OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Le jour où les avions se sont arrêtés http://owni.fr/2011/09/08/avions-arretes-11-septembre-2001-world-trade-center/ http://owni.fr/2011/09/08/avions-arretes-11-septembre-2001-world-trade-center/#comments Thu, 08 Sep 2011 17:02:08 +0000 Jean-Noël Lafargue http://owni.fr/?p=78563 Le 11 septembre, les vols d’avion sont bradés. Par superstition, sans doute, de nombreux voyageurs évitent cette date. Ils ne le font pas en souvenir du coup d’État du 11 septembre 1973 au Chili, mais à cause de l’attentat du World Trade Center à New York, le 11 septembre 2001.

Une date marquante, il est vrai, autant pour le fait historique lui-même, pour les images qu’il a produites que pour tout ce que cela a déclenché ou plutôt, autorisé : des guerres moyen-orientales, des lois réprimant les libertés publiques et le sentiment général, à tort ou à raison, d’un certain déclin des pratiques démocratiques dans les pays les plus développés.

Souviens-toi, souviens-toi du 11 septembre

Je me rappelle bien ce jour là. Ma fille aînée, qui avait alors onze ans, nous avait prévenus de ce qui était pour elle un évènement incroyable : toutes les chaînes diffusaient le même programme. À ce moment, personne ne savait ce qu’il se passait, on voyait de la fumée sortir d’une des tours qu’un avion venait de percuter. La thèse de l’accident a été abandonnée quand on a vu un second avion percuter l’autre bâtiment. On a vu les tours s’effondrer, en direct, l’une après l’autre. Je ne me souviens plus trop de l’enchaînement des évènements ensuite : on a parlé d’un avion s’écrasant sur la Maison Blanche (aussitôt oublié, il s’agissait vraisemblablement d’une erreur), d’un autre sur le Pentagone, d’un autre encore qui ne répondait plus et que l’on avait dû abattre, le climat était à la panique complète, les images étaient rediffusées en boucle, on revoyait de malheureux courtiers se jeter du haut des tours jumelles dans un geste désespéré dont le sens n’est toujours pas très clair.

J’aimerais bien revoir l’ensemble de ces images, disons les deux premiers jours, pour me rappeler dans quel ordre tout ça nous est parvenu, savoir à quel moment précis le coupable a été désigné, aussi. Je me rappelle enfin que pour quelques dizaines d’heures, tous les vols civils du monde ont été annulés, permettant aux météorologues et aux observateurs de la qualité de l’air de collecter des données complètement inédites sur l’impact écologique de l’aviation. On peut minimiser l’évènement, rappeler le nombre de fois où les États-Unis ont été la cause directe ou indirecte d’un grand nombre de morts, mais il n’empêche que dans les heures qui ont suivi l’effondrement des tours, le monde s’est arrêté, on ne parlait que de ça et on ne pensait qu’à ça. Quelque chose de nouveau s’était produit, un évènement sidérant, dont on a tout de suite été certains qu’il allait changer énormément de choses à la marche du monde — et ce fut le cas.

Les coupables désignés ont été les terroristes islamistes du groupe Al Qaeda, qui s’en étaient déjà pris au World Trade Center en 1993. Je ne me rappelle pas que l’attentat du 11 septembre ait été explicitement revendiqué par Al Qaeda, mais il n’a jamais été démenti non plus. Le président de l’époque, George Bush, élu récemment dans des conditions complexes (au terme d’un recomptage des votes), dont la seule particularité notable jusqu’ici était d’être le fils du prédécesseur de son prédécesseur, connaissait une baisse régulière de son taux de popularité. En allant sur les gravats de Ground Zéro un casque de pompier sur la tête et en promettant une guerre en Afghanistan, George Bush a vu sa cote de popularité passer en quelques jours de cinquante à quatre-vingt dix pour cent : l’effroi de tous les américains, fragilisés comme jamais dans leur histoire, avait eu cet effet inespéré.

La guerre oui, mais pas sur notre territoire

Il faut dire que depuis l’attaque de Pearl Harbour , le pays n’avait jamais été attaqué sur son sol. En fait, les États-Unis, qui sont pourtant en guerre permanente depuis qu’ils existent, ne sont pas du tout habitués à être pris pour cible de manière directe. Dans la foulée de cet enthousiasme bushiste, quatre-vingts pour cent des américains soutenaient encore leur président, le 26 octobre 2001, lorsque celui-ci a fait voter le Patriot Act, un arsenal juridique qui donnait des pouvoirs étendus aux services secrets et limitait nettement les libertés publiques : droit à la vie privée, droit d’expression, droits de la défense des accusés. Ne parlons pas de l’amalgame honteux qui associait à Al Qaeda l’Iran la Corée du Nord et surtout l’Irak, victime d’une guerre aux justifications vaseuses et mensongères.

Enfin, New York, siège des Nations Unies, symbole d’une Amérique cosmopolite liée à la vieille Europe, centre du XXe siècle, a momentanément semblé vaincue par ses propres valeurs d’ouverture au monde. Et ce n’est pas un petit symbole.

De manière opportuniste, le gouvernement fédéral venait d’obtenir de nombreuses choses qu’il aurait été difficile ou impossible à obtenir autrement, et ceci avec le consentement pleutre du parti Démocrate (qui a voté le Patriot Act et accepté la guerre en Irak) mais aussi de la plupart des alliés des États-Unis, à l’exception de la France dont la résistance reste le dernier “beau geste” historique à mon avis. Il faut dire que la menace était forte, le président de la première puissance militaire n’avait pas hésité à lâcher :

Vous êtes soit avec nous, soit contre nous

La théorie du complot dans l’air du temps

La théorie d’un “choc des civilisations” que Ben Laden ou George Bush ont tenté d’imposer à l’opinion internationale semblait pourtant motivée par une raison certes civilisationnelle mais pas spécialement religieuse, je veux parler du pétrole. La famille Bush et la famille Ben Laden étaient partenaires financiers dans le domaine, et Oussama Ben Laden, renégat de sa famille, avait quand à lui été soutenu par la CIA, qu’avait justement dirigé George Bush père, pendant la guerre entre l’URSS et l’Afghanistan. La proximité amicale, historique, financière et stratégique entre différents protagonistes et les conflits d’intérêts (il suffit de penser au fait que le vice-président Dick Cheney était l’ancien directeur de la société Halliburton, titulaire de milliards de dollars de contrats avec l’armée) ou les incohérences dans la traque d’Oussama Ben Laden (jusqu’à son incompréhensible assassinat) ont donné à certains l’idée folle que la chute des tours jumelles avait été décidée et exécutée par la CIA.

C’est la fameuse “théorie du complot”, qui a été décrédibilisée par ceux qui l’ont soutenue médiatiquement et ont tenté de la démontrer, expertises “indépendantes” farfelues à l’appui, mais qui n’a pourtant rien d’absurde : après tout, il est déjà arrivé que les États-Unis attaquent leur vassaux en se faisant passer pour leurs rivaux, comme dans le cas du spectaculaire attentat de la Gare de Bologne, en 1980, organisé par des “Brigades rouges” qui étaient en réalité des néo-nazis de la loge maçonnique . Propaganda due, fournis en explosifs par Gladio, c’est à dire la branche italienne de Stay Behind, un service secret de l’Otan chargé de diffuser en Europe la peur du socialisme.


Les complots existent. Les attentats destinés à accuser d’autres que ceux qui les ont perpétrés, y compris des attentats contre soi-même, ne sont pas rares dans l’histoire : qui veut noyer son chien l’accuse d’avoir la gale, n’est-ce pas. Mais pour moi, l’hypothèse du complot d’État reste peu vraisemblable, et ce pour des questions d’image.

Pour commencer, la raison d’État est une notion qu’une majorité de gens admet à des degrés divers, mais toujours à condition que celle-ci ait un lien direct avec ce qui est censé être protégé ou conquis. On peut prendre pour exemple la question des indiens d’Amérique. Malgré quelques films tardifs d’auto-flagellation (Little Big Man, etc.), les Américains vivent assez bien avec l’idée du génocide des indigènes. Certaines parties de leur histoire les mettent un peu plus mal à l’aise. Le film Heaven’s Gate (1980), de Michael Cimino, a par exemple provoqué à sa sortie un rejet général de la part de la critique et du public, car il affirmait que les grands propriétaires terriens qui ont fondé le pays l’ont fait en assassinant les immigrants pauvres qui étaient venus chercher la bonne fortune sur le nouveau continent, et dont la présence gênait : il y a ici une dissonance entre deux mythes, celui des immenses puissances financières telles que le pays sait en produire, et celui du pays où “tout est possible” et où chacun a les mêmes chances de réussir.

