“Allô François ? C’est Laurent. Dis, y a une petite boite américaine, là, Gogole, qui fait rien qu’à m’embêter à vouloir me piquer ma publicité à moi que j’ai et qui me donne envie de dire du bien de ton boulot ! Faut faire quelque chose.”
“Ok, je vais créer une taxe sur les liens !”
“Allô Aurélie ? C’est Pascal. Dis, y a des tarés libertaires qui croient qu’ils peuvent échanger ma Culture à moi que j’ai – sans payer la gabelle qui rend heureuses les célébrités qui te soutiennent. Faut faire quelque chose.”
“D’accord, je vais élargir la taxe sur les fournisseurs d’accès pour financer ton business !”

ALLO UI C INTERNET ET VOUS N’Y POUVEZ RIEN C LA MONDIALISATION.

Et oui, messieurs mesdames : la disparition des frontières c’est bon (mangez-en) pour les riches et les puissants, mais seulement si le libre-échange ne concerne qu’eux. Quand le simple citoyen s’y met aussi, alors là, rien ne va plus. Imaginez qu’en plus ils expatrient leurs données, qu’ils utilisent des VPN pour se délocaliser là où la législation permet l’activité prohibée ici-bas, voire même, horreur, malheur, qu’ils ne soient pas commerçants mais simplement partageurs !

Ces choses là ne se font pas, monsieur. Ces choses là sont réservées à nos élites, pas au bas peuple. Quand trop de monde “optimise” sa fiscalité en achetant ses DVD là où la taxe sur la copie privée est moins délirante, quand trop de monde préfère choisir le prix le moins cher pour ses achats, “sans considérations de frontière” et sans passer par les baronnies féodales de la nation, voire même – comme dans le ridicule exemple de Coursera – quand chacun peut choisir où et quoi étudier, alors là monsieur, alors là où va-t-on ?

Internet a tendance à faire disparaître les intermédiaires, dans tous les domaines. Dans l’entreprise, le mail a remplacé la chaîne hiérarchique et chacun peut s’adresser à n’importe qui. Dans le commerce, le grossiste chinois a sa propre boutique en ligne accessible à tous. Dans la Culture, l’artiste peut diffuser directement ses oeuvres à son public. Certains l’ont bien compris et ont construit un modèle économique pour en tenir compte (Google n’est finalement qu’un énorme filtre éditorial qui permet au simple citoyen de faire le tri dans une information et une culture d’abondance). D’autres le refusent, arc-boutés sur des modèles qui les privilégiaient. Rien de plus normal.

Ce qui l’est moins (normal), c’est quand ce refus d’accorder aux autres les privilèges dont on était l’unique dépositaire atteint les combles du ridicule dans lesquels baigne le législateur depuis quelques années.

Nos grands groupes industriels du numérique sont dépassés par encore plus gros et peinent à exister face aux Apple et Amazon ? Finançons un “Cloud souverain” à partir du grand emprunt ! Et tant pis si ça concurrence quelques jeunes pousses locales, mieux adaptées au nouveau monde : ce qui compte c’est d’agréer nos vieux amis.

Nos ayants droit ne gagnent plus autant qu’avant, noyés qu’ils sont dans l’évolution des formats et de la distribution des oeuvres ? Qu’à celà ne tienne : créons une “taxe copie privée” (la plus élevée d’Europe) pour les dédommager de leur propre turpitude. Et tant pis si nos petits distributeurs locaux font faillite face à la concurrence des vendeurs de support étrangers, et tant pis si cette taxe est déclarée illégale par Bruxelles. On s’arrangera : ce qui compte c’est de protéger les représentants bien nourris de nos artistes connus (et n’oublions pas que 25% de cette taxe arrose les différents festivals de nos amis élus locaux, ça compte les amis – au fait, ça s’appelle comment quand de l’argent privé permet d’acheter des passe-droit auprès de structure publiques ?).

