OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Qui peut le Google +, peut le moins http://owni.fr/2011/07/01/qui-peut-le-google-peut-le-moins/ http://owni.fr/2011/07/01/qui-peut-le-google-peut-le-moins/#comments Fri, 01 Jul 2011 16:25:47 +0000 Pierre Ropert http://owni.fr/?p=72393 Google… Mail, Documents, Reader, Agenda, Traduction, Actu, Maps, Earth, Talk, Images, Calendar, Analytics, Shopping, Livres, Groupes, Takeout… Il en fallait bien un de +. Ce sera donc Google +. Le dernier né du géant du web, un réseau social rien de moins, a débarqué hier sur la toile. Après quelques échecs retentissants en matière d’innovation, Google semble avoir appris de ses erreurs en proposant un service sans l’imposer (on se rappellera Google Buzz) et qui a le mérite d’être extrêmement simple d’utilisation (contrairement à Google Wave).

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Cette fois-ci, il ne s’agit pas de se précipiter, mais bien de proposer aux intéressés de tenter la bêta Google +. A ce stade, le plus dur reste encore d’y être invité. Car malgré ce statut de service en cours de développement, théoriquement buggé et incomplet donc, les demandes d’accès ont été si nombreuses que Google s’est vu dans l’obligation de ralentir la cadence, comme l’explique Vic Gundotra, vice-président de la division Engineering pour Google :

Nous avons du clôturer les demandes d’invitations pour la nuit. La demande est dingue. Nous avons besoin de nous occuper de ça soigneusement et de façon contrôlée. Merci à tous pour votre intérêt.

Hier, sur Twitter, Google + était la principale attraction et les demandes de comptes spammaient littéralement les timelines. Même avec un service théoriquement fermé – les invitations fonctionnaient de manière assez aléatoire jeudi matin, il était possible d’inviter de nouveaux utilisateurs grâce à un petit procédé simple au possible : tout détenteur d’un compte pouvait poster un article sur l’équivalent de son mur Facebook, puis choisir de le partager non pas avec des utilisateurs déjà inscrits, mais avec des adresses gmail. Résultat : une course aux invitations effrénée pour pouvoir tester le petit dernier de Google. Les plus impatients pouvaient visionner la démo [en].

Dans Ton Cercle

Après avoir reçu le mail d’inscription ô combien convoité, il est proposé à l’utilisateur une page “Premiers pas” pour découvrir les principales options de Google +. Au passage, et si l’early adopter le souhaite, il peut synchroniser son nouveau profil avec ses comptes Youtube et Picasa utilisant la même adresse gmail. On retrouve tous les éléments propres aux réseaux sociaux sur la page du profil : timeline verticale, informations sur l’utilisateur, choix des informations à afficher, tchat incorporé – Gtalk en l’occurrence, etc…

Rien de nouveau donc, excepté une meilleure compréhension de l’utilisation actuelle des réseaux sociaux, et un service développé en conséquence grâce aux Cercles. Voilà la véritable innovation de Google +.

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Le grand défaut de Facebook est l’impossibilité (ou a minima la complexité) de la gestion des différents cercles sociaux : connaissances, proches, famille, collègues… Autant de personnes avec qui on ne désire pas partager les mêmes informations. Google + propose au contraire de faire une distinction nette en organisant ces différents groupes par cercles. Dès lors, lorsque l’on publie une information ou un article, il est proposé de ne le partager qu’avec les cercles souhaités. Les informations “potes de beuverie” resteront cantonnées à ce cercle d’amis, et ces derniers n’auront quant à eux pas à subir votre passion pour la philatélie (qui sait ?).

Le parfait contre-pied de Facebook donc, qui, par défaut, publie les données à tout le monde. Finie la pénible sélection au clic par clic des personnes dont ne veut pas qu’elles aient accès aux informations ou photos compromettantes.

L’interface ressemble en revanche à s’y méprendre à celui de Facebook, le bleu en moins. Une apparence qui permet à l’utilisateur récemment inscrit de ne pas se sentir complètement perdu. La gestion de l’information est quant à elle bien plus proche de celle de Twitter. On ne choisit pas ses abonnés (on peut les masquer ou les bloquer mais il ne s’agit pas d’un système fonctionnant sur invitation), mais on peut choisir de visualiser le flux d’informations d’une liste… ou plutôt d’un cercle.

Google + = Twitter + Facebook + Skype ?

Ce principe de cercles permet surtout à Google + d’être utilisé de deux façons bien distinctes.

Le réseau social de Google peut ainsi être utilisé de la même manière que Twitter, la limite des 140 caractères en moins. Preuve en est de la partie « Déclics » (ou Spark), qui permet de se tenir informer sur des sujets particuliers, avec une pré-sélection d’informations. On choisit un sujet (Série TV, Cinéma, Sorties VTT, Pedobear…), et les articles d’actualité sur cette cible remontent automatiquement dans le flux d’informations.

En l’état, rien ne semble configurable, mais cette partie de Google + pourrait bien être amenée à évoluer vers les Fanpages de Facebook. En mixant des Cercles de personnes soigneusement sélectionnées et les Déclics (une combinaison pour le moment impossible), Google + pourrait empiéter sur le terrain de Twitter en permettant une veille performante. Pour autant la veille sur le site de microblogging est efficace justement parce que l’information y est condensée, sans la limite de signes, le flux sur Google + pourrait rapidement devenir surchargé.

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L’autre façon d’utiliser est plus propre à Facebook. Google + s’attaque ainsi à la chasse gardée de Marc Zuckerberg : l’organisation et la communication via réseau social. Après les apéros géants Facebook, les apéros géants Google ? Le fait est qu’en la matière, les outils proposés par Google surclassent largement ceux de Facebook.

Non seulement les cercles permettent de mieux gérer des communautés, mais le tchat, en plus d’être accessible à plusieurs personnes (on peut ainsi discuter avec l’intégralité d’un cercle ou une sélection d’amis d’un simple Clique, ou Huddle en anglais),  peut déboucher sur des visioconférences incluant jusqu’à 10 personnes. Ce sont les “bulles“, un concept à mi-chemin entre Skype et Tinychat. Particulièrement apprécié de la génération accro aux réseaux sociaux, il pourrait bien être une des clés du succès de Google +.

