OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 On achève bien les agences photo http://owni.fr/2011/07/07/on-acheve-bien-les-agences-de-photo/ http://owni.fr/2011/07/07/on-acheve-bien-les-agences-de-photo/#comments Thu, 07 Jul 2011 09:45:37 +0000 Capucine Cousin http://owni.fr/?p=72969

Tout un symbole. L’annonce a été officialisée la semaine dernière : l’agence photo Sipa Press est sur le point d’être vendue à une agence allemande, DAPD, au prix de 34 licenciements sur les 92 salariés, dont 16 des 24 photographes, d’après Le Monde. Une véritable saignée à blanc, où l’activité de photojournalisme d’une des dernières prestigieuses agences survivantes est sacrifiée. À terme, toujours d’après le quotidien, l’agence DAPD (deuxième agence de presse outre-Rhin), contrôlée par un fonds d’investissement, vise à transformer Sipa en agence filaire généraliste, donc en concurrence directe avec l’AFP et autres Reuters.

L’annonce est loin d’être anecdotique, et révèle une fois encore l’évolution (la disparition annoncée ?) dans la douleur des fleurons du photojournalisme, en déconfiture depuis une dizaine d’années, pêle-mêle face au média Internet, la montée en puissance des agences filaires, la crise de la presse, et la dégringolade des prix de la photo. Alors que la plupart des titres de presse magazine mettent fin peu à peu à leurs services photo internes.

Une annonce de mauvais augure, à la veille de l’ouverture de deux des rendez-vous photo les plus cotés pour la profession, les Rencontres de la photo d’Arles – ouvertes le 4 juillet, elles porteront sur la photo au Mexique et la guerre d’Espagne vue par Robert Capa – et le Festival Visa pour l’image de Perpignan, qui ouvrira fin août.

La dégringolade pour Sipa Presse avait commencé en 2001. Son légendaire fondateur, le volcanique photographe Gökşin Sipahioğlu, qui l’avait fondée en 1973 (allez lire cet entretien de folie réalisé en 2005 par Frédéric Joignot sur son blog), s’est alors résolu à la revendre à Sud Communications (groupe Pierre Fabre). Malgré ses 25 photographes, ses 600 correspondants, ses 500 reportages photo vendus chaque mois dans plus de 40 pays, elle affiche 2 millions d’euros de pertes en 2010.

Concurrence des agences filaires

Concurrencées par les agences d’information généralistes (dites agences filaires) comme l’AFP et AP, lâchées par une presse mag qui consacre davantage de couv’ vendeuses aux people (ou politiques peopolisés) qu’au photoreportage, les trois “A” ont toutes perdu leur indépendance, avant de déposer les objectifs photo. Quant au photojournalisme, il périclite.

Les autres agences-stars des années 70, Sygma et Gamma, sont en voie d’extinction. Sygma, fondée en 1973 par Hubert Henrotte après un conflit avec l’agence Gamma, rachetée en 1999 par le groupe américain Corbis (propriété personnelle de Bill Gates), était en cours de reconversion en avril 2001. En agence qui ne produirait plus de reportages photo, pour se concentrer sur la diffusion de ses fonds numériques.

Comme je l’écrivais alors dans cette enquête pour Les Échos : forte des fonds de 65 millions d’images issus des collections Bettmann (photos historiques, dont celles de l’agence United Press International), de la National Gallery de Londres, du photographe Yann Arthus Bertrand, et des agences Sygma (actualité), TempSport (sport) ou Stopmarket (photos d’illustration), elle ambitionnait alors de vendre sur Internet ses prestigieuses archives une fois numérisées. Avec une facture déjà douloureuse : 90 personnes, dont 42 photographes, avaient été licenciées dans le cadre d’un plan social. Las, elle a déposé le bilan en 2010, suite à un contentieux avec un de ses ex-photographes.

Gamma-Rapho sera elle aussi emportée dans le sillage de la mise en liquidation du groupe Eyedea Presse, en 2010. Créée en 1966 par des photographes dont Raymond Depardon et Jean Lattès. Le groupe de presse Hachette Filipacchi Médias (HFM) a pris 75% de participation en 1999, en misant sur la vente de ses fonds numérisés, et sur un e-commerce BtoB. Elle a été rachetée par le photographe François Lochon en avril 2010, et concentrée sur la seule vente d’archives.

Tentatives de virages numériques

Il y a bien eu des tentatives pour renouveler le photojournalisme indépendant à l’ère du numérique. En 1999, Floris de Bonneville – un des cofondateurs de Gamma – lance GlobalPhoto, qui propose alors aux agences et aux photographes indépendants de gérer la vente de leurs images, surtout dans le secteur de la presse magazine. Une manière de trouver la parade pour maintenir l’indépendance des agences, alors que Floris de Bonneville avait proposé – en vain – à Gamma, Sygma et Sipa de s’unir sur Internet. Un an après, GlobalPhoto est rachetée par PR Direct, spécialisée dans la photo d’illustration. Le projet ne semble pas avoir survécu.

En décembre 2002, même le National Geographic inaugure une stratégie de commerce en ligne et tente de se placer sur le même créneau que les agences photo, en lançant en partenariat avec IBM, un site web baptisé Ngsimages.com, dédié à la vente en ligne de son catalogue de photographies.