Lex Google pour les nuls

Lex Google pour les nuls

Si les éditeurs de presse français n'ont pas encore déclaré officiellement la guerre à Google, le manège y ressemble. ...

Nos patrons de Presse sont incapables de trouver un modèle économique cohérent sur le Web ? Eh bien taxons le Web pour les aider ! Si Google indexe leurs sites il doit les payer. S’il ne les indexe pas alors c’est qu’il les censure. Dans tous les cas il doit payer. Pourquoi ? Parce que Google rend service à la Presse mais qu’il en retire de l’argent : c’est scandaleux. Personne ne gagne d’argent dans la Presse dans ce pays, un point c’est tout. Et tant pis si la Presse française finit par ne plus être indexée et si elle disparaît du paysage numérique. Ce qui compte c’est de montrer à nos amis éditorialistes influents qu’on les aime.

La liste est si longue des incohérences, taxes, législations spécifiques, au cas par cas, en fonction des besoins, des amitiés, de la puissance de tel ou tel lobby que je pourrais continuer comme ça sur des pages et des pages. Et chaque nouvelle législature recommence, encore et encore, à chercher un angle pour rétablir des frontières à jamais disparues. Mais uniquement sur Internet, les frontières, hein ? Pas sur nos routes, là ce serait nuisible au commerce mondialisé qui a rendu tant de services à nos grands groupes délocalisateurs fiscalement optimisés.

Comme si Internet n’était pas le vrai monde, comme si le vrai monde n’était pas Internet. Nos représentants politiques sont les seuls à croire encore que le Web est virtuel, que la loi commune ne s’y applique pas, qu’il y faut une législation spéciale, des frontières archaiques et une surveillance particulière.

N’importe quoi.

La loi doit être la même pour tous. Les taxes doivent être cohérentes pour être acceptables. Imposer une TVA plus élevée sur la Presse en ligne que sur la Presse papier, par exemple, ne repose sur aucune justification. Punir davantage un pédophile parce qu’il mate des gamins sur Internet plutôt que dans un square est surréaliste (et pourtant c’est le cas: CP227-23). Bannir l’antisémitisme de Twitter mais le laisser s’étaler dans la rue est affligeant. Et en ce qui concerne nos finances, ce n’est pas mieux : OVH prouve que le cloud souverain n’est pas forcément un cloud financé par l’Etat quand il refuse le dictat d’Apple d’obéir aux lois américaines. Inutile donc de favoriser la concurrence dans ce marché déjà ultra-concurrentiel : c’est simplement contre-productif à l’époque du redressement productif.

La période est à la recherche de compétitivité dans un marché mondialisé, mais dès qu’Internet est impliqué on fait tout à l’envers. On finance des baudruches en ignorant nos réussites, on protège des modèles économiques dépassés au prix des libertés publiques, on cherche à dresser des lignes Maginot numériques tout en nous expliquant que dans le “vrai monde” on ne peut pratiquement rien faire pour Gandrange, PSA, Florange et Sanofi, et on se tire des balles fiscales dans le pied de la croissance des nouvelles technologies.

On fait n’importe quoi. On joue à contre-temps. Le libéralisme a sans doute permis une croissance sans précédent dans le commerce des biens physiques, mais la crise économique montre qu’il y a atteint ses limites. Et plutôt que d’en revenir, là où ce serait nécessaire, on voudrait le bannir là où il démontre son utilité ? Ces choix politiques sont dépassés, dépourvus de toute cohérence, sans vision d’avenir, sans autre projet que celui de favoriser ses amis. Tout le démontre.

Pitié, pitié, achevez ces dinosaures délirants. Depuis la chute de la comète Internet, ils souffrent trop.


Photo par Matt Carman [CC-byncsnd] modifié par Ophelia Noor avec son aimable autorisation.