La construction d’un imaginaire national

Par ailleurs, si les États-Unis adorent s’inventer des ennemis et les monter en épingle, il est en revanche insoutenable pour eux de se voir en victimes d’une authentique défaite, et je doute qu’ils prennent sciemment le risque d’en subir.

Virtuellement, au cinéma ou dans les comics, les États-Unis ont été menacés par des saboteurs nazis, par des sous-mariniers japonais, par des arabes délirants (les Lybiens dans Retour vers le futur, par exemple), ou par d’autres aliens, venus de l’espace ou de pays exotiques. Mais ces défaites, toujours dues à la fourberie de l’ennemi, ne sont jamais que provisoires.

Le cas-limite est le film Pearl Harbour, par Michael Bay (2001), qui transforme une défaite historique traumatisante en quasi-victoire, puisque l’on y voit deux valeureux pilotes détruire à eux seuls la plupart des avions japonais puis, quelques mois plus tard, aller bombarder Tokyo : le film s’achève donc sur un succès, le martyr est exclu.

La politique extérieure américaine n’est justifiée, dans l’opinion publique du pays, que par le sentiment d’être du “bon côté”, d’être mondialement enviés (et donc d’avoir toutes les raisons de se défendre, y compris préventivement) et enfin, par un sentiment d’invincibilité, du moins d’invincibilité sur leur propre sol, car ailleurs il en va autrement : les guerres de Corée, du Viêt Nam, d’Irak ou d’Afghanistan sont loin de pouvoir être qualifiées de victoires. Si la défaite extérieure est gérée par diverses fictions et par des rites (le rapatriement des soldats tombés pour le drapeau, les cérémonies dans les cimetières militaires,…), la défaite intérieure n’a pas vraiment d’image, n’est pas imaginable. Quant à l’agression, elle est toujours de l’autre côté : en se fiant exclusivement aux films de fiction, on peut imaginer que les États-Unis sont constamment attaqués par d’autres pays et ne font que répliquer légitimement à ces assauts, tandis qu’en regardant l’Histoire, on constate l’exact opposé : des siècles de guerres”préventives”, “anticipatives”, c’est à dire des guerres déclenchées par les États-Unis.

Pour accepter sa situation très singulière — celle d’un empire martial bâti sur une terre spoliée qui assure le confort d’une partie de ses citoyens au détriment du reste du monde, si l’on doit résumer —, les États-Unis ont construit assez spontanément une mythologie séduisante en laquelle ils sont les premiers à croire, qui s’exprime avant tout dans les fictions populaires et qui propose au public mondial une vision symbolique cohérente de la marche du monde. La légitimité de la domination ; la supériorité de la décision sur l’analyse ; de l’action sur la réflexion ; du “bon sens” (c’est à dire des préjugés) sur l’intelligence ; l’héroïsme des conquêtes ; l’envie ou la jalousie qu’est censé susciter le modèle américain ; etc.

Cow-boys libres et aux pieds sur terre ; président fondamentalement honnête et courageux, protection divine (parfois si bête que les traducteurs français l’éludent des adaptations de séries ou de films), étrangers hostiles mais — et c’est une assez bonne raison — dont les pays sont traités comme une aire de jeu, … Notre imagination, l’imagination planétaire, est en partie limitée, bornée par l’efficacité des scénaristes hollywoodiens.

D’autres modes de pensée existent pourtant

En même temps, les États-uniens sont aussi les premiers producteurs du contre-poison aux œuvres qui relèvent de l’idéologie américaine. Il existe chez eux une grande tradition de résistance au patriotisme forcé, à la bigoterie, à l’impérialisme de leur pays, à la société de consommation, à l’organisation patriarcale et aux académismes esthétiques. On la trouve, à des degrés divers (du rejet total de la civilisation américaine contemporaine à des revendications plus ponctuelles), dans les contre-cultures qu’on a appelées beat, freak, hippie, etc. : William Burroughs, Jack Kerouac, Allen Ginsberg, Gregory Corso, Robert Crumb, John Waters, Philip K. Dick, Bob Dylan et Joan Baez, Hakim Bey, Michael Moore. On la trouve aussi (et souvent en lien étroit avec les précédents cités), à l’université, avec des personnalités telles que Noam Chomsky, Donna Haraway, Angela Davis, Howard Zinn. On peut bien sûr remonter plus loin dans l’histoire avec des gens tels que Henry David Thoreau. Il existe aussi une forte contre-culture « de droite », parfois opposée à l’État fédéral : survivalistes et autres libertariens.

Mais tous ces mouvements plus ou moins underground souffrent d’une part de leur statut, qui fait d’eux, et parfois malgré eux, des cautions démocratiques, mais ils souffrent aussi de leur récupération médiatique : caricaturés, achetés, transformés en marques, en clichés, victimes d’hagiographies qui renvoient leur pensée et leur engagement à l’histoire ou la résument à des anecdotes,… Qu’on les ignore, qu’on fasse d’eux les épouvantails de leur propre engagement ou qu’on les affaiblisse en les célébrant ou même en continuant leur travail, ils sont toujours gérés et, finalement, à peu près inoffensifs.

Plus efficaces sont parfois les artistes qui jouent le jeu de l’entertainment et avancent en quelque sorte masqués, touchant un large public et parvenant à donner une publicité extraordinaire à des idées subversives. Bien sûr, leur attitude peut aussi être questionnée et elle est à double-tranchant : on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, certes, mais dans un message transmis sous forme de divertissement, c’est le divertissement qu’on retient le plus, et qui reçoit le consentement, pas l’éventuel message politique.

De plus, ces œuvres se perdent souvent dans la masse des films ou des séries de propagande patriotique qui, souvent, épousent le même forme et ont les mêmes qualités, et qui feignent même parfois la subversion (un président noir dans 24 heures chrono, par ex). Pourtant, j’admire beaucoup les figures de cette étonnante “contre-culture mainstream”, si on me permet cet oxymore, dans laquelle je range, à des niveaux de subversion, là encore, très divers, Matt Groening (Les Simpson, Futurama), Joss Whedon (Buffy, Angel, Firefly), Tim Burton (pour Beetlejuice, Edward Scissorhands et Mars Attack), Paul Verhoeven (pour Robocop et Starship Troopers) et même, je suis près à le défendre, James Cameron (Terminator, Aliens, Dark Angel, Avatar).

De nouvelles pistes sur l’après-11 septembre

Je voulais parler du 11 septembre 2001 et je me lance dans un discours anti-impérialiste anti-américaniste primaire qui conclut en affirmant que James Cameron est un cinéaste subversif. Parmi le déluge d’articles consacrés à cet anniversaire, je doute que quelqu’un arrive à faire plus fort que moi.

Alors le 11 septembre 2001, oui, c’est bien un évènement, parce qu’il y a beaucoup de choses derrière. Beaucoup de choses y ont mené, et beaucoup de choses en ont découlé : on n’a pas fini d’en entendre parler. Un travail que j’aimerais vraiment réaliser sur le sujet, ce serait de reprendre chaque série télévisée de l’époque, et voir comment l’attentat a modifié leur ligne politique, quel genre de situations ont été scénarisées (je pense, par exemple, aux épisodes de séries justifiant la torture par exemple), quels nouveaux personnages sont apparus, et bien sûr, quelles séries ont disparu et quelles séries sont nées à ce moment-là.

Quelques articles liés au sujet : Opérations extérieures, Mission: Impossible, L’herbe du voisin bleu du futur est toujours plus pourpre.