Alors, quel avenir pour les agences photo, face aux agences filaires géantes, telles l’AFP et Reuters, spécialisées dans la seule photo d’actualité (quitte à tirer vers le people) ? Un des seuls recours semble être la photo d’illustration. Seules les agences de photo d’illustration tirent encore leur épingle du jeu : des banques d’images en ligne gratuites ou à moins d’un dollar telles que Stock.XCHNG, ou encore Shutterstock, les magazines et autres journaux ont à disposition des photos d’amateurs ou de professionnels à des prix défiant toute concurrence.

L’agence Getty Images a tôt choisi ce virage. Fondée en 1995 à Seattle, initialement banque d’images pour agences publicitaires, elle s’est diversifiée dans la photo d’actualité à coup d’acquisitions, devenant premier fournisseur d’images (photos et vidéos) pour les agences publicitaires et groupes média. Pour contrer la concurrence d’Internet, elle acquiert en 2006 le site de vente de photos à bas prix iStockphoto, banque d’images bon marché mais de moins bonne qualité. L’agence a aussi revu ses tarifs à la baisse et proposé des ristournes sur ses photos en offrant par exemple ses photos basse résolution à seulement 49 dollars.

Je connais quelques photographes qui œuvrent en agence filaire, et s’en tirent plutôt bien (mais se contentent de faire des photos d’actu, sans trop se poser de questions, plus de reportages…), d’autres qui galèrent. Même des signatures, comme Reza, qui semble faire moins de reportages qu’avant faute de budget alloué par les magazines.

Restent quelques initiatives notables, telle l’agence britannique VII (lire “Seven”), lancée en septembre 2001 lors du Festival Visa pour l’image de Perpignan en septembre 2001. Mais un projet porté par sept pointures du photojournalisme, transfuges d’agences traditionnelles – que ce soit le président de VII Gary Knight (ex-Saba), James Nachtwey (ex-Magnum), ou la Française Alexandra Boulat (ex-Sipa – décédée depuis). Dotée d’une structure légère, l’agence opère uniquement sur Internet et mise sur une valeur ajoutée technologique. Disséminés dans différentes villes du monde, les photographes-fondateurs numérisent les sélections de leurs photos, ce qui permet de réduire les frais de gestion et d’archivage. Sans doute un des derniers vrais projets d’agence à l’ancienne, encore active, menée par des stars du photojournalisme.

On trouve aussi des collectifs désormais installés comme Tendance Floue (L’Oeil Public a fermé l’an dernier me signale un lecteur), et une fédération de pigistes comme Fede Photo. Mais pour tous, le renouveau doit inclure des activités rémunératrices – comme la publicité ou le “corporate“ pour financer les reportages. Et une patte, une personnalité face au ton photographique toujours plus standardisé des grandes agences.

Billet initialement publié sur Miscellanées sous le titre “L’agence Sipa en difficulté, dernier fleuron d’un photojournalisme qui périclite ?”

Image Flickr CC PaternitéPas d'utilisation commerciale blentley et PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales rachel a. k.

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Assises du Journalisme: l’AFP en chantier http://owni.fr/2010/11/18/assises-journalisme-2010-afp-chantier/ http://owni.fr/2010/11/18/assises-journalisme-2010-afp-chantier/#comments Thu, 18 Nov 2010 11:51:43 +0000 Marc Mentré http://owni.fr/?p=36084

Ah ! Le charme de la langue moderne. À l’AFP dans un an et demi, « nous serons capable de donner en push et pull un package d’infos en texte, photo, infographie, vidéo », dixit Philippe Massonnet, le directeur de l’information de l’agence. Ce changement de langage est-il signe d’une nouvelle approche de l’information ? Peut-être, mais dans le même temps, le même Philippe Massonnet s’empresse d’ajouter que cette vision multimédia de l’offre de l’AFP ne signifie pas pour autant la disparition du fil classique, c’est-à-dire de la bonne vieille dépêche.

Visiblement, l’AFP oscille entre le maintien d’une forme de tradition tout en cherchant à rénover son modèle et à s’ouvrir de nouveaux marchés.

Tradition, lorsque Emmanuel Hoog raconte l’épisode au cours duquel le journaliste de l’AFP en poste à Singapour a attendu une heure avant d’envoyer une dépêche à propos de l’atterrissage en urgence de l’A 380 de Quantas, « alors qu’Associated Press et Reuters avaient toutes deux déjà annoncé le crash de l’avion avec plusieurs morts. La pression sur lui [ce journaliste] était énorme. » La dépêche de l’AFP dira que l’avion s’était posé avec un problème à deux moteurs.

Une anecdote, mais visiblement importante à ses yeux, car révélatrice du fait que l’AFP tient un cap ancien, qui lui permet de se distinguer de la production courante. Pour lui, la qualité pour une agence comme l’AFP se mesure sur la longue durée [ 50 ans] et sur l’ensemble [sur le volume] de la production.

Tradition aussi dans le fait de vouloir « accompagner nos clients historiques [comprendre : les journaux français]» , même si ceux-ci représentent aujourd’hui moins de dix pour cent du chiffre d’affaires de l’agence.

Tradition enfin, dans l’affirmation que « ce qui fait la force de l’agence, c’est le fait que sur un fil [d'agence], à un endroit donné, vous recevez toute l’information du monde ».