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Squelettes, passe-murailles et modélisation 3D http://owni.fr/2011/02/08/squelettes-passe-murailles-et-modelisation-3d/ http://owni.fr/2011/02/08/squelettes-passe-murailles-et-modelisation-3d/#comments Tue, 08 Feb 2011 16:22:00 +0000 Marion Sabourdy http://owni.fr/?p=34053 Le 9 décembre dernier, je traversais le Pont des Arts en évitant les plaques de glace et me dirigeais vers l’Académie des sciences. Au programme : la présentation d’un numéro spécial « Palévol » des compte-rendus de l’Académie sur l’utilisation de la 3D en paléontologie et paléoanthropologie. L’institution avait fait les choses en grand : invitation de plusieurs journalistes, goûter, et surtout présence des académiciens Jean Dercourt et Philippe Taquet (également paléontologue et auteur), du dessinateur scientifique Didier Geffard-Kuriyama, du paléontologue Gaël Clément et du paléoanthropologue Antoine Balzeau. Tous ont présenté leurs activités ou les avancées de la 3D dans leurs disciplines. Rien de révolutionnaire donc, mais un état des lieux très intéressant.

Pour constituer cet imposant ouvrage (216 pages), D. Geffard-Kuriyama et G. Clément ont fédéré 20 contributions scientifiques indépendantes de 85 auteurs de 13 nationalités, dont la plupart ont entre 30 et 40 ans. Le résultat est une revue pluridisciplinaire (paléontologie, paléoanthropologie, archéologie, biologie), qui évoque de nombreux objets d’étude du micron au mètre (plantes, invertébrés, vertébrés, homme…), depuis – 400 millions d’années jusqu’à aujourd’hui.

Les nouveaux passe-murailles

Philippe Taquet y signe un article de synthèse intitulé L’imagerie 3D appliquée à la paléontologie et la paléoanthropologie : les nouveaux passe-murailles (PDF), en hommage à la nouvelle de Marcel Aymé (1943). Il y fait un détour historique du côté de l’anatomie comparée et de Cuvier, qui préparait le « squelette de nombreux poissons en désarticulant les os du crâne » afin d’en comprendre l’agencement. Une technique que les paléontologues ne peuvent pas imiter, eux dont les organismes étudiés sont enchâssés dans des gangues de pierre et donc souvent inaccessibles à la vue (notamment les parties internes).

Il se souvient, avec Jean Decourt, du professeur Jean-Pierre Lehman (MNHN), qui a introduit en France une nouvelle technique. Il découpait avec une scie diamantée de minces pellicules de fossiles de poissons pour les photographier et reconstituer un modèle en cire. Nouvelle technique précise, certes, mais terriblement longue (un à deux ans pour la reconstitution) et surtout destructrice, tout comme l’usage d’acides pour dissoudre la roche autour des fossiles.

L’apparition des rayons X en 1895 (néanmoins peu précis), puis leur couplage avec l’ordinateur (« computed tomography ») à partir des années 1970 ont «  permis une véritable révolution dans l’examen du vivant. L’ordinateur est capable de restituer l’ensemble d’un organisme qui a été balayé plan après plan par les faisceaux de rayon X et d’en proposer une image virtuelle en trois dimensions ». La fin de son article est une liste des structures rendues visibles (tracé des nerfs et des vaisseaux, forme de la cavité cérébrale, contours et limites de chaque os…) et de techniques (tomographie à haute résolution, rayonnement X synchrotron en contraste de phase, numérisation surfacique).

Du citron au dinosaure

D’après Gaël Clément, « quand le public voit un fossile, il pense que c’est un « fantôme » grossier de l’animal. Pourtant, un fossile n’est pas un moulage, car chaque élément de l’animal est conservé, par exemple la dentine ou les os très fins de l’endocrâne ». Et le chercheur de donner plusieurs exemples développés dans l’ouvrage. Les coupes virtuelles d’un citron carbonisé de 2700 ans ont permis de déterminer les voix de commerce du citron autour de la méditerranée dans l’Antiquité. Des fossiles de chimères de 340 millions d’années complètement écrasés ont pu être dégagés virtuellement, redressés et moulés en 3D grâce à une imprimante spéciale. La visualisation d’un placoderme de 400 millions d’années a permis de mettre en évidence des structures fossiles cachées et impossible à préparer au microscope, comme un fin réseau neurovasculaire.