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Billet initialement publié sous le titre “Le jour où les avions se sont arrêtés” sur Le dernier des blogs

Illustrations: Flickr CC PaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification Joshua Schwimmer /PaternitéPas d'utilisation commerciale Brendan Loy/PaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification US Army Korea – IMCOM /PaternitéPas de modification How I See Life/PaternitéPas d'utilisation commerciale morizaPaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification Sister72

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[LABO] Oussama Ben Laden, augmenté http://owni.fr/2011/05/20/labo-oussama-ben-laden-augmente/ http://owni.fr/2011/05/20/labo-oussama-ben-laden-augmente/#comments Fri, 20 May 2011 14:33:49 +0000 Andréa Fradin et Olivier Tesquet http://owni.fr/?p=63703 Près de trois semaines après sa mort, que reste-t-il d’Oussama Ben Laden? Médiatiquement, la disparition du fondateur d’Al-Qaida, ennemi numéro un des Etats-Unis depuis dix ans, a fait l’effet d’une déflagration. Sans précédent? Pas vraiment. Quelques jours avant, le mariage princier entre William et Kate Middleton a atteint un pic d’attention similaire, avant de s’éroder à la même vitesse que le terroriste islamiste, comme le montre cette courbe établie sur Google Trends (en rouge le mariage, en bleu Ben Laden):

Dans la volonté d’être un laboratoire de R&D, OWNI s’est demandé comment redonner du sens à cet épisode, vécu sur le mode de l’ultra-temps réel. Nous avons donc développé un module de vidéo “augmentée” qui, en plus du flux principal, ajoute du contenu relatif, qu’il s’agisse d’images, de vidéos, de pages web, ou même de GIF animés.

Le prototype repose sur une base de code préexistante, ajustée à nos besoins – ajaxification des éléments connexes synchronisés sur la vidéo principale (sic).

Pour en savoir plus sur ce qu’est l’hypervidéo (pour “hyperlinked video“, ou vidéo cliquable en VF), vous pouvez également lire le billet qu’en avait fait Tristan Nitot, ou encore regarder ce qu’en avait fait Upian et Arte pour Notre poison quotidien, le documentaire de Marie-Monique Robin. Et n’hésitez pas à envoyer un mail à tech@owni.fr pour plus de précisions.

Enfin, et pour profiter pleinement de l’expérience, nous vous conseillons de naviguer directement dans l’application:

http://app.owni.fr/augmented/benladen/

L’élimination d’OBL marque la chute d’un symbole, remarquablement décrite par l’essayiste américain Greil Marcus dans L’Amérique et ses prophètes, publié en 2006. Dans un climat post-11 Septembre déjà bien consommé, il dressait ce constat sans appel:

La nation américaine: une invention qui pouvait être détruite comme elle avait été construite.

Sur le même postulat, l’administration Obama a défiguré le visage de la peur d’une balle en pleine tête, avant de jeter son corps à la mer depuis le pont d’un porte-avions stationné en mer d’Oman. Dans les heures et les jours qui ont suivi l’opération menée par les Navy Seals dans la petite bourgade pakistanaise d’Abbottabad, les États-Unis ont mis en branle un storytelling jamais effrayé par la contradiction. Ben Laden aurait été tué parce qu’il cherchait à se défendre, ce qui a été démenti; il se serait servi d’une femme comme bouclier humain, ce qui a été démenti; la photo de son cadavre devait être montrée à la presse et au grand public, ce qui a été refusé.

Avec la disparition de l’icône wahhabite, la culture populaire s’est immédiatement réappropriée l’événement, à grand renfort de détournements. Les médias ont dû gérer l’afflux d’information primaire, qu’elle provienne de la Maison-Blanche ou de Twitter. Les théories du complot ont repris du poil de la bête. C’est tout ce que nous avons essayé de visualiser, en 3 minutes – et quelques digressions.

N’hésitez pas à nous faire parvenir vos retours, à tech@owni.fr


Illustration CC FlickR: swanksalot

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La mort de Ben Laden, et des rédactions cloisonnées http://owni.fr/2011/05/10/la-mort-de-ben-laden-et-des-redactions-cloisonnees/ http://owni.fr/2011/05/10/la-mort-de-ben-laden-et-des-redactions-cloisonnees/#comments Tue, 10 May 2011 06:30:42 +0000 Benoit Raphaël http://owni.fr/?p=61962 Frédéric Filloux (Monday Note) et Felix Salmon de Reuters reviennent cette semaine sur la couverture de la mort de Ben Laden.

Ils notent deux choses :

  1. L’info vient de Twitter
  2. La plupart des journaux n’avaient pas l’info le lendemain



Voici le fil des publications :

Nous sommes le 1er mai 2011.

Au moment où les Américains entament leur raid sur le fief du leader d’Al Qaida, il se trouve un individu, Sohaib Athar, consultant, pour envoyer des messages sur Twitter via son téléphone portable. Il se trouve qu’il habite à côté… Il ne se rendra compte qu’après qu’il a en fait “couvert” en direct la mort d’Oussama. Symbole très fort de la puissance du mobile et de Twitter, et de comment l’explosion de l’usage des deux va continuer de bouleverser la couverture et le traitement de l’info. Notez bien : le tweet a été envoyé du fin fond du Pakistan…

Le traitement journalistique ensuite :

10h24 – Keith Urban, que personne ne connaissait jusqu’ici, annonce sur Twitter la mort d’Oussama Ben Laden, quelques heures après l’intervention des Navy Seals. En fait, Keith Urban est une source fiable : il est le responsable du staff de Donald Rumsfeld, l’ancien secrétaire d’État à la défense.

10h25 – le Tweet de Keith Urban est re-tweeté par un journaliste du New York Times, Brian Stelter.

Résultat :

Bizarrement, note Felix Salmon, quand Arthur Brisbane publie chronique dans le New York Times sur comment son journal a été le premier média à annoncer la mort d’Oussama Ben Laden, il omet de citer son confrère, pour lui préférer la journaliste qui a obtenu l’info de façon plus… traditionnelle disons, c’est à dire grâce à une “source”. Il écrit donc : à 10h34, une source prévient Ms Cooper de la mort de Ben Laden. L’info est sur le site à 10h40. Puis sur Twitter à 10h41. Il ne s’agit pas du tweet de Stelter, mais de celui de Zeleny, un autre confrère du journal. Schizophrénie, quand tu nous tiens…

La première leçon de cette histoire, c’est donc que sur cette info, Twitter a bien été le premier média. D’abord par un témoin, puis par une source semi-officielle, puis par les journalistes.

Le problème, c’est que les médias traditionnels ont encore du mal à le reconnaître, d’où l’exercice compliqué du chroniqueur du NYTimes, “oubliant” le tweet de son confrère parce que, sans doute, pour lui, “retweeter” ce n’est pas du journalisme. Si, M.Brisbane, retweeter c’est du journalisme ! Stelter n’a pas seulement retweeté, il a contextualisé son tweet et validé sa source. Bref, il a fait son métier de journaliste. Trop peu de rédactions savent faire une vraie veille sur Twitter, lui préférant l’AFP. Grave erreur.

Des Unes obsolètes

La deuxième leçon c’est que, évidemment, Ben Laden a eu la mauvaise idée de mourir après le bouclage de nombreux journaux, qui se sont retrouvés le lendemain avec une “Une” obsolète… Le quotidien papier, dans sa forme actuelle est un média dépassé. C’est la raison pour laquelle, notamment, les journalistes doivent tous travailler sur le numérique, pas pour le papier et un peu pour le web. Sur le numérique, d’abord, tout doit y être publié, en priorité. Puis re-mis en scène sur le papier. Le papier doit être un accessoire du numérique.

C’est au moment où Keith Urban lâche son tweet que l’on doit avoir toute la rédaction papier sur le pont pour une publication en temps réel. Pas seulement les journalistes du web. Les signatures sont essentiellement dans les rédactions papier, on le sait. Quand le monde apprend la mort de Ben Laden, les lecteurs ont besoin des journalistes des quotidiens tout de suite. Les analyses, les commentaires, les interviews doivent être publiés en temps réel. Maintenant, comme en radio ou en télé, mais avec cette capacité propre à Internet de s’étirer dans le temps et de proposer une sorte de viscosité du rythme : temps réel, puis approfondissement, sédimentation, archivage… Le web est une encyclopédie vivante et liquide de l’info.

C’est donc la rédaction entière qui doit faire le journal en ligne, pas une pauvre équipe web sous-staffée dépendante de l’AFP.

Je ne dis pas que le papier ne sert à rien, mais qu’il doit être remis à sa place, c’est un format parmi d’autres, et dans sa temporalité : il arrive après la fête. C’est d’ailleurs la grande force des magazines papier, habitués à traiter l’actualité avec le recul du rythme hebdomadaire. Ainsi le nouvel Observateur a-t-il pu publier trois jours après, 22 pages spéciales sur ce qu’il fallait comprendre de l’événement.

Après les révolutions arabes, et maintenant la mort de Ben Laden, 2011 a révélé la puissance des médias sociaux dans le traitement et la distribution de l’information. C’est loin d’être terminé.