Le changement de statut est inéluctable

Tradition encore pour les journalistes eux-mêmes qui ne devraient pas se transformer en journalistes multitâches. C’est donc le refus du “journalisme shiva” (ndrl : à 8 bras). L’AFP, explique Philippe Massonnet, refuse de s’engager dans ce modèle et de prendre ainsi « le risque d’une perte de qualité ». Seule innovation, la création d’un nouveau poste, celui de « coordinateur des réseaux sociaux ».

Mais au-delà de cette petite musique, c’est bien un profonde rénovation dont il a été question, et en premier lieu sur la question du statut.

Emmanuel Hoog est sur cette question d’une prudence de chat : « Je ne suis ni député ni sénateur et changer le statut de l’agence implique une intervention du législateur », pose-t-il en préambule. Mais à l’évidence, il souhaite un changement de statut rapide, lorsqu’il souligne que:

  • « l’agence à un dispositif de gouvernance faible », une structure qui, à l’inverse de ce qu’il a connu précédemment à l’INA, permet difficilement d’inscrire son action dans la durée,
  • le fait que le Conseil d’Administration soit majoritairement composé de ses clients constitue une source permanente de conflits d’intérêts et que cela empêche de construire une stratégie d’entreprise. En effet, « les clients demandent le meilleur service le moins cher possible », ce qui peut être antinomique avec les intérêts bien compris de l’agence.
  • les autorités européennes risquent de regarder avec attention le problème des subventions d’Etat. « Le problème se poserait différemment si nous n’étions présent que sur le marché français, mais nous sommes sur l’ensemble des marchés européens et mondiaux ». Dit autrement, ces subventions risquent de poser un problème de distorsion de concurrence dont pourrait s’emparer les concurrents de l’agence.

La rénovation de l’agence ne se limite pas à ce seul problème de gouvernance, mais aussi à l’émergence de nouveaux concurrents, comme l’agence chinoise Xinhua qui, en Afrique, offre des fils français « pas chers », comme le précise Philippe Massonnet.

Face à cela, l’AFP s’intéresse à des marchés émergents, comme le Brésil où l’Inde, où elle propose de nouveaux produits. Déjà « première agence pour le cricket », elle va proposer « une application pour téléphone mobile sur le cricket en Inde ».

… tout comme est inéluctable la création d’une offre grand public

Dans le monde arabe, l’AFP est déjà en bonne position, car 55% des journaux sont abonnés au fil AFP en langue arabe. L’idée serait de transformer ce fil, qui représente en volume environ 300 dépêches par jour [3.500/jour en français] et qui est actuellement constitué de dépêches traduites du français et de l’anglais. Il s’agirait de faire en sorte que le contenu soit produit directement dans les pays de la zone elle-même : Irak, Egypte, etc.

Dernière évolution probable, celle de la création d’une offre grand public. Emmanuel Hoog l’estime inéluctable, observant ce que font ses concurrents qui sont présents avec des sites publics d’information dans leur propre langue et qui en même temps peuvent travailler sous leur propre marque avec leurs clients. Pour lui, l’ouverture d’un site grand public n’est donc qu’une « question de temps, mais on ne peut pas dire : ‘l’AFP sur Internet, jamais‘. »

Article initialement publié sur Mediatrend

Crédit image CC Flickr Stéfan et luca.sartoni (une)

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“Twitter est une drogue dure pour les journalistes” http://owni.fr/2010/03/16/twitter-est-une-drogue-dure-pour-les-journalistes/ http://owni.fr/2010/03/16/twitter-est-une-drogue-dure-pour-les-journalistes/#comments Tue, 16 Mar 2010 10:33:36 +0000 JCFeraud http://owni.fr/?p=10138 Un rail de tweet ? Photo Foxtongue sur Flickr

Un rail de tweet ? Photo Foxtongue sur Flickr

“Est-ce que bloguer c’est tromper ?” : quand Nicolas Celic, lui-même blogueur et grand utilisateur de Twitter m’a proposé une interview tournant autour de cette question à la Thierry Ardisson, j’ai accepté sans hésiter. L’occasion d’expliquer un peu mon travail de journaliste-blogueur et de faire un bilan après six mois d’expérience tout en évoquant l’impact des nouveaux médias sociaux sur mon métier.

Twitter est en train de nous transformer en véritables junkies de l’info, bloguer c’est de l’esclavage consenti… Morceaux choisis de cet échange initialement publié sur le blog SmallTalk de l’agence 3D Communication.

Quel est l’impact des “nouveaux médias” (blogs, Twitter, agrégateurs etc…) sur vos habitudes de journaliste ?

L’explosion des médias sociaux et l’avènement de l’Internet temps réel c’est avant tout une formidable accélération pour les journalistes : nous sommes soumis à une avalanche d’infos… ou d’intox qu’il faut analyser, hiérarchiser, classer, décider de traiter ou non. Avec Facebook, Twitter, les blogs tout le monde devient producteur ou relais d’informations : notre métier c’est plus que jamais faire le filtre, le médiateur pour raconter la bonne histoire, interagir avec les lecteurs qui risquent de perdre le fil et le sens de l’actualité. L’info sur le Net est terriblement redondante et en même temps, on ne sait plus ou donner de la tête.