Des insectes piégés dans de l’ambre fossile opaque ont pu être visualisés grâce au synchrotron de Grenoble (larve de coléoptère de moins d’un millimètre, araignée de 500 microns… tout un bestiaire effrayant digne de la science-fiction). La numérisation permet de comparer l’anatomie des fossiles avec les animaux actuels (par ex. crânes de requins) ou d’analyser des complexes anatomiques comme la morphologie de l’oreille interne à la transition entre les dinosaures et les oiseaux (audition, équilibre, locomotion…). Les ordinateurs permettent également de modéliser des contraintes mécaniques, comme les forces appliquées sur les poignets des grands vertébrés (éléphants). Les muséologues s’intéressent également à ces études pour pouvoir reconstituer les squelettes de manière la plus réaliste possible. Dernier exemple, et non des moindres : la « renaissance » des organismes fossiles par images de synthèse (muscles, peau, locomotion…) pour des films de fiction ou de vulgarisation.

La 3D : un coût, une conservation, le partage

Au-delà des prouesses techniques, plusieurs éléments ont attiré mon attention lors de cette conférence. Le premier est le coût de ces acquisitions : 500 euros pour la tomographie d’un spécimen moyen, selon Gaël Clément ! De plus, les appareils, comme le synchrotron de Grenoble, ne sont pas accessibles librement. « Il faut envoyer un projet de recherche à une commission pour qu’elle détermine si les chercheurs ont droit à un certain temps de faisceau ». Le synchrotron de Saclay a carrément dédié une de ses « lignes » aux matériaux anciens (mais n’en est pas moins surbooké). Quant au Muséum national d’Histoire naturelle, il a d’or et déjà lancé une politique d’acquisition d’appareils, mutualisés à l’ensemble de ses collections.

Le second élément est celui de la conservation de ces données numérisées. A priori, les données brutes doivent toujours accompagner l’holotype (l’objet numérisé), le modèle virtuel et la réplique 3D (parfois plusieurs fois plus grande que l’holotype). Il va sans doute falloir agrandir les étagères des muséums, déjà bien remplies (60 millions de spécimens dans celui de Paris) sans parler des serveurs ! Selon Gaël Clément, « les responsables de collection donnent en priorité leurs spécimens les plus importants ou rares » mais il reste difficile de « choisir certains spécimens car souvent, le paléontologue ne sait pas ce qu’il va trouver à l’intérieur » nuance Didier Geffard-Kuriyama.

Autre point sur lequel il serait intéressant d’avoir un retour de chercheurs, blogueurs ou journalistes : la disponibilité des données pour les chercheurs n’ayant pas participé à l’étude.Autant le dire tout de suite, les participants que j’ai interrogés ne connaissent absolument pas la licence creative commons et les données n’ont pas l’air de circuler librement dans le monde de la recherche.

Historiquement, les fossiles humains sont rares et jalousement gardés, tout comme leur numérisation, indique Antoine Balzeau, mais les choses évoluent et les paléoanthropologues commencent à partager des informations plus librement comme dans le cas de l’homme de Florès .

Au-delà du monde de la recherche, Philippe Taquet a également suggéré que ces données puissent être fournies aux pays émergents, « dont une partie de leur patrimoine qui se trouve dans nos muséums » et pourquoi pas au grand public, on peut toujours rêver…

>> Article initialement publié sur Quand les singes prennent le thé

>> Photos CC FlickR : Andres Rueda, seriykotik1070, Bolt of Blue

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Quand les ptérosaures sautaient à la perche pour s’envoler http://owni.fr/2010/11/18/quand-les-pterosaures-sautaient-a-la-perche-pour-senvoler/ http://owni.fr/2010/11/18/quand-les-pterosaures-sautaient-a-la-perche-pour-senvoler/#comments Thu, 18 Nov 2010 08:17:07 +0000 G.Berteloot http://owni.fr/?p=33413 Titre original : Sergeï Bubka, Jean Galfione et les ptérosaures