Cet aspect de Google + est également intéressant sur un plan professionnel. Pour ne prendre que l’exemple d’Owni, qui communique énormément en interne grâce à Gtalk et par Gmail, il suffirait de créer un cercle “Owni/22mars” dans lequel poster tous les liens utiles. De la même manière, il est tout aussi facile de délocaliser une petite conférence de rédaction grâce à la visioconférence.

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Et le nouveau réseau social a encore ses petits + : les like remplacés par des “+1″ qui sauront plaire aux habitués des forums de discussion, un système de notifications largement amélioré, des albums photos esthétiques et qui regroupent l’actualité des différents cercles, et probablement d’autres surprises sous le coude que nous n’avons pas encore eu l’occasion de découvrir.

Reste à savoir si les utilisateurs s’empareront de l’outil en y voyant un Facebook +. A en juger par les premières réactions, Google + pourrait bien être le fameux Facebook killer. Mais sans une arrivée massive d’utilisateurs, il est probable qu’un destin similaire à celui de Google Wave ne l’attende : un abandon progressif succédant à un engouement rapide.

Pour éviter cet écueil, Google+ serait donc avisé de mettre en place une option de migration des profils Facebook vers sa plateforme… et surtout de permettre l’accès à des applications. Car sans Farmville et autres consœurs présentes sur le réseau social, beaucoup d’utilisateurs de Facebook seront peu enclins à migrer sur Google +.

Google +, vie privée - ?

Jusqu’ici les fils d’information sont délicieusement vierges de “Découvres qui a répondu à telle question sur toi“, “Qui consulte le plus votre profil ?“et autres applications parasites. De la même manière, les Fanpages ou la publicité sont absentes. Seules les informations partagées par les contacts sont visibles. Si le constat est agréable pour l’utilisateur, il est peu probable que la firme y trouve son compte. Il s’agit encore d’une bêta et Google + devrait évoluer vers un modèle plus rentable. Tout comme l’Android Market concurrence de plus en plus l’AppleStore, Google + risque fort de se développer de manière à concurrencer Facebook : applications, pages officielles, et publicités devraient alors être de mise. Ainsi on peut d’ores et déjà se douter de l’arrivée d’une plateforme “Google Games”, comme l’a découvert le site Stillbruch.at[en] en s’intéressant au code source de Google + :

So. So code-druggie me… of course… started poking around in the code and found the following stuff:

f={ia:b.item.ia,sa:b.sa,ga:b.ga,Cf:b.Ab.GADGET_NAME},g=e||new M,f=Vx(f,m,c)+(” sent you a gift from “+(R(f.Cf)+”.”));

and:

f={ia:b.item.ia,sa:b.sa,ga:b.ga,Cf:b.Ab.GADGET_NAME},g=e||new M,f=Vx(f,m,c)+(” invites you to play “+(R(f.Cf)+”.”));

have sent you Game invites and more from Google+ Games}=4{“

La rumeur veut que le premier de ces jeux[en] soit justement Farmville, voire un nouveau jeu de l’éditeur Zynga. Question rumeur, Google vient justement de prouver qu’elles avaient tout lieu d’être justifiées.

Outre Google Games, les informations concédées à Google par les utilisateurs du service devraient devenir rentables… exactement de la même manière qu’avec Facebook.

La question est donc de savoir si Google + réussira à s’imposer sur un marché détenu, pour l’essentiel, par deux concurrents. Le moteur de recherche a depuis longtemps cessé d’en être un. Il a vu sa présence croître sur la toile de manière quasi exponentielle. Jusqu’ici, Google s’est surtout imposé grâce à des outils innovants. En lançant Gmail, Google avait fait le pari de s’imposer sur un secteur qui n’avait pas particulièrement besoin d’un nouvel arrivant. L’avènement de l’adresse en « gmail.com » est dû pour l’essentiel aux services proposés par le géant du web, parmi lesquels Googledocs, GoogleAgenda, et autres outils rapidement devenus indispensables. Depuis, les deux dernières tentatives de Google en la matière (Wave et buzz) se sont soldées par un échec.

Dans l’immédiat Google + n’est pas exempts de bugs (la page « Déclics » est par exemple restée affichée au dessus de certains flux d’information sans que les utilisateurs puissent l’en enlever, certaines actions publiées sur le mur ont tendance à s’afficher à plusieurs reprises, etc). Mais son nouveau service a l’avantage d’avoir déjà pléthore d’outils à sa disposition. La synergie entre ces derniers assure à Google + un public conquis d’avance.

Reste une inquiétude : l’omniprésence de Google sur le web. Le « Don’t be Google » va-t-il succéder au « Don’t be evil » ?

Illustration Flickr PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales par Aray Chen

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Le vent (solaire) se lève http://owni.fr/2011/06/22/le-vent-solaire-se-leve/ http://owni.fr/2011/06/22/le-vent-solaire-se-leve/#comments Wed, 22 Jun 2011 15:19:49 +0000 Pierre Ropert http://owni.fr/?p=71126 21 décembre 2012. Le monde s’est éteint. A Paris, à New-York ou Bombay, le réseau électrique a cessé de fonctionner en moins de deux minutes. Le black-out total.

Et si l’on donnait du grain à moudre aux tenants des hypothèses apocalyptiques de 2012 ? Puisque les Mayas s’appuyaient sur les astres pour prédire leurs catastrophes, il serait logique que la fin du monde tel que nous le connaissons ait pour origine une étoile, en l’occurrence le soleil.

Si la prédiction des Mayas semble farfelue, celle du soleil comme origine de l’apocalypse est prise très au sérieux par la Nasa, comme en témoigne un rapport[en][pdf] publié en 2009. La faute à ces fameuses éruptions (ou éjections de masse coronale, de leur nom scientifique, CME en anglais), qui ont donné lieux à de superbes images le 7 juin dernier.

Cliquer ici pour voir la vidéo.


La vidéo est diffusée en accélérée.

Du plasma ionisé s’élevant dans l’espace pour revenir s’écraser à la surface du soleil. Le spectacle est superbe, et s’il a été autant relayé par les médias, c’est avant tout parce qu’il a été photographié et filmé sous de nombreux angles.