Pour exister dans ce flux, le journaliste doit beaucoup plus qu’hier vérifier ce qu’on lui raconte, mieux angler ses papiers, soigner l’écriture, raconter l’histoire qu’on n’a pas vu ailleurs et bien sûr sortir de vraies infos. Avec le numérique qui fait de la presse une sidérurgie 2.0, l’imprimé qui devient peu à peu obsolète, le journalisme doit aussi faire sa révolution. C’est très darwinien : évoluer, intégrer les nouvelles technologies ou mourir…

Twitter : un ami, un concurrent, une perte de temps ?

Une drogue dure ! Un journaliste du “New Yorker” a écrit un papier qui a fait le tour de la blogosphère : “Twitter is like crack for media addicts”. Je confirme. J’ai toujours un œil sur Twitter sur mon PC au journal ou chez moi, sur mon iPhone dans le métro ou au resto, du matin au soir. Mes collègues et ma famille hallucinent. Quand je pars en vacances il me faut bien deux-trois jours pour décrocher ;-) Twitter a fait passer l’info à l’ère du temps réel, c’est sans retour.

Mais avec un peu d’organisation et de recul, on peut s’en faire un formidable allié pour choisir et filtrer ses sources, s’en servir comme d’une vigie. Twitter est devenu presque plus important pour moi que les fils AFP ou Reuters car je sais qui m’alerte et quelle est sa crédibilité. On arrive assez bien à faire le tri entre l’info et la rumeur en 140 signes et il y a des articles ou des billets de blogs que je n’aurais jamais vu sans Twitter. C’est une véritable moissonneuse à liens qui a fait passer la collecte de l’info sur Internet à l’ère industrielle !
Enfin et ce n’est pas rien à l’heure où les vieux médias vacillent, Twitter est aussi un formidable accélérateur pour diffuser ses articles, faire connaître son travail, ou en chercher. Le” journaliste marque” je n’y croyais pas, ça me rebutait culturellement. Mais là encore on y vient, car les lecteurs sont demandeurs : sur Internet, ils suivent des médias mais aussi des journalistes et des blogueurs qui deviennent eux-aussi des micro-médias.

Le blog : “une révélation”

Votre blog : Un choix ? Une contrainte ? Quelle liberté dans sa ligne éditoriale ?

Une révélation. Je fais quelque chose de nouveau tous les trois ans : du quotidien, du magazine, de l’encadrement. Ça m’est tombé dessus tout d’un coup en septembre 2009 : j’avais besoin d’écrire plus freestyle, dépasser le cadre traditionnel du journal et de la rubrique high-tech/médias que je dirige. Sur mon blog, je peux essayer des tas de choses : billets d’humeur, papiers moins économiques et plus sociétaux, reportages, portraits, business stories, chroniques culturelles, débat d’idées… avec une plume forcément plus personnelle et un peu plus déliée. Je suis le metteur en scène de mon info, pour la titraille, l’illustration et surtout je n’ai pas de contrainte de place ! Contrairement à ce qu’on raconte sur Internet, il ne faut pas forcément écrire court pour être lu : il faut essayer d’écrire mieux, raconter une histoire, toucher le lecteur…

Pour ce qui est la liberté éditoriale, je ne me pose pas trop de questions tant que mon info est sérieuse, recoupée, validée. pas de rumeurs bullshit, pas de mise en cause personnelle gratuite…Comme blogueur, je ne travaille pas différemment que quand je suis journaliste aux “Échos”. Mais c’est vrai qu’en tant que citoyen-blogueur, je me permets un peu plus de donner mon avis. De toute façon, l’objectivité journalistique n’existe pas, seule compte l’honnêteté ou ce qui s’en rapproche…

Faut-il être schizophrène pour mener de front une vie de journaliste et un blog ?

Complètement schizo ! Mais j’essaie de cloisonner : à la rédac’ j’ai des responsabilités alors je pense collectif, quand je blogue je joue forcément perso. J’ai l’hémisphère droit qui pense journal et le gauche blog… sans arrière pensées ;-) Je réserve mes infos exclusives aux “Échos” qui m’emploie, et mes humeurs à Mon écran radar. Et j’écris mes billets chez moi tôt le matin avant d’aller travailler, tard le soir ou le week-end dans la mesure où ce blog ne fait pas (encore ?) partie de mes missions au journal…

Quelles sont les réactions au sein de votre rédaction depuis que vous avez lancé ce blog ?

Disons que je passe sans doute pour un drôle d’oiseau car je suis l’un des premiers journalistes à avoir lancé son blog perso aux “Échos”. Un journal, c’est un travail d’équipe mené par une collection d’égos qui se manifestent plus ou moins. Quand quelqu’un sort du rang et devient un peu son propre média, ça peut déranger certains. Mais j’ai eu bien plus d’encouragements que de reproches. Et les journalistes sentent bien aujourd’hui que c’est dans le numérique que ça se passe.

Quel est votre rapport avec vos lecteurs depuis que vous bloguez ?

J’ai enfin trouvé ce contact avec le lecteur que je recherchais depuis vingt ans : les gens réagissent, vous engueulent ou vous félicitent. Il faut répondre, argumenter. Interagir ça aide aussi à apprendre encore, à corriger ses erreurs, à améliorer un billet, à revenir sur l’info…

Ce blog dans cinq ans ? Un jouet cassé, votre activité principale, un joli souvenir ?