Au sein de la panoplie des grands reptiles qui peuplaient notre terre il y a quelques millions d’années, certains sont plus fascinants que d’autres. Certes, le Vélociraptor est monté en grade depuis Jurassic Park, et le T-Rex reste le monstre le plus terrifiant de l’histoire du cinéma depuis que Godzilla est passé de notre coté et qu’il a vaincu Mothra, la mite géante, mais il m’a toujours semblé que les ptérosaures avaient une place à part. En effet, pouvoir voler leur confère le pouvoir de la surprise, et la maîtrise des airs a toujours été un des regrets de l’homme. Mais ces grandes créatures ailées, n’étaient-elles pas finalement que d’anciennes autruches, maitrisant aussi bien le vol que l’étoile de mer maitrise le violoncelle?

Les docteurs Witton et Habib reviennent sur cette controverse dans PLoS ONE, en s’attaquant à la fois aux données dont on dispose et à la façon dont on les voit. En effet, le principal problème théorique que pose le vol des dinosaures, c’est le gigantisme des spécimens, certains estimant qu’ils étaient bien trop gros pour voler. Le problème, c’est que ces estimations sont faites sur la base de fossiles, et que l’on ne peut pas simplement peser les spécimens. Il faut alors estimer poids et tailles sur la base de modèles. Ainsi, les chercheurs estiment que plutôt que des individus de 6 mètres pour 12 mètres d’envergure, il faut plutôt penser à 5 mètres de haut pour 10 mètres d’envergure, ce qui réduit le poids du bestiau de moitié. Ça n’en reste pas moins un beau bébé : imaginez une girafe ailée qui vient vous picorer dans la main, ou nicher sous votre charpente. Les tests de Witton et Habib ont aussi pu estimer la résistance des os et la force de propulsion que leurs ailes pouvaient atteindre, ce qui leur permet d’affirmer que ces doux animaux étaient bien capables de voler.

Mais pouvoir voler et planer est une chose ; encore faut-il pouvoir décoller. Là encore, l’étude publiée permet de répondre à la question, en montrant les limites de certains raisonnement. En effet, quoi de plus naturel que d’aller observer les descendants de ces dinosaures, les oiseaux, et de les regarder prendre leur envol. Si les plus petits sont capables de se soulever d’un battement d’ailes, leur congénères un peu plus gros doivent s’aider d’un bond et d’un bon élan  pour espérer jouer la fille de l’air. Mais voilà, pour les sauriens, impossible d’atteindre les vitesses requises, à part peut-être en se lançant dans une descente et avec un fort vent : en bref, nos dangereux volatiles ne seraient pas beaucoup plus utiles que des parapentes.

Mais voilà, à trop vouloir prendre nos ptérodactyles pour des buses, on en oublie qu’ils ont quelques différences avec leurs descendants. En effet, leur aspect physique est assez différent, et leurs proportions ne sont pas les mêmes. Contrairement aux oiseaux, les ailes des anciens reptiles sont plus lourdes et puissantes au fur et à mesure qu’elles grandissent. Un scenario inédit a donc été proposé : les ptérosaures faisaient une sorte de saut à la perche. Ils utilisaient leurs quatre membres pour se propulser vers le haut, ce qui leur permettait de faire décoller un poids beaucoup plus important. Cela expliquerait au passage pourquoi les dinosaures volants sont bien plus gros que les oiseaux actuels. Cela montre bien qu’il faut se méfier des analogies qui coulent parfois de source…

Cliquer ici pour voir la vidéo.

>> Illustrations FlickR CC : John Kannenberg, Mark Witton

>> Article initialement publié sur Science, croyance et idées reçues

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