L’éruption avant la tempête… magnétique

A l’échelle du Soleil, cette éruption est relativement insignifiante. Mais ces CME ne sont pas sans conséquences pour la Terre. Constitué d’ions et d’électrons, un flux de plasma, nommé vent solaire, est projeté à travers l’espace. Des quantités monstrueuses de particules électromagnétiques, dispersées à une vitesse de 100 à 2500 kilomètres secondes, parcourent la distance qui sépare le soleil de la planète bleue en 2 à 4 jours.

Cliquer ici pour voir la vidéo.


Des boucles magnétiques en spirale, observées grâce à une lumière ultraviolette.

L’éruption du 7 juin dernier a envoyé son lot de particules électromagnétiques à travers le vide spatial. Ce nuage magnétique, en atteignant la terre, est absorbé par le bouclier magnétique terrestre. L’interaction entre la ionosphère, où circulent les ondes radio, et cet orage magnétique n’est pas sans effets : les services météorologiques chinois ont indiqué que les communications radios par ondes courtes avaient été perturbées dans le sud du pays. Rien de bien méchant donc. Au pire quelques satellites ont connu des problèmes mineurs.

La tempête de Carrington

Cette tempête géomagnétique a été classée G1 sur l’échelle de météorologie spatiale des tempêtes magnétiques [en], du National Oceanic and Atmospheric Administration [en] (NOAA), c’est-à-dire le plus faible niveau sur une échelle qui en comporte 5.

Au niveau 1, les répercussions sont relativement insignifiantes. Au cinquième échelon, elles sont en revanche bien plus dommageables. On compte ainsi deux exemples qui, par le passé, ont prouvé à quel point les tempêtes magnétiques pouvaient être à l’origine de terribles dégâts.

L'échelle de risques des tempêtes magnétiques de la NOAA.

Le premier de ces exemples est l’éruption solaire de Carrington, du nom de l’astronome qui a observé en 1859 à l’aide d’un télescope la plus grosse CME jamais enregistrée. Selon un article de la NASA [en], des habitants de Cuba ou d’Hawaï ont pu observer, probablement pour la première fois de leur vie, des aurores boréales. Elles étaient tellement intenses qu’il était possible, de nuit, de lire un journal. À l’époque, le réseau électrique était quasi inexistant mais les courants générés dans le sol ont surchargé les pylônes télégraphiques : les utilisateurs ont subi des décharges chargées d’étincelles, qui ont mis le feu au papier du télégraphe. Même le système débranché, il était toujours possible de transmettre des messages tant les lignes étaient chargées d’électricité.

À ce jour, il s’agit de la plus violente tempête géomagnétique jamais enregistrée. La raison est simple : elle s’est déroulée en deux temps. Une première éruption a envoyé un nuage électromagnétique qui a nettoyé le chemin entre le Soleil et la Terre, créant une véritable autoroute pour… la tempête électromagnétique causée par une seconde éruption. Cette dernière a atteint la Terre en 18 heures au lieu de 3 ou 4 jours. 5 % de l’ozone atmosphérique auraient été détruit lors de la tempête.

Le deuxième exemple est bien plus récent. Une seconde tempête, pourtant bien moins violente, a engendré des catastrophes qui témoignent de la fragilité des infrastructures face à ce type d’événements, à l’heure où les réseaux sont de plus en plus interdépendants (Internet, etc.). En mars 1989, une éruption solaire a créé un black-out quasi total au Québec. Les transformateurs d’Hydro-Québec, la compagnie en charge du réseau électrique, ont grillé suite à une surtension : en moins de 90 secondes, plus de 6 millions de personnes ont été plongées dans le noir. Dans le meilleur des cas, 9 heures ont été nécessaires pour que le courant soit rétabli.

A l’inverse, des orages magnétiques plus récents et classés G5, n’ont causé aucun dommage sur Terre.  En fait l’hypothèse d’un black-out total et mondial est relativement peu probable, pour plusieurs raisons :

- L’éruption solaire doit avoir lieu en direction de la terre, envoyant ainsi la majeure partie du nuage de particules magnétiques directement vers l’atmosphère terrestre

- L’incidence de la tempête magnétique dépend pour beaucoup de l’inclinaison de la terre. Habituellement ce sont les pôles qui sont les plus exposés, d’où les aurores polaires. C’est ce qui explique que seules certaines régions du monde soient touchées par des tempêtes magnétiques. La Terre est plus exposée lors des équinoxes (22 mars ou 22 septembre), lorsque son inclinaison par rapport au soleil la rend plus vulnérable à l’arrivée d’une tempête magnétique.

Le bouclier magnétique terrestre absorbe le nuage électromagnétique.

Scénario catastrophe

Dans le rapport financé par la NASA [en][pdf] publié en 2009 par l’Académie nationale américaine des sciences (NAS), des chercheurs s’interrogent sur les dangers d’une éruption solaire de la même ampleur que celle de Carrington.

Outre les troubles de communications, le dysfonctionnement des satellites et des GPS, c’est surtout l’interdépendance des réseaux qui inquiète le Comité sur l’impact sociétal et économique des événements météorologiques spatiaux extrêmes (Committee on the Societal and Economic Impacts of Severe Space Weather Events) :

L’énergie électrique est la clé de voûte de notre société moderne, dont dépendent presque toutes les infrastructures et services

Dès lors, le réseau est particulièrement vulnérable aux conditions météorologiques spatiales :

Une répétition de la tempête de Carrington causerait d’importantes perturbations sociales et économiques.

Si certains problèmes pourraient être réglés dès la fin de la tempête (les transmissions radios à nouveaux possibles par exemple), plusieurs semaines ou mois seraient nécessaires pour réparer les centaines -voire milliers- de transformateurs électriques endommagés en raison d’une surtension électrique… Les appareils électriques branchés au mauvais moment seraient tout simplement hors d’usage.

En l’absence d’électricité, la situation deviendrait vite ingérable : absence de chauffage ou de réfrigération, manque de nourriture (dû à des défaillance de distribution de l’alimentation), et surtout absence d’eau potable, qui, dans les grandes villes, ne sera plus acheminée en haut des immeubles.

Paradoxalement, les pays moins développés s’en sortiraient mieux que les pays développés, du fait d’une faible dépendance à ce genre d’équipements.