Mon activité principale je pense, mais sous une autre forme plus collective : je verrais bien ce blog s’ouvrir, devenir un agrégateur d’infos et de contributions. Sur Mon écran radar pourrait devenir “Sur Notre écran radar”, une sorte de réseau social journalistique que je dirigerai tel un despote éclairé ;-)

Dernière question : de quelle personnalité, vivante ou disparue, contemporaine ou non, aimeriez-vous lire le blog ?

Sans hésitation aucune : Hunter S. Thompson, l’inventeur du “gonzo journalisme”, pour sa plume hallucinée, sauvage et totalement libre. Il utilisait certaines substances pour libérer son écriture mais c’était surtout un rebelle et un poète à la fois dans sa manière de travailler. il se définissait lui-même comme journaliste et hors-la-loi ! Cela a plus de gueule que “forçats de l’info” ou ou “OS du Web” non ? Thompson est surtout connu pour l’adaptation cinématographique de “Fear and Loathing in Las Vegas” (Las Vegas Parano) mais il a écrit des textes formidables plus proches du roman journalistique que du journalisme à la chaîne que l’on connaît aujourd’hui. Il est mort en 2005 mais je rêverai de savoir ce qu’il penserait de notre époque et de son actualité.

> Billet initialement publié sur Mon écran radar

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L’auto-critique, oui, mais seulement dans le discours http://owni.fr/2010/02/17/l%e2%80%99auto-critique-oui-mais-seulement-dans-le-discours/ http://owni.fr/2010/02/17/l%e2%80%99auto-critique-oui-mais-seulement-dans-le-discours/#comments Wed, 17 Feb 2010 10:53:12 +0000 Morgane Tual http://owni.fr/?p=8387 Il est impressionnant de voir comment, dans le documentaire d’Arte « Huit journalistes en colère », les « pointures » des médias sont capables de se remettre en question. Avec des discours parfois assez justes.

Cela m’a toujours surprise. Dans la plupart des rédactions dont j’ai croisé la route, même dans les plus suivistes et critiquables, les journalistes ont souvent fait preuve d’une grande capacité de remise en question. Là où je pensais que la plupart d’entre eux consacraient l’essentiel de leur temps de cerveau à reproduire bêtement l’AFP, je me suis rendue compte qu’il existait malgré tout une lueur d’intelligence, une petite place dans les méninges consacrée à l’auto-critique.

Le plus surprenant, c’est que malgré cette réflexion, la plupart d’entre eux (d’entre nous, devrais-je dire) passent toujours l’essentiel de leur temps à bâtonner des dépêches ou à ordonner aux autres de le faire. Même si certains ne l’assument pas et dissimulent cette triste vérité à eux-mêmes sous couvert de beaux discours. En clair, les journalistes sont conscients de faire de la merde, mais ils continuent gaiement tout en se disant « ce qu’il faut, c’est arrêter de faire de la merde ».

C’est du vécu

Un exemple m’a particulièrement frappée. En faisant le tour des dépêches (évidemment), je tombe sur cette information. Un virus tout aussi dangereux qu’Ebola a été découvert en Afrique du Sud. Point de rouge clignotant sur la dépêche, pas même un léger jaune, pas de redit, juste une dépêche perdue au milieu de mille autres. J’en informe mon rédacteur en chef qui, intrigué, vérifie aussitôt sur son propre fil AFP (une information donnée par un journaliste n’est validée par ses semblables que si elle a été donnée par un membre de la sacro-sainte Trinité AFP-AP-Reuters, mais c’est un autre débat).

L’information le souffle, « c’est dingue », s’exclame-t-il. Il montre ça à un collègue, et ils s’esclaffent, tous les deux « Ce qui est hallucinant c’est qu’un truc comme ça, tout le monde s’en fout alors qu’on en fait des caisses sur la grippe A ! » Bien, même dans un des médias les plus conformistes du secteur, on est conscient de l’absurdité de certains choix éditoriaux.

Sauf que. Une fois avoir bien ri, chacun est retourné à son poste. Et aucun sujet n’a jamais vu le jour.

> Article initialement publié sur le blog de Morgane Tual

> Photo d’illustration Truthout.org sur Flickr

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« Comment rendre l’AFP à nouveau indispensable » http://owni.fr/2010/02/13/%c2%ab-comment-rendre-lafp-a-nouveau-indispensable-%c2%bb/ http://owni.fr/2010/02/13/%c2%ab-comment-rendre-lafp-a-nouveau-indispensable-%c2%bb/#comments Sat, 13 Feb 2010 10:22:35 +0000 Vincent Truffy http://owni.fr/?p=8080 Ce n’est pas un scoop, mais c’est bigrement intéressant. Bakchich publie ce matin le rapport rendu par Frédéric Filloux à Pierre Louette, PDG de l’AFP, au début du mois de février, dans lequel l’ancien directeur de la rédaction de Libération, puis de 20 minutes, chroniqueur chez Slate.fr et chez lui, se propose de répondre à la question « Comment rendre l’AFP à nouveau indispensable dans le contexte d’une information surabondante et dévalorisée ».

La formulation diverge sensiblement de celle, plus volontariste, du rapport Louette rendu presque un an plus tôt aux ministres de la Culture et du Budget intitulé « Faire de l’AFP un des leaders mondiaux de l’information à l’ère numérique ». C’est que le nouveau rapport, qui s’appesantit plus longuement sur le « produit » (l’information) et le modèle social que sur les aspects juridiques et financiers, n’est tendre ni pour l’agence ni pour ses clients.