Article initialement publié sur le site de Benoit Raphael, La Social Newsroom, sous le titre : “Mort de Ben Laden : pourquoi il faut fusionner les rédactions”.

Crédits Photo : FlickR by-nc-sa Pixel Form

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La chute d’Oussama ben Laden http://owni.fr/2011/05/03/la-chute-doussama-ben-laden/ http://owni.fr/2011/05/03/la-chute-doussama-ben-laden/#comments Tue, 03 May 2011 14:43:52 +0000 Alexandre Léchenet http://owni.fr/?p=60745 Navigation rapide

1998199920002001 – 2002 – 2003 – 2004 – 2005 – 20062007 – 2008 – 20092010
février 2011mars 2011avril 201129 avril30 avril
1er mai 14:001er mai 15:001er mai 16:001er mai 18:001er mai 19:001er mai 23:00
(toutes les heures sont celles du fuseau horaire de Washington D.C.)

Le dessous des renseignements

2007 : les services de renseignements états-uniens découvrent pour la première fois le nom du messager de Oussama Ben Laden sans parvenir à le localiser, notamment grâce à des informations obtenues de détenus à Guantanamo, publiées le 24 avril 2011 par Wikileaks.

2009 : Robert Gates, Secrétaire à la Défense, déclare que cela fait maintenant des années que toute trace de Oussama Ben Laden est perdue.

2009 : les services de renseignements identifient des zones au Pakistan où le messager et son frère ont opéré sans pouvoir définir précisément où ils vivent.

Localisation de la cache d'Oussama ben Laden

août 2010 : les services de renseignements localisent le lieu de résidence du frère, une enceinte au nord d’Islamabad, dans la ville d’Abbottabad. L’enceinte est suffisamment large et sécurisée pour pouvoir héberger une cible de plus grande valeur qu’un simple messager. C’est une résidence à un million de dollars, entourée de murs de 4 mètres 50. La NSA et la NGA, selon une note de Leon Panetta, directeur de la CIA,  dans un effort coordonné, parviennent à collecter des données et notamment le fait que la maison n’était reliée ni à l’Internet, ni au téléphone, ce qui est une preuve de plus de l’importance de la cible.

septembre 2010 : la CIA commence à travailler avec le Président Obama sur la base d’évaluations qui les amènent à penser qu’Oussama Ben Laden pourrait être dans cette enceinte. Aucune preuve visuelle ne viendra jamais confirmer cette déduction jusqu’à l’assaut.

21 janvier 2011 : Oussama Ben Laden demande à la France de faire partir ses troupes d’Afghanistan pour espérer une libération des otages dans une cassette audio diffusée par Al-Jazeera. Ce sera son dernier message publié.

mi-février 2011 : le gouvernement des États-Unis détermine que, sur la base de renseignements sains, la piste de l’enceinte protégée de Abbottabad doit être suivie agressivement et mener à des actions. La résidence se situe au Pakistan, dans l’espace aérien protégé, interdisant son survol par des drones de surveillance, qui auraient pu éveiller l’attention des habitants et qui ne pouvaient pas transporter suffisamment de munitions pour détruire la résidence.

Détails de l'enceinte hébergeant Oussama ben Laden

14 mars : le Président Obama démarre une suite de rencontres avec son National Security Council pour développer différents moyens de capturer Oussama Ben Laden. Parmi ceux-ci, le bombardement de l’enceinte avec des munitions de 900 kg est envisagé. Cette idée fut abandonnée lorsqu’ils se rendirent compte des dégâts collatéraux possibles ainsi que du fait que sous les décombres de la résidence, aucune preuve ne pourrait être fournie ni de la présence et ni du décès d’Oussama Ben Laden.

29 mars : deuxième rencontre du National Security Council

Situation de la base annexe en Virginie

7 avril : répétition par les SEAL des opérations prévues, dans une enceinte reconstituée intégralement au nord de Kaboul, en Afghanistan. Les SEAL, Sea, Air and Land, sont les forces spéciales de la Navy basées dans l’annexe de Dam Neck en Virginie. Grâce à l’action du Général McChrystal, ces unités opérationnelles sont coordonnées avec des agents de renseignements. Ils ont développé des technologies et des modes d’opérations, notamment grâce à un accès en temps réel aux bases de données biométriques fédérales permettant d’identifier les gens quasiment immédiatement.

12 avril : troisième rencontre du National Security Council

13 avril : deuxième répétition par les SEAL des opérations près de Kaboul.

19 avril : quatrième rencontre du National Security Council

28 avril : cinquième rencontre du National Security Council. Le Président demande la nuit pour faire son choix. Plus d’une centaine de personnes est au courant, pressant le Président à se décider.

29 avril : avant de s’envoler vers l’Alabama, le Président Obama autorise l’opération d’assaut grâce aux hélicoptères, l’option la plus risquée, mais celle assurant le plus de preuves. Elle est planifiée pour le samedi, puis repoussée au dimanche pour des raisons météorologiques.

30 avril, 22:15 : le Président Obama prononce un discours humoristique lors du Dîner des Correspondants Étrangers.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Lancement de la mission Geronimo

Barack Obama en situation room

1er mai, 14:00 : le Président Obama rencontre une dernière fois l’équipe de sécurité nationale pour revoir les détails de l’opération. Le but de la mission est la capture ou le meurtre d’Oussama Ben Laden.

1er mai, entre 14:00 et 15:15 : par une nuit sans lune, quatre hélicoptères MH-60 améliorés décollent probablement de la base aérienne secrète de Ghazi. La partie la plus sensible de la mission commence, étant donné que le Pakistan n’est pas prévenu et qu’il faut donc éviter leurs radars. À leur bord, une quarantaine de SEAL, les membres des forces spéciales de la Navy. Il semble que l’opération soit le fruit d’un travail entre la CIA et le Joint Special Operation Command. La présence de la CIA a été souhaitée par Barack Obama et Leon Panetta. L’équipe en question est DevGru.

Hélicoptère MH60 en démonstration

1er mai, 15:15 : l’assaut est donné. Des tirs sont échangés avec les habitants de la résidence. Oussama Ben Laden dort alors au 3e étage de la résidence. Durant l’assaut, qui a duré 38 minutes, 22 personnes seront tuées ou faites prisonnières. Aucune victime du côté militaire.

L'administration suit le déroulement des opérations en situation room

1er mai, 15:58 : Sohaib Athar annonce sur Twitter qu’un hélicoptère survole Abbottabad, ce qui est très rare selon lui. C’est un consultant en informatique qu’y s’est installé dans la région pour vivre tranquillement.

1er mai, 15:50 : on signale au Président Obama qu’Oussama Ben Laden, nom de code Geronimo, a été identifié, notamment grâce à l’aide d’une de ses femmes qui prononce son nom. “We’ve IDed Geronimo“. Le contact visuel avec Oussama Ben Laden ne dure que quelques secondes. Il est tué de deux balles dans la tête et le torse un peu plus tard durant les échanges de tirs.

Geronimo E KIA

1er mai, 16:09 : Toujours sur Twitter, Sohaib Athar rapporte une explosion assez importante à Abbottabad. Sûrement la destruction par l’armée états-unienne d’un hélicoptère ayant subi une panne électrique. Elle ne souhaitait pas que le véhicule reste en leur possession.

1er mai, vers 16:15 : Des chasseurs pakistanais, alertés par l’explosion, tentent d’intercepter les hélicoptères. Le Pakistan n’a été tenu au courant de la mission qu’à la fin de celle-ci, l’administration ayant préféré éviter les fuites en partageant trop de détails sur la mission.

1er mai, autour de 17:45 : les hélicoptères atterrissent en Afghanistan. À son bord, le corps d’Oussama Ben Laden. Il sera identifié grâce à l’ADN récupéré sur le cerveau de sa soeur, conservé depuis le décès de celle-ci à Boston, ainsi que grâce à une comparaison de son visage avec des photos grâce à des logiciels biométriques. Les hélicoptères transportent également des ordinateurs, des clés USB et des disques durs trouvés sur place destinés à être analysés.

1er mai, 19:01 : on signale au Président Obama qu’il est hautement probable qu’Oussama Ben Laden soit mort. Tout au long de l’opération, l’administration a pu suivre le déroulement depuis la Briefing’s Room.

1er mai, 22:24 : Keith Urbanh, chef de cabinet de l’ancien Secrétaire d’État Donald Rumsfeld, annonce sur Twitter :

J’ai été prévenu par une personne respectable qu’ils ont tué Oussama Ben Laden.