Ce scénario catastrophe n’a pas grand chose à envier aux films apocalyptiques régulièrement diffusés sur nos écrans. D’où ce rapport, dont l’objectif est d’inciter à la mise en place d’infrastructures capables de résister à ces éruptions solaires. Mais en l’absence d’une menace concrète et prévisible, il est difficile d’inciter à de nouveaux comportements.

Deux fois tous les mille ans

Car le risque reste faible. Des éruptions de la même intensité que celle qui a provoqué la tempête magnétique de Carrington en 1859 n’ont lieu que deux fois par millénaire, lors des cycles d’activité du soleil. Notre étoile fonctionne en effet sur des cycles d’activité d’une durée de 11 ans. C’est lors de ces phases qu’on observe les tâches et éruptions solaires les plus importantes. Actuellement, l’activité de notre étoile va aller croissante jusqu’en 2014, avec des CME plus importantes que celles du 7 juin dernier.

Pas de panique cependant, le soleil devrait entrer prochainement dans une période d’hibernation, avec à la clé une très faible activité. Au point que des scientifiques se questionnent sur son influence sur le climat terrestre (une légère baisse de température en perspective, mais pas de quoi non plus contrecarrer le réchauffement climatique), faisant craindre un nouveau “Minimum de Maunder“, une époque où le climat d’Europe et d’Amérique du Nord a valu à cette époque le surnom de petit âge glaciaire. Cette période correspondait justement à une diminution du nombre de tâches solaires.

La météorologie spatiale, et plus particulièrement le soleil, a une influence non négligeable sur la Terre. Reste que cette science n’est pas encore capable d’estimer avec précision les évènements solaires à venir. Mais pas de panique, même les prédictions Maya ont été réevaluées : la fin du monde n’aurait pas lieu en 2012 mais en 2116. Qu’il s’agisse d’une éruption solaire ou non, cela laisse un peu de temps.


Photos Flickr CC Paternité par NASA Goddard Photo and Video, PaternitéPas d'utilisation commerciale par -AX-, Wikimedia Commons Magnetosphere rendition

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La science aussi a son point Godwin: le syndrome de Galilée http://owni.fr/2011/05/29/la-science-aussi-a-son-point-godwin-le-syndrome-de-galilee/ http://owni.fr/2011/05/29/la-science-aussi-a-son-point-godwin-le-syndrome-de-galilee/#comments Sun, 29 May 2011 12:30:00 +0000 Pierre Ropert http://owni.fr/?p=64833 En matière d’argumentation, tout est affaire de point G. Non pas celui d’une éventuelle source de plaisirs suprêmes, mais bien celui du point de non retour lors d’un débat argumenté. Au fameux point Godwin succède ainsi son versant scientifique, le syndrome de Galilée.

Et pourtant elle tourne.

Galilée a beau ne jamais avoir prononcé ces mots (la phrase est apocryphe), il n’en a pas moins été condamné à la prison à vie pour ses théories. Au début du XVIIe siècle, l’astronome italien s’emploie à démontrer que l’Univers ne tourne pas autour de la Terre, mais que c’est au contraire la Terre qui tourne autour du soleil. Une définition qui convient peu à l’Église, persuadée de l’immuabilité de la planète bleue dans un univers en mouvement. Contraint de renier ses travaux, mais reconnu depuis à titre posthume, Galilée devient le symbole du génie incompris.

À ce génie mis au ban auraient donc succédé certaines sommités parmi lesquelles Jacques Benveniste, Claude Allègre, Éric Zemmour (pourtant loin d’être un scientifique), etc. Après tout, si Galilée était un incompris, pourquoi pas eux ?

Galillègre : quand le syndrome contamine Claude Allègre

Vers le point Godwin

L’argument est évidemment spécieux puisqu’il s’agit là d’une analogie douteuse. Une ressemblance ne prouve en rien la validité d’un argumentaire scientifique. Ce n’est pas parce que Galilée a eu raison, que les climato-sceptiques, en se comparant à lui, ont raison à leur tour.

Cette façon de procéder est très proche de la loi de Godwin, énoncée en 1990 par Mike Godwin, qui considère que :

Plus une discussion en ligne dure longtemps, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de 1.

La “loi de Godwin” a depuis très largement dépassé les frontières du web pour s’appliquer également aux débats IRL. Et une telle comparaison (au demeurant souvent accompagnée de la phrase : “les heures les plus sombres de notre histoire”), si elle s’inscrit dans une conversation qui ne traite pas directement de ce sujet, achève souvent de discréditer son auteur.

Dans le même genre, le syndrome de Galilée ressemble étonnamment au Point Godwin. Sur la page wikipédia “Esprit critique”, on en trouve d’ailleurs une définition :

Toute personne qui adhère à une pseudo-théorie la considère presque toujours comme révolutionnaire, et en outre s’estime persécutée.

Processus de victimisation

Parmi les victimes malheureuses du syndrome de Galilée, on retrouve notamment les climato-sceptiques ou les partisans des parasciences (les sciences non reconnues par la communauté scientifique parmi lesquelles : l’astrologie, l’homéopathie, la graphologie, etc.).

Claude Allègre, par exemple, géochimiste et ex-ministre de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie, n’hésite pas à se comparer à Galilée (ainsi qu’à Louis Pasteur auparavant) à l’occasion d’un débat pour l’émission l’Objet du scandale (à environ 8′15”) :

Galilée disait : “Il vaut mieux une personne qui sait, que 1000 personnes qui ne savent pas”. Je pense que la quasi totalité des gens [les enseignants-chercheurs] qui sont là dedans ne savent pas. Tout comme j’étais tout seul contre 3000 personnes -je crois qu’on était 2- au moment de la tectonique des plaques.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Il s’agit ici du processus de victimisation typique : “je suis seul contre tous, donc j’ai raison, la preuve, Galilée était seul contre tous, et il a eu raison“. Claude Allègre connaît pourtant d’autant mieux son sujet qu’il a écrit un ouvrage sobrement intitulé “Galilée”.