  • «La concurrence des “sources”, plus ou moins fiables, disponibles sur l’Internet, la dévalorisation de l’actualité rendent l’agence de moins en moins indispensable dans des rédactions, elles-mêmes de plus en plus pauvres.»
  • «Les médias traditionnels sont de moins en moins exigeants, les nouveaux médias succombent au vite-fait, à l’approximation, et à l’illusion d’une possibilité infinie de corrections. Aussi effrayant que cela soit pour la démocratie, la culture dite du good-enough commence à imprégner le monde de l’information. (…) Le cheap and simple l’emporte sur la sophistication.»

L’idée (fausse) que toute l’information est de toute façon disponible en ligne bat en brèche celle, commune dans les rédactions, que les journalistes disposent toujours des agences, en filet de sécurité, pour traiter les impasses en recopiant la dépêche, pour rattraper les sujets que l’on n’a pas senti « monter », etc. Si toute l’information est disponible sur le Web, alors un agrégateur type Google News suffit bien.

L’idéologie de l’information comme processus en construction plutôt que comme produit fini (c’est la thèse popularisée par Jeff Jarvis) fait que dans l’esprit de beaucoup, il n’est plus nécessaire de disposer d’une information complète pour publier, mais qu’il suffit d’être le premier sur une information, la concurrence, les internautes, se chargeant de contredire, compléter, rebondir sur cette exclusivité.

  • « Le segment du breaking news, sur lequel les agences ont construit leur légitimité et leur modèle de revenus s’est considérablement dévalorisé au cours des cinq dernières années. (…) Les plus seniors veulent conserver l’abonnement à l’AFP pour des questions de facilité (l’urgent qui tombe sur une interface unique) et de confort (le bâtonnage de dernière minute). De leur côté, les rédacteurs plus jeunes ont leurs fils Twitter ouverts en permanence, ont paramétré des alertes sur Google ou des fils RSS qu’ils considèrent comme fiables, ce qui n’est pas sans risque pour leur support. Comme pour renforcer la tendance, les futurs journalistes sont formés à l’organisation de flux d’information personnalisés. »

Il y a peu de temps encore, les agences avaient le privilège de donner le tempo : dès qu’un fait infléchissait le cours des événements, l’agence se fendait d’un « urgent », une phrase qui annonçait aux rédactions qu’un événement, attendu ou non, était advenu. Et elles le donnaient généralement avant tout le monde. On ne compte plus désormais les cas où l’information est connue de l’ensemble des geeks des rédactions dix minutes et plus avant que le premier urgent ne « tombe sur le fil ».

  • « Lorsqu’il consulte un média en ligne, (le journaliste) dispose de pages enrichies par des liens hypertextes, renvoyant vers des articles sur le même sujet (les related stories) ou vers des sites extérieurs. Le site lui suggère des lectures complémentaires sur tous les supports possibles : texte, mais aussi infographie, vidéos, photos. La profondeur apparaît ainsi infinie. Par contraste, la dépêche est plate, aride, unidimensionnelle. »

C’est la grandeur et la faiblesse de la dépêche : un compte-rendu froid, distancié, sourcé jusqu’à la lourdeur, construit toujours de la même façon, mais surtout autonome et complète. Avec l’hypertexte, de nouvelles formes d’écriture, arborescentes, référencées, évacuant l’accessoire et la charge de la preuve ailleurs sur le Web, mêlant les formes d’expression. Bien adaptée pour être réutilisée au moindre effort dans la presse écrite, la forme traditionnelle semble désuète pour les usages sur les sites Web. Avec Living Stories, Google propose une évolution intéressante dans le sens préconisé par Frédéric Filloux.

  • « Les flux de l’agence sont perçus comme trop abondants et génèrent un déchet excessif. Le “one size fits all ” (taille unique) supposé satisfaire tous les médias, ne convient plus aux besoins spécifiques de chacun. La tarification reste alignée sur le débit unique de la “lance à incendie”. Les clients remettent donc en question ce principe, soit en réclamant des rabais irréalistes, soit en envisageant des alternatives. (…) Le principe de l’abonnement doit être revu et complété par des produits vendus “à la carte”, souvent en exclusivité. »

« Aujourd’hui, le “fil” est considéré comme une lance à incendie destinée à remplir un verre d’eau», écrit Frédéric Filloux. Dans un contexte de restriction budgétaire, les rédactions — et notamment la presse régionale — constate que l’abonnement coûte cher pour un service rendu dérisoire : sur l’information locale, l’agence est souvent en retard et moins complète que leurs propres locales; et l’information nationale ou internationale, dans un contexte de médias surabondants, n’est plus un service si différenciant qu’il justifierait le prix demandé: dans les informations générales des quotidiens régionaux, c’est finalement le tri entre tous les sujets qui a une valeur. Dès lors, l’AFP se rendrait utile si elle proposait à ses clients des offres personnalisées.