1er mai, dans la soirée : Barack Obama appelle Bill Clinton et George W. Bush pour leur annoncer le décès d’Oussama Ben Laden.

1er mai, 23:35 : dans une annonce télévisée, le Président Obama annonce la mort d’Oussama Ben Laden.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

2 mai, 0:40 : Sohaib Athar réalise qu’il a raconté en direct sur Twitter l’assaut sur la résidence d’Oussama Ben Laden.

Barack Obama félicite son équipe après son annonce à la télévision

2 mai, vers 1:00 : le corps d’Oussama Ben Laden, transporté jusqu’au porte-avions USS Carl Vinson, est préparé, d’après l’administration états-unienne, selon le culte musulman puis jeté à la mer. Les arguments en faveur de cet ensevelissement marin sont la difficulté de trouver un pays prêt à accueillir la dépouille ainsi que le souhait volontaire de ne pas créer un lieu de pèlerinage. Des photos du corps d’Oussama Ben Laden existeraient mais l’administration hésite encore à les rendre publiques, de même qu’une vidéo de l’ensevelissement.

Navigation rapide

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1er mai 14:001er mai 15:001er mai 16:001er mai 18:001er mai 19:001er mai 23:00
(toutes les heures sont celles du fuseau horaire de Washington D.C.)

Les débuts

30 juillet 1957 : naissance d’Oussama Ben Laden à Jeddah, en Arabie Saoudite dans une famille très nombreuse.

1979 : Oussama Ben Laden laisse tomber ses études pour rejoindre la révolution moudjahidine contre l’Armée Rouge.

11 août 1988 : Oussama Ben Laden fonde Al-Qaeda, la base en arabe.

26 février 1993 : attentat contre le World Trade Center à New-York.

août 1996 : Al-Qaeda et Oussama Ben Laden délivrent la première d’une suite de fatwas de plus en plus violentes à l’égard des États-Unis.

16 mars 1998 : un mandat d’arrêt international est émis par Interpol contre Oussama Ben Laden à la suite d’une demande de la Libye. Il sera mis à jour par l’Espagne, puis par les États-Unis.

7 août 1998 : attentats contre les ambassades des États-Unis à Dar es Salaam en Tanzanie et Nairobi au Kenya.

11 octobre 1998 : un diplomate états-unien signale à un assistant du Mollah Omar, chef des Taliban, que plus ils hébergent Oussama Ben Laden sur leur sol, plus ils seront tenus pour complices de ses crimes.

juin 1999 : Oussama Ben Laden est inscrit sur la liste des “10 Most wanted“, les dix personnes les plus recherchées pour ses liens avec les attentats contre les ambassades des États-Unis. Une récompense de 5 millions de dollars est offerte contre des informations menant à son arrestation. La récompense sera augmentée après les attentas du 11 septembre.

27 mai 2000 : le sous-secrétaire aux Affaires Étrangères Thomas Pickering remet au Ministre des Affaires Étrangères taliban un ensemble de preuves montrant les liens entre Oussama Ben Laden et l’attentat de 1998 contre l’ambassade. Les taliban rejettent ces preuves.

2 juillet 2001 : le Ministre des Affaires Étrangères taliban déclare à l’ambassadeur des États-Unis au Pakistan qu’ils considèrent toujours Oussama Ben Laden comme innocent.

Les tours du World Trade Center en feu

11 septembre 2001 : quatre avions de ligne sont détournés par des terroristes, membres du réseau Al-Qaeda. Deux d’entre eux frappent le World Trade  Center à New York, un autre le Pentagone à Washington D.C.

14 septembre 2001 : la DGSE rédige une note identifiant Oussama Ben Laden comme le principal suspect dans les attentats perpétrés le 11 septembre.

16 septembre 2001 : George W. Bush annonce le début de la War on Terror (Guerre contre le Terrorisme) et vise l’Afghanistan qui hébergerait Oussama Ben Laden. Il confirme 4 jours plus tard, dans une déclaration à la nation, qu’il soupçonne Al-Qaeda et son leader, Oussama Ben Laden d’être responsables des attentats du 11 septembre.

War on terror

7 octobre 2001 : l’Operation Enduring Freedom marque le début de la guerre en Afghanistan. Cette mission devait se nommer au départ Inifinite Justice, mais le nom a été modifié pour ne pas heurter les musulmans. Nom qui fait écho à la déclaration de Barack Obama, le 1er mai 2011, annonçant que “Justice a été faite”.

5 décembre 2001 : la Conférence de Bonn nomme un gouvernement de transition en Afghanistan.

20 décembre 2001 : la Force Internationale d’Assistance et de Sécurité est établie par le Conseil de Sécurité des Nations Unies (Résolution 1386). Menée par l’OTAN, la FIAS a pour but d’aider le gouvernement de transition d’Afghanistan à assurer la sécurité de Kaboul et des alentours.

Une grande partie des fichiers relatifs à la guerre en Afghanistan de 2004 à 2009 avaient été révélés par Wikileaks en juillet 2010. Entre 2001 et 2011, Oussama Ben Laden apparaît dans de nombreux messages vidéos à l’adresse de l’Occident, distribuant bons et mauvais points.

octobre 2004 : Al-Jazeera diffuse une vidéo dans laquelle Oussama Ben Laden déclare pour la première fois être commanditaire des attentats du 11 septembre 2001.

septembre 2006Une nouvelle vidéo montre Oussama Ben Laden en compagnie de deux terroristes morts dans l’attentat-suicide contre le World Trade Center.

- Rapport du FBI sur Oussama ben Laden [en] publié par OWNI (ainsi qu’une note de la DGSE)

- Les Services de Renseigments derrière l’arrestation d’Obama – New York Times [en]

- L’équipe secrète qui a tué ben Laden – National Journal [en]

- Quelques moments chauds avec l’équipe des Navy SEAL, Oussama ben Laden s’est caché derrière une femme pour l’utiliser comme pare-feu – ABC [en]

- photos Flickr White House, cc Hank Plank, superstarksa et Ben Laden vieilli.

réalisé grâce à l’aide précieuse de Martin Untersinger.

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L’ami caché d’Islamabad http://owni.fr/2011/05/03/lami-cache-dislamabad/ http://owni.fr/2011/05/03/lami-cache-dislamabad/#comments Tue, 03 May 2011 08:41:50 +0000 David Servenay http://owni.fr/?p=60571 Le Grand Jeu afghan va-t-il reprendre des couleurs ? La mort d’Oussama Ben Laden, dimanche 1er mai dans une opération menée par les Etats-Unis, relance les spéculations autour de la position ambiguë du Pakistan. Officiellement premier allié de Washington dans la région, le pays et ses services militaires de renseignement (Inter-Services Intelligence, ISI) n’ont cessé de souffler le chaud et le froid, protégeant les plus radicaux des islamistes.

Dans la mosquée, un centre de transmission secret

Au bal des chefs d’Etat, l’ancien président Pervez Musharaff n’a pas oublié le jeu des masques. Surtout au moment de réagir, à chaud sur le site de The Nation, à la mort annoncée d’Oussama Ben Laden :

L’Amérique entrant sur notre territoire pour y mener une opération militaire, c’est une violation de notre souveraineté. La conduite et l’exécution de cette opération (par les forces américaines) ne sont pas appropriées. Le gouvernement pakistanais aurait dû être placé dans la boucle.

Un discours nationaliste qui omet l’essentiel du double jeu mené depuis des lustres par Islamabad pour masquer une coopération aussi intense que clandestine avec les Talibans et leurs alliés d’Al Qaïda. Ce faisant, Musharaff oublie qu’en 2007, il avait dû faire appel à des unités militaires différentes de celles de l’ISI pour se débarrasser des activistes de la Mosquée rouge, au coeur de la capitale. Une opération qui avait une fois encore dévoilé les liens unissant les islamistes aux services spéciaux pakistanais, ainsi que le racontait Roger Faligot en 2007 sur Rue89 :

Sous la mosquée, un centre de transmission secret a été découvert, avec des fils tirés directement du quartier général de l’ISI voisin (dont des membres venaient fréquemment faire leurs dévotions dans cette mosquée).

Sauf à considérer que le chef d’Al Qaïda ait joui durant dix ans d’une chance extraordinaire, les autorités locales pouvaient-elles ignorer sa présence à Abbottabad dans un complexe gardé et sécurisé ? Le limogeage du général commandant l’ISI en septembre 2007 avait pourtant marqué un premier tournant dans la tentative de reprise en main du gouvernement sur cette administration de 25 000 fonctionnaires, qualifié d’état dans l’Etat.