Citons aussi Serge Galam, directeur de recherche au CNRS et climato-sceptique, qui dans une tribune adressée au journal Le Monde en février 2007 s’offre le luxe du syndrome de Galilée (qui aurait, selon lui, démontré que la Terre est… ronde) ET d’un point Godwin :

Lorsque Galilée a conclu que la Terre était ronde, le consensus unanime était contre lui, s’accordant sur la platitude de la Terre. Mais lui avait la démonstration de sa conclusion. De façon similaire, à l’époque nazie la théorie de la relativité fut rejetée, estampillée comme une théorie juive dégénérée, avec à l’appui une pétition de grands scientifiques de l’époque, qui signaient du haut de leur autorité établie. Einstein aurait alors dit que des milliers de signatures n’étaient pas nécessaires pour invalider sa théorie. Il suffirait d’un seul argument, mais scientifique. [...]

Mais, attention, lorsque les scientifiques et les politiques font bloc, ça ne présage en général rien de bon… pour les humains ; voir les précédents historiques : nazisme, communisme, Inquisition (les docteurs sont des théologiens). En conclusion, lutter contre la pollution, pourquoi pas ? Mais si le réchauffement est naturel, ce n’est vraiment pas la priorité.

Du côté des parasciences, l’exemple de Jacques Benveniste fait figure d’autorité.  Ce chercheur s’est notamment fait connaître pour ses recherches sur la “mémoire de l’eau“, qui lui ont valu d’être évincé de l’INSERM. Sa théorie fait encore largement débat aujourd’hui malgré de farouches opposants et l’absence de résultats concrets. Elle est cependant défendue par quelques scientifiques (dont Luc Montagnier, prix Nobel de médecine pour sa collaboration à la découverte du VIH) et par les partisans de l’homéopathie, qui voit là la confirmation de l’efficacité de leur (para)science. Le fait est que Jacques Benveniste est probablement un des scientifiques qui souffre le plus du syndrome de Galilée, tant ses recherches sont l’objet de controverses : Luc Montagnier affirme ainsi qu’il s’agit d’une affaire “aussi importante que l’affaire Galilée”  et L’Association Jacques Benveniste pour la recherche organisait, il y a encore peu de temps, une conférence sur le thème “Jacques Benveniste, Galilée des temps modernes”.

Ces comparaisons ne sont en rien une preuve. Elles tiennent plus de l’argument d’autorité que d’une véritable démonstration du bien fondé des recherches de Benveniste.

Si la référence à Galilée est utilisée par quelques scientifiques -plus ou moins crédibles- en mal d’arguments pour défendre leurs hypothèses, ce sont surtout leurs zélés défenseurs qui font l’amalgame. Ainsi on pourrait définir le point Galilée de la sorte :

Plus une discussion en ligne sur un sujet scientifique dure longtemps, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant Galilée ou l’inquisition tend vers 1.

Sur les forums, des experts improvisés témoignent en effet de la persécution de la communauté scientifique à l’encontre de leurs Galilée des temps modernes. Une comparaison d’autant plus illogique que l’astronome incarnait le combat de la raison contre la religion. Et non pas de la raison contre la raison, ou de la science contre la science.

Surtout, outre un certain manque de modestie (il faut oser se comparer à Galilée sans le recul de l’Histoire), l’argument ne tient pas, ne serait-ce que sur le plan purement historique.

Un Galilée devenu mythique

Contrairement à l’idée couramment répandue, Galilée était loin d’être incompris. A une époque où les sciences visaient à prouver le bien fondé de la religion, il était difficile de s’éloigner des écrits saints sans passer pour un hérétique. Giordano Bruno, un autre astronome italien, a ainsi été brûlé vif en 1600, pour avoir affirmé que l’univers était infini et qu’il existait donc une infinité de terres et de soleils. Pour parvenir à ces conclusions Bruno s’était appuyé sur les travaux d’un certain Nicolas Copernic.

Travaux qui ont également servi de point de départ aux théories avancées par Galilée. Avant Copernic, il était communément admis que l’univers était géocentrique. Cette idée, développée par Aristote puis par Ptolémée, veut que la Terre soit immobile, au centre de l’Univers, et que les planètes (le soleil et la lune) gravitent autour d’elle en décrivant des cercles parfaits. Une théorie largement acceptée par la religion catholique.

Copernic, lui, développe l’hypothèse de l’héliocentrisme, faisant du soleil un astre autour duquel les planètes, dont la Terre, graviteraient. Son ouvrage clé, «Nicolai Copernici Torinensis De Revolutionibus Orbium Coelestium Libri VI», paraît l’année de sa mort, en 1543, et est dédicacé au pape Paul III. Copernic était un protégé du pape, comme le sera à son tour Galilée avec le pape Urbain VIII. Ce dernier lui commande d’ailleurs un livre, “Dialogue sur les deux grands systèmes du monde“, dans lequel Galilée doit présenter de façon impartial les théories aristotéliciennes et coperniciennes. Mais l’astronome italien profite de son ouvrage pour railler le géocentrisme (le défenseur de cette thèse étant d’ailleurs nommé “Simplicio”) au profit de l’héliocentrisme.

Devant l’ampleur du scandale, le Pape lui même prend le parti des adversaires de Galilée. Avec la suite que l’on connaît : Galilée est poursuivi par l’inquisition, contraint de renier son œuvre et condamné à la prison à vie. Peine immédiatement commuée par le Pape en une assignation à résidence (qui sera d’ailleurs relativement assouplie, le scientifique est autorisé à changer de lieu et à recevoir des visites).

Galilée, contrairement aux croyances, n’était donc pas un laissé-pour-compte. Il comptait au contraire de nombreux soutiens, à la fois dans la communauté scientifique (notamment Johannes Kepler, célèbre astronome allemand) mais également chez les religieux (le Pape) ou les nobles (les de Medicis).

L’astronome italien n’a pas tant été jugé par ses comparses scientifiques que par le dogme chrétien (représenté par l’inquisition). Une situation incomparable de nos jours, au vu de la place qu’occupe la religion dans les sciences.

Preuve est faite que les points G (non sexués a-t-on dit) ne sont pas des arguments valides. Peut-être nous intéresserons-nous, une prochaine fois, aux points P (syndromes de Poppeye, du poulpe et de Pangloss).