  • « On pourrait même envisager un service de base gratuit réservé aux professionnels. Il serait l’équivalent des fils Twitter de CNN ou du New York Times. Pour le client, ce flux superficiel ouvrirait sur un vaste catalogue de produits premium actualisé en permanence. »

Lors de son recrutement, Frédéric Filloux a été sévèrement critiqué par le SNJ-CGT de l’agence comme « l’homme de la gratuité »: « tout se passe comme si le journalisme de nos jours pouvait se réduire à une question de technologie. Idée qui est hélas trop courante sur les forums Internet américains fréquentés par certains de nos “penseurs AFP Mediawatch” du sixième qui n’ont comme références que des consultants prêts à tout pour répandre leurs idées sur la “mort prochaine du papier” ou “l’inéluctabilité du tout-gratuit”. » Mais cette proposition reprend plutôt l’idée que le tout-venant de l’information serait une « commodité » (un produit standardisé sans valeur ajoutée) indispensable mais ne provoquant pas l’acte d’achat. En revanche, il peut servir de « produit d’appel » pour des services qui eux seraient facturés.

  • « L ‘AFP ne doit pas se sentir en compétition avec les autres médias sur des exclusivités. Sur le marché domestique, les scoops sont le plus souvent franco-français. Ils résultent fréquemment d’une connivence excessive entre des journalistes et leurs sources, bien plus que d’un réel travail d’investigation, au final, peu pratiqué en France. »
  • L’AFP devrait « valoriser — sans excès, mais avec un peu plus de magnanimité — les exclusivités des confrères permettrait aussi à l’AFP de mettre en exergue ses propres scoops, ce qu’elle fait rarement. Il suffirait donc d’une ou plusieurs dépêches dédiées aux reprises, envoyées tôt le matin, et rassemblant selon des critères assez larges les exclusivités des confères pour régler la question. »

On reconnaît là deux reproches adressés régulièrement par les journalistes du reste de la presse à l’agence. Il suffit de rappeler le billet Mediapart, le mur du silence et le marché aux voleurs pour voir combien la double fonction de grossiste de l’information et de concurrent conduit l’agence à faire des impasses, à négliger de rappeler que certains de ses scoops étaient déjà « sortis » ailleurs dans les médias.

Sur quelques pages, en fin de document, le rapport se pique de quelques conseils à la direction sur la « gestion humaines et le pacte social » qui devraient être plus difficilement acceptés dans le contexte d’une prochaine réforme du statut de 1957 de l’agence. Le ministre de la Culture a missionné en décembre 2009 un comité d’experts dirigé par l’ancien patron de l’agence Henri Pigeat, pour travailler sur le projet élaboré par Pierre Louette et qui prévoit de transformer l’AFP en société anonyme par actions à capitaux publics.

« Aucune des évolutions envisagées dans ce rapport n’est possible sans la rénovation du pacte social de l’AFP dont la déliquescence menace l’avenir de l’agence », démarre Frédéric Filloux : « un journaliste d’Associated Press travaille entre 20% et 25% de plus en temps annualisé qu’un journaliste de l’AFP » (tout en précisant qu’« un journaliste d’AP travaille 230 jours par an. Après trois ans, il ne dispose que deux semaines de congés payés. Il lui faut attendre 20 ans d’ancienneté pour avoir 5 semaines de congés »). Il insiste sur le fait que ce constat serait partagé (« Beaucoup de journalistes de l’agence admettent qu’une durée annuelle de travail aussi faible est difficilement compatible avec une mission de collecte et de traitement de l’information — suivre le détail des sujets, renforcer son expertise, cultiver ses sources »).

En revanche, il ne s’étend pas sur la différence de rémunération d’un journaliste du siège de l’Associated Press par rapport à celui de l’AFP. Tout juste relève-t-il « un excédent de journalistes seniors »: « A la rédaction, une personne sur dix a plus de 60 ans et 42% ont plus 20 ans d’ancienneté. » Il propose donc d’instaurer « des notions de compétences, de spécialisation, de performance et y faire correspondre une politique salariale où la valeur d’un individu aura un poids spécifique plus grand que son ancienneté. »

Enfin, Frédéric Filloux se livre à un réjouissant jeu d’anticipation à terme assez court (2015). Il voit l’agence contrôlée par une fondation garantissant son indépendance. La contribution de l’Etat est ramenée à 20% (« en 2008 de 107,7 millions d’euros, soit 39,75% du chiffre d’affaires de l’agence — et l’équivalent de 1,3 fois le revenu généré par le fil général de l’agence, son service-phare ») et « le volume de dépêches et de photos a été réduit de moitié ». En contrepartie, l’agence a développé de nouveaux services, parmi lesquels on trouvera notamment (ouvrez les guillemets) :

  • AFP Media Dashboard. Cet abonnement spécifique fournit, sous une  forme visuelle et actualisée en temps réel l’état du bruit médiatique (qui parle de quel sujet, à quel moment, selon quels volumes, avec quelle tonalité, tout cela pouvant être replacé dans un contexte historique).
  • AFP Crowd Monitor. Il surveille l’état de l’opinion, au travers d’une analyse permanente d’un vaste corpus de blogs, forums, sites internet, fils RSS et Twitter, dont les contenus sont suivis en temps réel. Là encore, sous une forme visuelle et statistique, la rédaction peut suivre l’évolution d’un cycle d’information : la montée d’une polémique, son importance relative par rapport à une autre six mois plus tôt ou encore une préoccupation de fond qui prend corps dans la population (en fait dans les populations car on peut évidemment segmenter selon une multitude de critères), etc.
  • AFP Editor Assistant. Des dizaines de sujets composites (texte photo, multimédia) sont assemblés chaque jour pour des clients qui les achètent selon des modalités variables, le plus souvent à la carte et parfois aux enchères lorsqu’une commercialisation exclusive le justifie.  Tous les textes produits chez le média-client, sont passés au crible d’AFP Editor Assistant. Ainsi une note interne de la rédaction en chef définissant une couverture à venir (avec des propositions de sujets et d’angles sur un événement) sera confrontée à la base de l’AFP qui proposera du texte (features, papiers de doc), des sujets photos rassemblés dans des dossiers virtuels, des infographies construites sur des bases de données et naturellement de la vidéo.
  • AFP Data. Une trentaine de services thématiques, créés, édités, mis en forme par des statisticiens et journalistes de l’agence qui puisent dans des bases de données publiques.
  • AFP User-Generated Content Validation. Un desk d’experts internes et externes à l’agence valident et certifient l’authenticité des contenus qui circulent sur le Net.