Les services secrets n’ont pu “contenir” les militants

L’explication de cette proximité dangereuse tient aux méandres des troubles alliances nouées par les services pakistanais depuis l’occupation soviétique de l’Afghanistan dans les années 80. Deux anciens responsables de l’ISI l’avaient clairement détaillé dans une longue enquête publiée en janvier 2008 dans le New York Times :

Les deux anciens responsables de haut rang des services ont reconnu que, après le 11-Septembre, quand le président Musharraf s’est publiquement allié avec l’administration Bush, l’ISI n’a pas pu contenir les militants qu’elle avait alimentés depuis des décennies pour exercer une pression sur l’Inde et l’Afghanistan. Après avoir contribué à développer des convictions islamiques dures, l’ISI a dû lutter pour empêcher cette idéologie de se répandre.

Concrètement, la coopération clandestine avec les islamistes installés en Afghanistan donna lieu à de nombreux règlements de comptes internes :

Un autre responsable a affirmé que des dizaines d’officiers de l’ISI, qui avaient entraîné ces militants, sont devenus des sympathisants de leur cause et ont dû être chassés de l’agence. Il a affirmé que trois purges ont eu lieu depuis la fin des années 1980, et ont même concerné trois directeurs de l’ISI suspectés de sympathies avec les militants.

Dans ces conditions, difficile de croire que les forces spéciales américaines aient pu intervenir sans avertir leurs homologues… mais sans doute pas ceux de l’ISI, par crainte de fuites susceptibles de faire capoter l’opération.

Cette situation ne devrait d’ailleurs pas disparaître du jour au lendemain. On voit mal pourquoi les Pakistanais se priveraient d’un pouvoir de nuisance efficace pour affaiblir leurs voisins (Inde et Afghanistan). La manne (estimée à 2 milliards de dollars par an), tirée du trafic de pavot peut aussi expliquer la permanence de ces liens. Sans compter les pressions indirectes exercées sur les alliés occidentaux d’Islamabad. Une déclaration d’Omar Bakri, un prêcheur radical assigné à résidence à Tripoli (Liban), a voulu donner le ton à tout ceux qui s’improviseront héritiers spirituels d’OBL, en prévoyant de futures représailles en Europe:

Sans doute le martyre d’Oussama Ben Laden va donner un nouveau souffle à la nouvelle génération, car l’entreprise du jihad ne s’arrêtera pas. Nous nous attendons à des réactions de cette génération en Europe (…) Il y aura des opérations pour venger cheikh Oussama.


Logo de l’ISI CC Wikipedia.


Retrouvez notre dossier :

L’image de Une en CC pour OWNI par Marion Boucharlat

Ben Laden dans les archives des services secrets par Guillaume Dasquié

Les 300 000 morts de la guerre contre le terrorisme par Jean Marc Manach

Mort de Ben Laden : l’étrange communication de l’Élysée par Erwann Gaucher

Photoshop l’a tuer par André Gunthert

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Les 300 000 morts de la guerre contre le terrorisme http://owni.fr/2011/05/02/les-300-000-morts-de-la-guerre-contre-le-terrorisme/ http://owni.fr/2011/05/02/les-300-000-morts-de-la-guerre-contre-le-terrorisme/#comments Mon, 02 May 2011 17:08:29 +0000 Jean Marc Manach http://owni.fr/?p=60612

Les attentats du 11 septembre 2001 avaient fait 2 996 victimes, dont 343 sapeurs-pompiers, et 59 policiers, venus secourir les victimes enfermées dans les tours du World Trade Center. La guerre contre le terrorisme lancée par George W. Bush Jr a, elle, entraîné la mort d’au moins 227 000 personnes, ou plus de 300 000 selon d’autres estimations, dont 116 657 civils (51%), de 76 à 108 000 islamistes, insurgés ou talibans (34-36%), 25 297 soldats des forces loyalistes en Irak et en Afghanistan (11%), et 8 975 soldats américains, britanniques et autres nations de la coalition (3,9%).

Voir aussi la visualisation dont s’est inspirée Loguy, et le fichier contenant ces chiffres.

En se basant notamment sur les documents rendus publics par Wikileaks, le Guardian avait estimé, en octobre 2010, à 109 032 le nombre de civils et militaires tués en Irak entre 2004 et 2009, dont 66 081 civils, 23 984 ennemis, 15 196 soldats irakiens, et 3 771 soldats de la coalition.

Mais ces chiffres ne prenaient en compte que les seuls morts documentés dans les rapports de la coalition. icasualties.org a ainsi, de son côté, répertorié 4770 soldats de la coalition (dont 4452 Américains et 179 Britanniques) morts au combat, en Irak, depuis 2003, et 2441 (dont 1566 Américains, 364 Britanniques, et 56 Français) en Afghanistan, depuis 2001.

Il faut aussi y rajouter, pour l’Irak, 16 595 soldats des forces de sécurité irakiennes post-Saddam), 1764 contractants privés, 1002 Sahwa des Fils de l’Irak (force supplétive de l’armée irakienne), ainsi qu’entre 38 778 et 70 278 morts du côté soldats irakiens pro-Saddam et des insurgés.

Du côté de la guerre en Afghanistan on dénombre également plus de 7500 morts du côté des forces de sécurité afghanes, 200 au sein de l’Alliance du Nord, et plus de 38 000 talibans et insurgés.

100 000, ou 1,4 M de civils morts en Irak ?

Mais le plus grand nombre de décès est à chercher du côté des civils. Iraq Body Count a ainsi documenté entre 100 et 110 000 civils morts de façon violente, depuis 2003 (à quoi il conviendrait de rajouter 15 000 civils morts mentionnés dans les warlogs publiés par WikiLeaks).

Une étude publiée dans la revue médicale The Lancet, avait de son côté estimé à 654 965 le nombre de morts entre 2003 et 2006, soit 2,5% de la population irakienne, ce qui laisserait à penser que le chiffre serait aujourd’hui, mis à jour, de 1.455.590 morts Irakiens.

Just Foreign Policy - Morts irakiens dus a l'invasion U.S.Si les chiffres publiés dans The Lancet ont été controversés, les estimations portant sur le nombre de victimes de la guerre en Irak varient de 100 000 à plus d’un million.

En Afghanistan, le nombre de civils tués depuis 2006 ne serait “que” de 9759, dont 6269 tués par les forces anti-gouvernementales, et 2723 par la coalition ou les soldats de l’armée régulière, d’après l’ONU, à quoi il conviendrait de rajouter entre 6300 et 23 600 civils morts directement, ou indirectement, du fait de la guerre entre 2001 et 2003.

Voir, à ce sujet, cet extrait de Rethink Afghanistan documentaire de
Robert Greenwald, connu pour ses films sur Fox News ou l’administration Bush :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La guerre au terrorisme ? 1 283 Md$

Au total, la guerre au terrorisme aura coûté, depuis 2001, 1 283 milliards de dollars pour les trois programmes principaux de la guerre contre le terrorisme : l’opération Enduring Freedom en Afghanistan, l’opération Iraqi Freedom en Irak et l’opération Noble Eagle visant à renforcer la sécurité des bases militaires.

Ce dernier programme est surtout mené pendant les premières années de “la guerre contre la terreur“. Le coût de la guerre suit les grands dynamiques des deux conflits. Le désengagement irakien se répercute largement dans le budget alloué : il passe de 142,1 milliards à 95,5 milliards de dollars entre l’année fiscale 2008 à 2009 (aux États-Unis, une année fiscale correspond à la période entre octobre d’une année et septembre de l’année suivante). C’est aussi en 2010 que le budget alloué à la guerre en Afghanistan dépasse le budget pour l’Irak.

En cumulé depuis le début de chaque conflit, l’Irak a coûté 806 milliards de dollars, soit 63% du total, contre 444 milliards pour l’Afghanistan, 35% du total.

150 000 soldats US encore engagés

Dès le lendemain des attentats du 11 septembre 2001, Washington avait envahi l’Afghanistan, avec l’accord du Conseil de Sécurité des Nations-Unies, qui créa la Force Internationale d’Assistance à la Sécurité en décembre 2001. Le nombre de soldats américains présents est en constante et légère augmentation jusqu’en 2007. L’Afghanistan n’est pas une priorité, notamment à partir de mars 2003 et le début de la guerre en Irak. 150 000 soldats sont alors mobilisés, 10 fois plus qu’en Afghanistan.