Photos Flickr CC PaternitéPartage selon les Conditions Initiales par theilr et PaternitéPas d'utilisation commerciale Pas de modification par jennandjon

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Le syndrome de Galilée, point Godwin de la science http://owni.fr/2011/05/26/le-syndrome-de-galilee-point-godwin-de-la-science/ http://owni.fr/2011/05/26/le-syndrome-de-galilee-point-godwin-de-la-science/#comments Thu, 26 May 2011 15:57:30 +0000 Pierre Ropert http://owni.fr/?p=34932 En matière d’argumentation, tout est affaire de point G. Non pas celui d’une éventuelle source de plaisirs suprêmes, mais bien celui du point de non retour lors d’un débat argumenté. Au fameux point Godwin succède ainsi son versant scientifique, le syndrome de Galilée.

Et pourtant elle tourne.

Galilée a beau ne jamais avoir prononcé ces mots (la phrase est apocryphe), il n’en a pas moins été condamné à la prison à vie pour ses théories. Au début du XVIIe siècle, l’astronome italien s’emploie à démontrer que l’Univers ne tourne pas autour de la Terre, mais que c’est au contraire la Terre qui tourne autour du soleil. Une définition qui convient peu à l’Église, persuadée de l’immuabilité de la planète bleue dans un univers en mouvement. Contraint de renier ses travaux, mais reconnu depuis à titre posthume, Galilée devient le symbole du génie incompris.

À ce génie mis au ban auraient donc succédé certaines sommités parmi lesquelles Jacques Benveniste, Claude Allègre, Éric Zemmour (pourtant loin d’être un scientifique), etc. Après tout, si Galilée était un incompris, pourquoi pas eux ?

Galillègre : quand le syndrome contamine Claude Allègre

Vers le point Godwin

L’argument est évidemment spécieux puisqu’il s’agit là d’une analogie douteuse. Une ressemblance ne prouve en rien la validité d’un argumentaire scientifique. Ce n’est pas parce que Galilée a eu raison, que les climato-sceptiques, en se comparant à lui, ont raison à leur tour.

Cette façon de procéder est très proche de la loi de Godwin, énoncée en 1990 par Mike Godwin, qui considère que :

Plus une discussion en ligne dure longtemps, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant les nazis ou Adolf Hitler s’approche de 1.

La “loi de Godwin” a depuis très largement dépassé les frontières du web pour s’appliquer également aux débats IRL. Et une telle comparaison (au demeurant souvent accompagnée de la phrase : “les heures les plus sombres de notre histoire”), si elle s’inscrit dans une conversation qui ne traite pas directement de ce sujet, achève souvent de discréditer son auteur.

Dans le même genre, le syndrome de Galilée ressemble étonnamment au Point Godwin. Sur la page wikipédia “Esprit critique”, on en trouve d’ailleurs une définition :

Toute personne qui adhère à une pseudo-théorie la considère presque toujours comme révolutionnaire, et en outre s’estime persécutée.

Processus de victimisation

Parmi les victimes malheureuses du syndrome de Galilée, on retrouve notamment les climato-sceptiques ou les partisans des parasciences (les sciences non reconnues par la communauté scientifique parmi lesquelles : l’astrologie, l’homéopathie, la graphologie, etc.).

Claude Allègre, par exemple, géochimiste et ex-ministre de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie, n’hésite pas à se comparer à Galilée (ainsi qu’à Louis Pasteur auparavant) à l’occasion d’un débat pour l’émission l’Objet du scandale (à environ 8′15”) :

Galilée disait : “Il vaut mieux une personne qui sait, que 1000 personnes qui ne savent pas”. Je pense que la quasi totalité des gens [les enseignants-chercheurs] qui sont là dedans ne savent pas. Tout comme j’étais tout seul contre 3000 personnes -je crois qu’on était 2- au moment de la tectonique des plaques.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Il s’agit ici du processus de victimisation typique : “je suis seul contre tous, donc j’ai raison, la preuve, Galilée était seul contre tous, et il a eu raison“. Claude Allègre connaît pourtant d’autant mieux son sujet qu’il a écrit un ouvrage sobrement intitulé “Galilée”.

Citons aussi Serge Galam, directeur de recherche au CNRS et climato-sceptique, qui dans une tribune adressée au journal Le Monde en février 2007 s’offre le luxe du syndrome de Galilée (qui aurait, selon lui, démontré que la Terre est… ronde) ET d’un point Godwin :

Lorsque Galilée a conclu que la Terre était ronde, le consensus unanime était contre lui, s’accordant sur la platitude de la Terre. Mais lui avait la démonstration de sa conclusion. De façon similaire, à l’époque nazie la théorie de la relativité fut rejetée, estampillée comme une théorie juive dégénérée, avec à l’appui une pétition de grands scientifiques de l’époque, qui signaient du haut de leur autorité établie. Einstein aurait alors dit que des milliers de signatures n’étaient pas nécessaires pour invalider sa théorie. Il suffirait d’un seul argument, mais scientifique. [...]

Mais, attention, lorsque les scientifiques et les politiques font bloc, ça ne présage en général rien de bon… pour les humains ; voir les précédents historiques : nazisme, communisme, Inquisition (les docteurs sont des théologiens). En conclusion, lutter contre la pollution, pourquoi pas ? Mais si le réchauffement est naturel, ce n’est vraiment pas la priorité.

Du côté des parasciences, l’exemple de Jacques Benveniste fait figure d’autorité.  Ce chercheur s’est notamment fait connaître pour ses recherches sur la “mémoire de l’eau“, qui lui ont valu d’être évincé de l’INSERM. Sa théorie fait encore largement débat aujourd’hui malgré de farouches opposants et l’absence de résultats concrets. Elle est cependant défendue par quelques scientifiques (dont Luc Montagnier, prix Nobel de médecine pour sa collaboration à la découverte du VIH) et par les partisans de l’homéopathie, qui voit là la confirmation de l’efficacité de leur (para)science. Le fait est que Jacques Benveniste est probablement un des scientifiques qui souffre le plus du syndrome de Galilée, tant ses recherches sont l’objet de controverses : Luc Montagnier affirme ainsi qu’il s’agit d’une affaire “aussi importante que l’affaire Galilée”  et L’Association Jacques Benveniste pour la recherche organisait, il y a encore peu de temps, une conférence sur le thème “Jacques Benveniste, Galilée des temps modernes”.