(Fermez les guillemets)

» Billet initialement publié sur le blog de Vincent Truffy

» Image d’illustration Jessie Romaneix sur Flickr


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AFP, Xinhua: même combat! http://owni.fr/2009/08/27/afp-xinhua-meme-combat/ http://owni.fr/2009/08/27/afp-xinhua-meme-combat/#comments Thu, 27 Aug 2009 20:31:18 +0000 Nicolas Kayser-Bril http://owni.fr/?p=2874

C’est fait, l’Etat français tombe le masque et va faire de l’AFP une société officiellement étatisée. Le fleuron de l’actu à la française va rejoindre Itar-TassXinhua et Fars et devenir la plus grande agence de presse du monde financée par un gouvernement.

J’ai essayé de montrer cette dynamique vers plus d’étatisation le mois dernier avec cette petite appli.

Laurent Joffrin a souligné les dangers de cette dérive vers une AFP porte-parole du gouvernement. Mais à aucun moment il n’aborde la question du financement de l’Agence (voir son édito), qui reste pourtant à mon sens la clé expliquant son comportement.

Les blogueurs média se trompent de problème quand ils font porter le chapeau de la faible qualité de l’info sur des rédactions trop rabougries ou trop âgées. Même constat chez les universitaires, où le problème est rarement abordé (ou alors j’ai de mauvais outils de veille).

Avec internet, la question du financement de l’info par les Etats est le plus important développement média des années 2000.

La résurgence de certains nationalismes pousse à une course à l’armement médiatique. C’est à quel gouvernement aura la plus grosse chaîne en langue arabe, à qui aura le plus d’abonnés à son agence.

On aurait tord de croire que ce combat est moins dangereux que lorsqu’ils jouent à qui pisse le plus loin à coup de missiles balistiques. En s’armant de médias, les gouvernements parviennent à modifier les opinions.

La célérité avec laquelle les médias français on récupéré le discours orchestré par la chaîne iranienne Press TV lors du procès de Clotilde Reiss montre bien que peu importe la source, pourvu qu’on ait les images à temps pour le journal.

Deuxième effet de cette surenchère médiatique : Les gouvernements ont décimé le journalisme. En faussant la compétition (mais que fait la Commission ?), l’AFP est en train de couler une agence indépendante du pouvoir, dpa. La France a fièrement fait perdre à l’agence allemande 3% de son chiffre d’affaire en lui ravissant son 2e plus gros abonné,WAZ.

En ces temps de crise de la pub et du lectorat, l’arrivée d’acteurs étatisés de plus en plus agressifs promet aux médias traditionnels de se faire sortir du circuit traditionnel de l’info. Le journalisme qui consistait à faire le lien entre un acteur institutionnel et son public, par le biais de conférences de presse et de communiqués, est mort.

Il faut arrêter de se poser la question du sauvetage du journalisme. La plupart des missions que le terme englobait sont désormais effectuées par des entreprises d’Etat, qui ne se gênent pas pour biaiser l’info en faveur de leur bailleur de fonds.

Il reste des journalistes qui travaillent pour leurs lecteurs. Il y en a moins qu’avant et ils n’ont toujours pas trouvé le moyen de se financer.

Côté pile: Plus besoin de payer pour la collecte de la plupart de l’info, ce sont nos impôts qui le font. Côté face: Il faut allouer plus de ressources à la vérification de l’info et à sa mise en perspective, ce qui n’est vraiment pas le point fort des rédactions d’aujourd’hui.

Pour faire ce travail, les journalistes qui restent n’ont pas d’autre choix que de faire appel à la communauté des citoyens pour enrichir l’information. Pour conserver une voix face aux mastodontes financés par les deniers publics, les journalistes n’ont d’autre choix que d’adopter une stratégie d’anti-défense dont parlait Umair Haque l’autre jour.

L’AFP utilise un mégaphone ? Les journalistes doivent disséminer l’information auprès des million de voix du réseau. L’AFP envoie 50 journalistes sur les lieux d’un accident ? Les journalistes doivent agréger les ressources des citoyens présents sur place pour présenter un rapport crédible de la situation.

La bataille pour la maîtrise de l’info ne se joue pas au plan technique. Si nous, journalistes, voulons éviter que le paysage médiatique se transforme en un combat de Pravdas aux couleurs de Paris, Londres ou Téhéran, il nous faut repenser entièrement les mécanismes de traitement de l’information. ]]> http://owni.fr/2009/08/27/afp-xinhua-meme-combat/feed/ 2