En 2007, Georges W. Bush lance le “surge“, augmentation massive des troupes pour mettre fin aux violences qui ensanglantent le pays. De 132 000 en janvier 2007, le chiffre atteint 170 000 en novembre suivant. Entre l’Irak et l’Afghanistan, les États-Unis mobilisent à cette date-là 195 000 personnes, un maximum qui ne sera uniquement atteint à nouveau en août 2009.

Promesse de sa campagne électorale, Barack Obama annonce le retrait des troupes d’Irak après son élection. Entre avril 2009 et septembre 2010, le nombre de troupes engagés passe de 39 000 à 98 000, soit 2,5 fois plus. En juin 2009, la situation s’inverse entre les deux pays : les troupes déployées en Afghanistan sont plus nombreuses que les troupes au sol en Irak, conséquence du “surge” afghan et du retrait irakien.

Ces chiffres ne reflètent pas toute la réalité. En novembre 2010, à l’occasion d’une une” sur la privatisation de la guerre, OWNI avait ainsi réalisé cette visualisation sur la montée en puissance des sociétés militaires privées engagées en Irak et en Afghanistan, dont les effectifs, respectivement de 112 092 et de 95 461 (soit 207 553) dépassaient ceux des troupes militaires présents dans ces pays-là : 79 100 et 95 900, soit 175 000 “soldats réguliers” :

Avec Pierre Alonso pour les chiffres sur les troupes, et les sommes engagées.


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Ben Laden dans les archives des services secrets par Guillaume Dasquié

Mort de Ben Laden : l’étrange communication de l’Élysée par Erwann Gaucher

L’ami caché d’Islamabad par David Servenay

Photoshop l’a tuer par André Gunthert

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Ben Laden dans les archives des services secrets http://owni.fr/2011/05/02/ben-laden-archives-services-secrets/ http://owni.fr/2011/05/02/ben-laden-archives-services-secrets/#comments Mon, 02 May 2011 16:46:38 +0000 Guillaume Dasquié http://owni.fr/?p=60595 Selon la Maison Blanche, à 53 ans et après treize années de traque, Oussama Ben Laden a été tué dans une opération des services spéciaux américains, menée en territoire pakistanais. L’intervention héliportée s’est déroulée à 150 km au nord de la capitale Islamabad, dans la ville d’Abbottabad, où est installée une académie de l’armée pakistanaise. Oussama Ben Laden emporte dans la mort les secrets d’une cavale entamée après le premier mandat d’arrêt international émis par Interpol, le 16 mars 1998.

Activement recherché depuis les attentats du 11 septembre 2001, sa longévité s’explique par l’importance des réseaux qui lui étaient fidèles. Les archives des services secrets, auxquelles OWNI a eu accès, permettent de mesurer la portée de ces soutiens, et de mieux comprendre comment le chef d’Al Qaida a été perçu au fil du temps par les états-majors européens ou américains.

Des années de renseignements, pour quoi ?

Le 14 septembre 2001, trois jours après les attentats contre le World Trade Center et le Pentagone, les services secrets français de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) rédigeaient une notice biographique mettant en évidence la dimension internationale de son réseau. Voici le verbatim complet de cette note:

Elle synthétisait brièvement plusieurs années de surveillance menées pour l’essentiel par les services américains, égyptiens, jordaniens, israéliens, britanniques et français. Plus d’un an avant le 11 septembre, ceux-ci semblaient déjà disposer d’une large connaissance des relais et des soutiens d’Oussama Ben Laden. Une note de la DGSE du 24 juillet 2000 affirmait ainsi:

Les bases afghanes d’Oussama Bin Laden, si elles bénéficient de l’argent investi localement, sont également financées par les investissements réalisés par l’ex-Saoudien lors de son séjour au Soudan de 1994 à 1996. En effet, les entreprises qu’il a fondées dans ce pays lui ont permis d’acquérir son indépendance financière. Bénéficiant de l’appui de dirigeants soudanais, Oussama Bin Laden a fondé une holding industrielle au Soudan, probablement organisée autour de la société XXXXXXXXXX (…) Bin Laden est actionnaire majoritaire de ces sociétés, détenues également en partie par des investisseurs soudanais (…)

Les pays du Golfe jouent également un rôle important dans le réseau financier d’Oussama Bin Laden qui y regroupe et prélève les fonds finançant son organisation terroriste. Ces sommes sont ensuite transférées de cette zone vers le Pakistan, de banques à banques, parfois sur des comptes appartenant à des particuliers, ou d’entreprises à entreprises (…) Dubai, qui dispose de liaisons aériennes directes avec l’Afghanistan par la compagnie Ariana Airways, joue dans ce dispositif un rôle particulier. Zone importante de trafics, cet émirat est souvent cité comme point de passage ou centre logistique pour des lieutenants d’Oussama Bin Laden. Aussi son matériel de communication provient-il de ce pays. Mamdouh Mahmoud Salim, l’un des responsables financiers de Bin Laden, y aurait installé sa famille, avant son arrestation le 16 septembre 1998. Il aurait investi dans l’émirat voisin de Sharjah [NDLR: un des Emirats arabes unis].

Négociations avec les Talibans

À partir de l’année 2000, les implications politiques de ces divers soutiens ont conduit l’administration américaine de Georges W. Bush à privilégier des voies diplomatiques pour tenter d’obtenir l’arrestation d’Oussama Ben Laden. Évitant ainsi de fâcher leurs alliés du Golfe – l’Arabie Saoudite appartenait alors à la courte liste des pays qui reconnaissaient l’État des Talibans.

Des documents du département d’État américain – déclassifiés ceux-là – montrent comment les envoyés de l’administration républicaine ont préféré discuter avec les Talibans jusqu’au mois de juillet 2001, dans le but de se faire livrer Oussama Ben Laden. Alors même qu’un embargo des Nations-Unies frappait le régime:

Une synthèse du FBI accablante

Le FBI, limité dans ses investigations contre Oussama Ben Laden dans le courant de l’année 2000, devait reprendre ses travaux contre le chef d’Al Qaida juste après le 11 septembre 2001. Dans le cadre d’une opération de renseignement intitulée PENTTBOM. Le service de renseignement intérieur américain reconstituait les relations entre les réseaux d’Oussama Ben Laden et les 19 pirates de l’air à l’origine des attaques du 11 septembre 2001. De nombreux documents relatifs à cette enquête du FBI ont été rendus publics, mais souvent partiellement amputés. Ci-dessous une version exhaustive d’une synthèse datée du 5 novembre 2001:

Comme les documents des services français, cette note du FBI montre la portée des soutiens et des alliances internationales dont a profité Oussama Ben Laden pour développer son organisation – depuis la création formelle d’Al Qaida, lors d’une réunion du 11 août 1988. Des associations dans les monarchies du Golfe et en Afrique y sont également évoquées.

Jusqu’au dernier moment, il a semblé profiter de relais importants, expliquant ainsi la longévité de ses activités. Difficile en effet de penser que des membres des services secrets pakistanais de l’ISI n’étaient pas impliqués dans l’organisation de son refuge à 150 km d’Islamabad. Récemment, plusieurs notes dévoilées grâce à Wikileaks permettaient de confirmer la duplicité de l’ISI à l’égard des Occidentaux combattants Al Qaida. Tandis qu’une autre note provenant des dossiers de Guantanamo, révélée ces dernières semaines, toujours par Wikileaks, livrait le nom d’un courrier personnel de Ben Laden, Maulawi Abdal Khaliq Jan, cité dans un rapport de l’armée américaine au sujet d’un lieutenant d’Al Qaida, Abu al Libi, emprisonné à Guantanamo. Selon ce document, ce courrier avait conseillé à Abu al Libi de se déplacer vers la ville d’Abbottabad. Depuis hier, plusieurs officiels américains ont indiqué que la localisation de Ben Laden dans cette ville pakistanaise avait été rendue possible grâce à un renseignement obtenu à Guatanamo, au sujet d’un courrier d’Al Qaida.


Illustration CC flickr IceNineJon


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Les 300 000 morts de la guerre contre le terrorisme par Jean Marc Manach

Mort de Ben Laden : l’étrange communication de l’Élysée par Erwann Gaucher

L’ami caché d’Islamabad par David Servenay

Photoshop l’a tuer par André Gunthert

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Photoshop l’a tuer http://owni.fr/2011/05/02/ben-laden-photoshop/ http://owni.fr/2011/05/02/ben-laden-photoshop/#comments Mon, 02 May 2011 15:21:11 +0000 André Gunthert http://owni.fr/?p=60584

Lundi matin, lendemain de 1er mai, la France qui s’était couchée encore émue du souvenir du mariage princier se réveille en sursaut à la nouvelle de la mort de Ben Laden (voir ci-dessus).