Ces comparaisons ne sont en rien une preuve. Elles tiennent plus de l’argument d’autorité que d’une véritable démonstration du bien fondé des recherches de Benveniste.

Si la référence à Galilée est utilisée par quelques scientifiques -plus ou moins crédibles- en mal d’arguments pour défendre leurs hypothèses, ce sont surtout leurs zélés défenseurs qui font l’amalgame. Ainsi on pourrait définir le point Galilée de la sorte :

Plus une discussion en ligne sur un sujet scientifique dure longtemps, plus la probabilité d’y trouver une comparaison impliquant Galilée ou l’inquisition tend vers 1.

Sur les forums, des experts improvisés témoignent en effet de la persécution de la communauté scientifique à l’encontre de leurs Galilée des temps modernes. Une comparaison d’autant plus illogique que l’astronome incarnait le combat de la raison contre la religion. Et non pas de la raison contre la raison, ou de la science contre la science.

Surtout, outre un certain manque de modestie (il faut oser se comparer à Galilée sans le recul de l’Histoire), l’argument ne tient pas, ne serait-ce que sur le plan purement historique.

Un Galilée devenu mythique

Contrairement à l’idée couramment répandue, Galilée était loin d’être incompris. A une époque où les sciences visaient à prouver le bien fondé de la religion, il était difficile de s’éloigner des écrits saints sans passer pour un hérétique. Giordano Bruno, un autre astronome italien, a ainsi été brûlé vif en 1600, pour avoir affirmé que l’univers était infini et qu’il existait donc une infinité de terres et de soleils. Pour parvenir à ces conclusions Bruno s’était appuyé sur les travaux d’un certain Nicolas Copernic.

Travaux qui ont également servi de point de départ aux théories avancées par Galilée. Avant Copernic, il était communément admis que l’univers était géocentrique. Cette idée, développée par Aristote puis par Ptolémée, veut que la Terre soit immobile, au centre de l’Univers, et que les planètes (le soleil et la lune) gravitent autour d’elle en décrivant des cercles parfaits. Une théorie largement acceptée par la religion catholique.

Copernic, lui, développe l’hypothèse de l’héliocentrisme, faisant du soleil un astre autour duquel les planètes, dont la Terre, graviteraient. Son ouvrage clé, «Nicolai Copernici Torinensis De Revolutionibus Orbium Coelestium Libri VI», paraît l’année de sa mort, en 1543, et est dédicacé au pape Paul III. Copernic était un protégé du pape, comme le sera à son tour Galilée avec le pape Urbain VIII. Ce dernier lui commande d’ailleurs un livre, “Dialogue sur les deux grands systèmes du monde“, dans lequel Galilée doit présenter de façon impartial les théories aristotéliciennes et coperniciennes. Mais l’astronome italien profite de son ouvrage pour railler le géocentrisme (le défenseur de cette thèse étant d’ailleurs nommé “Simplicio”) au profit de l’héliocentrisme.

Devant l’ampleur du scandale, le Pape lui même prend le parti des adversaires de Galilée. Avec la suite que l’on connaît : Galilée est poursuivi par l’inquisition, contraint de renier son œuvre et condamné à la prison à vie. Peine immédiatement commuée par le Pape en une assignation à résidence (qui sera d’ailleurs relativement assouplie, le scientifique est autorisé à changer de lieu et à recevoir des visites).

Galilée, contrairement aux croyances, n’était donc pas un laissé-pour-compte. Il comptait au contraire de nombreux soutiens, à la fois dans la communauté scientifique (notamment Johannes Kepler, célèbre astronome allemand) mais également chez les religieux (le Pape) ou les nobles (les Medicis).

L’astronome italien n’a pas tant été jugé par ses comparses scientifiques que par le dogme chrétien (représenté par l’inquisition). Une situation incomparable de nos jours, au vu de la place qu’occupe la religion dans les sciences.

Preuve est faite que les points G (non sexués a-t-on dit) ne sont pas des arguments valides. Peut-être nous intéresserons-nous, une prochaine fois, aux points P (syndromes de Poppeye, du poulpe et de Pangloss).


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Les avocats contestent le contrôle d’identité au faciès http://owni.fr/2011/05/23/avocats-contestent-le-controle-identite-au-facies/ http://owni.fr/2011/05/23/avocats-contestent-le-controle-identite-au-facies/#comments Mon, 23 May 2011 17:31:02 +0000 Pierre Ropert http://owni.fr/2011/05/23/les-juristes-face-au-delit-de-facies/ Un collectif de juristes et d’avocats a l’intention de s’attaquer au délit de sale gueule. Ils souhaitent faire reconnaître le caractère inconstitutionnel du contrôle d’identité. Régi par l’article 78-2 du code de procédure pénale, cette pratique ne permet pas à un juge, à l’heure actuelle,  de connaître le motif du contrôle.

Les avocats sont appuyés dans leur démarche par l’ONG “Open society foundations”, de Georges Soros, milliardaire américain. Le collectif se base en effet sur un rapport publié en 2009 [pdf], intitulé “Polices et minorités visibles : les contrôles d’identité à Paris”. A partir de cette étude, OWNI a réalisé l’infographie suivante :

L’ONG a observé les contrôles de police dans cinq emplacements (situés gare du Nord et à la station de métro Châtelet-Les Halles) et a constaté que les minorités visibles étaient bien plus souvent l’objet de contrôles d’identité. Elle a procédé en déterminant plusieurs groupes :

  • “Arabes” (personnes perçues comme d’origine maghrébine ou du Machrek, y compris kabyle)
  • “Blancs”
  • Et “Noirs” (personnes perçues comme étant d’origine subsaharienne ou antillaise)

Étaient également considérées les “asiatiques” et les “indo-pakistanais”, mais les chiffres se sont révélés trop faibles pour être considérés comme statistiquement fiables.

Les Noirs sont six fois plus contrôlés que les Blancs

D’octobre 2007 à février 2008, les observateurs ont comptabilisé 37.833 personnes présentes sur les lieux à des plages horaires définies (58 % des personnes de la population de référence étaient “blanches”, 23 % “noires” et 11% “arabes”). Puis, entre novembre 2007 et mai 2008, ils ont recueilli des données portant sur 524 contrôles de police aux mêmes endroits et aux mêmes plages horaires.