Surchauffe dans les rédactions. Quel angle choisir pour présenter la disparition de l’ennemi public n°1, qui met fin à dix ans de traque ininterrompue? Vers 8 heures du matin, de nombreux sites de presse, suivant les suggestions visuelles de l’AFP, parent au plus pressé et montrent des soldats apprenant la nouvelle par la télévision (voir ci-dessus). Traitement minimaliste d’une news qui ne s’est pas encore vraiment concrétisée.

Mais les choses s’accélèrent avec l’apparition d’une image supposée du cadavre, diffusée par la télévision pakistanaise Geo TV, reprise en France peu après 8h par I-Télé et BFM-TV. A 8h46, Le Figaro est le premier quotidien national à reproduire sur son site une capture d’écran prise à la volée où l’image apparaît très anamorphosée :

Des chaines de télévision pakistanaises montraient lundi le visage partiellement défiguré d’un homme qu’elles présentent comme Oussama Ben Laden, tué dans une opération américaine au Pakistan, sans pouvoir cependant authentifier l’image. La photo montre un homme arborant une barbe hirsute, le visage en sang et partiellement enfoncé au niveau des orbites (voir ci-dessus).

Malgré toutes ces précautions oratoires, l’appel d’article apparaît bien en Une avec son illustration, composant avec le portrait de Barack Obama un bon résumé visuel de l’événement du jour (voir ci-dessous).

Ce choix est risqué. Comme le suggère le diaporama du Monde (voir ci-dessus), le visage du chef d’Al Quaida, dont on n’a aucun portrait récent, devrait être plus âgé, sa barbe grise, comme en témoignait une vidéo de 2004. Plutôt que de montrer l’image, même assortie des prudences du conditionnel, LeMonde.fr ou Libération.fr ont choisi de s’abstenir, en attendant de plus amples vérifications.

Mais la tentation est trop forte. Alors qu’I-télé et BFM-TV reprennent en boucle la photo du visage tuméfié (voir ci-dessus), l’AFP publie à 8h46 en tête de son choix d’images une photo d’Irakiens pointant du doigt la reprise de la photo sur un écran de télé à Bagdad. Le Parisien n’hésite plus, et affiche sur son site à 9h04 « les images du cadavre de Ben Laden », suivi à 9h24 par le Nouvel Observateur, qui l’insère en encart sur un portrait d’Obama, pour une composition proche de celle du Figaro.fr (voir ci-dessous).

Entretemps, sur Twitter, l’information se répand que cette photo serait un trucage. Rosaura Ochoa a mis en ligne sur Twitpic dès 9h un montage qui montre que le visage tuméfié est une image retouchée réalisée à partir d’un portrait de Ben Laden de 1998 par Reuters (une image qui a d’ailleurs été utilisée pour illustrer la Une du Nouvel Obs quelques minutes auparavant…). Selon Buzzfeed, il s’agit d’un fake déjà ancien. Cette image existe effectivement en de nombreux exemplaires sur internet, par exemple en illustration, datée d’avril 2009, d’un article conspirationniste affirmant que le terroriste est déjà mort (voir ci-dessous).


Je relaie à mon tour sur Twitter l’information du trucage. Le Nouvel Observateur est le premier à changer son illustration de Une, à 9h45. Averti par ses lecteurs en commentaire, LeFigaro.fr modifie l’article à 9h56, puis retire l’illustration en appel de Une. Par la grâce des mises à jour, le dérapage est effacé sans laisser de traces. Mais à 10h32, alors que l’AFP a mis à jour sa sélection d’images, I-Télé continue de diffuser la photo du prétendu cadavre (voir ci-dessus).

A la différence de la capture de Saddam Hussein, les pouvoirs publics américains n’ont pas publié les images de l’assaut ni de la mort de Ben Laden, dont le corps a été, a-t-on appris au cours de la matinée, enseveli en haute mer. Les apercevra-t-on plus tard? L’état de la dépouille risque de contredire la formule “justice est faite” utilisée par le président Obama pour qualifier l’opération. Pour l’heure, les États-Unis ne souhaitent visiblement pas favoriser le culte d’un martyr.

Mais le portrait de l’ennemi vaincu, figure habituelle de la victoire, manque. Ben Laden n’était pas n’importe quel ennemi, mais un homme traqué dont l’image s’était progressivement amenuisée, encourageant tous les fantasmes. La confirmation de sa défaite était si ardemment désirée qu’on aura pu la projeter dans un médiocre trucage, illisible à force de passer de support en support. Comme par un dernier pied de nez, c’est Photoshop qui aura fourni à l’Occident cette preuve ultime de sa victoire.


Article initialement publié sur l’Atelier des icônes, un blog de Culture Visuelle

Photo d’illustration à partir de la photo FlickR CC AttributionShare Alike Andrew Ciscel


Retrouvez notre dossier :

L’image de Une en CC pour OWNI par Marion Boucharlat

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Les 300 000 morts de la guerre contre le terrorisme par Jean Marc Manach

Mort de Ben Laden : l’étrange communication de l’Élysée par Erwann Gaucher

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Mort de Ben Laden : l’étrange communication de l’Élysée http://owni.fr/2011/05/02/mort-ben-laden-etrange-communication-elysee/ http://owni.fr/2011/05/02/mort-ben-laden-etrange-communication-elysee/#comments Mon, 02 May 2011 14:07:09 +0000 Erwann Gaucher http://owni.fr/?p=60544

Pour les victimes du 11 septembre 2001, justice est faite.

Un dialogue tiré du dernier western des frères Cohen ? Une réplique d’un film de Charles Bronson ? Non : un message laissé sur le compte Twitter officiel de l’Élysée ce lundi 2 mai un peu avant 9 heures, à propos de la mort de Ben Laden.

Que s’est-il donc passé ? Le community manager de l’Élysée se serait-il lâché ? Au service communication de la présidence, se dirait-on que sur Twitter on peut oublier la réserve habituelle de la communication officielle dans laquelle, généralement, on ne prêche pas la loi du talion ?

Même pas puisque si l’on regarde de plus près le site de l’Élysée, on se rend compte que cette phrase se retrouve dans le communiqué officiel mis en ligne :

Une étonnante conception de la justice

Serais-je donc le seul choqué lorsque je lis que la présidence de la République estime que la mort de Ben Laden permet d’affirmer que « Justice est faite » ? La conception de la justice dans un pays qui s’apprête à célébrer le 30ème anniversaire de l’abolition de la peine de mort (le 9 octobre prochain) aurait-elle évolué à ce point ?

A moins, me souffle-t-on ici ou là, qu’il ne s’agisse que d’une maladresse commise en voulant traduire les propos d’Obama ? C’est effectivement ce qui semble s’être passé, Obama ayant effectivement bien prononcé ces paroles – qui m’ont de prime abord échappé – dans son discours d’hier soir. (Au temps pour moi, et merci à ceux qui m’ont corrigé)

Malgré tout, le fond de mon billet ne change pas, et je reste très surpris de retrouver ces mots dans la réaction officielle de l’Élysée. Surtout lorsque je lis, ailleurs dans le discours d’Obama ces autres mots :

Et finalement, la semaine dernière, j’ai déterminé que nous avions suffisamment de renseignements pour agir, et ai autorisé une opération destinée à capturer Oussama Ben Laden et à le présenter devant la justice

Finalement, c’est donc le président américain, pays ayant été la victime du 11 septembre et dont plusieurs États appliquent toujours la peine de mort, qui appelait à traduire Ben Laden en justice. Pendant ce temps, en France, l’Élysée se contentait donc pour sa part d’estimer que « Justice est faite ». Non en traduisant les mots du président américain, non pas en les commentant, mais en donnant en ces quelques simples et terribles mots, son avis.

C’est tout, et c’est déjà beaucoup.


Article initialement publié sur le blog de Erwann gaucher Cross Media Consulting

Photo flickr CC Jostwinz


Retrouvez notre dossier :

L’image de Une en CC pour OWNI par Marion Boucharlat

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L’ami caché d’Islamabad par David Servenay

Photoshop l’a tuer par André Gunthert

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