On réalise ainsi que, malgré une population “blanche” bien plus importante, les probabilités de contrôle d’identité sont multipliées par 6 pour les “noirs” et par 7.8 pour les “arabes”, par rapport aux “blancs”.

Pour changer la loi, le collectif souhaite s’attaquer pendant les deux semaines à venir à chaque affaire où il est question de contrôle d’identité. Ils déposeront systématiquement devant les juridictions de plusieurs villes de France (Paris, Lyon, Marseille, Lille, Nanterre et Créteil) une Question prioritaire de constitutionnalité.


Avec l’aide de Stanislas Jourdan.

Illustration CC Loguy pour OWNI.fr

Photo Flickr PaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification par Neno°.

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Pénurie de lits: les HP HS http://owni.fr/2011/05/10/psychiatrie-lits-psychiatres-ecosante-prison/ http://owni.fr/2011/05/10/psychiatrie-lits-psychiatres-ecosante-prison/#comments Tue, 10 May 2011 16:29:00 +0000 Pierre Ropert http://owni.fr/?p=62070 2004. Une aide-soignante et une infirmière sont assassinées par un patient dans un hôpital psychiatrique, à Pau. La profession monte au créneau et dénonce le manque d’effectifs. En réaction, le ministre de la Santé de l’époque, Philippe Douste-Blazy, annonce un grand “plan santé mentale“, qui projette notamment de diversifier les alternatives à l’hospitalisation complète :

L’objectif est d’aboutir à une meilleure répartition géographique des professionnels médicaux et de favoriser le développement des réseaux de professionnels en santé mentale.

2008. A Grenoble, un homme atteint de schizophrénie s’échappe d’un hôpital psychiatrique et poignarde un étudiant. Nicolas Sarkozy demande alors une réforme des soins psychiatriques. Il souhaite notamment durcir l’hospitalisation d’office, conditionnant la sortie des détenus jugés dangereux à un accord du préfet.

2011. A l’appel du Collectif des 39, plus de 25.000 personnes ont signé la pétition “Réforme de la Psychiatrie : Une déraison d’État“. Les signataires reprochent au gouvernement l’assimilation “de la maladie mentale à une supposée dangerosité”.

Surtout, depuis plusieurs années, la profession dénonce des moyens de plus en plus limités. En 20 ans, le nombre de lits des services de psychiatrie en hôpitaux a été divisé par deux.

De 79.150 lits pour une hospitalisation complète en service psychiatrie en 1996, le chiffre est passé à 57.141 en 2008. Soit plus de 22.000 lits supprimés en l’espace de 12 ans, selon la base de données Ecosanté.

Cette diminution constante répond à une volonté de développer la psychiatrie de secteur, c’est-à-dire de mettre en place des soins de proximité, dans des structures adaptées, plus facilement accessibles pour les malades mentaux. Un projet jusqu’ici resté sans effet, selon le constat du député (Nouveau Centre) et docteur Claude Leteurtre, énoncé en 2008 :

L’économie réalisée sur les lits d’hospitalisation n’a pas été réaffectée dans le circuit des activités psychiatriques et les temps médicaux se sont réduits dans le médico-social.

La psychiatrie de secteur reste trop peu développée pour accueillir les malades mis à la porte des hôpitaux. Ce qui donne lieu à de véritables aberrations : en raison du manque de place, les demandes d’hospitalisation d’office ou à la demande d’un tiers sont prioritaires. Comme l’explique Mathieu Bellahsen, membre du Collectif des 39 :

Lorsqu’un psychiatre de secteur nous appelle en urgence, en nous demandant de prendre un patient qui souhaite se faire hospitaliser de lui-même – donc en hospitalisation libre -, nous lui répondons qu’il n’y a pas de lit pour les hospitalisations sans contrainte. Le psychiatre n’a qu’à le mettre en hospitalisation sans consentement et le patient arrive alors à la demande d’un tiers alors qu’il voulait de lui-même se faire soigner. De manière libre !

Le nombre de lits ne permet plus d’accueillir des malades sans que ceux-ci ne soient “forcés” de se faire soigner.

En 2008, d’une région à une autre, le nombre de lits en service psychiatrique varie de 63 à 125 pour 100.000 habitants.

Le nombre de psychiatres oscille, lui, de 9,8 à 22,6 pour 100 000 habitants. On est encore loin de la “meilleure répartition géographique des professionnels médicaux”.

En France, un peu plus de 12.000 médecins psychiatres prennent chaque année en charge près d’1.2 million de patients. Et il est difficile de croire que les conditions d’accueil des malades mentaux vont s’améliorer quand la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et de la statistique (Drees) estime que le nombre de psychiatres devrait diminuer d’environ 30 ou 40 % d’ici 15 ans [pdf].

Les conséquences sont pourtant d’ores et déjà inquiétantes. Le nombre de malades psychiatriques en prison est en constante augmentation, selon un rapport d’information du Sénat qui relève “les limites de l’organisation actuelle de la psychiatrie”. En cause ? La diminution du nombre de lits -encore et toujours-, et l’absence de suivi des patients :

La désinstitutionalisation (NDLR: de la psychiatrie) suivie d’une diminution forte du nombre de lits en psychiatrie est, pour de nombreux experts entendus par le groupe de travail, l’une des raisons de la présence accrue de malades mentaux en prison, même si aucun élément statistique ne permet de l’affirmer avec certitude. [...]

De tels chiffres suggèrent qu’un certain nombre de personnes arrivent en prison après un suivi par le secteur psychiatrique sans que celui-ci ait été en mesure d’assurer une continuité des soins suffisante pour éviter des passages à l’acte. [...]

Le 3 mai dernier, le contrôleur des prisons Jean-Marie Delarue s’est inquiété une fois de plus dans son rapport annuel de “l’état des soins psychiatriques en prison”. Paradoxal.


Photo Flickr CC BY par Alebonvini.


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Image de Une, création et photo : Pascal Colrat (cette image n’est pas en Creative Commons)

Le déclin de la psychiatrie française par Grégoire Osoha

Psychiatrie sous contrainte: une loi inique par Claire Berthelemy

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