OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Le nouvel élan de la Fan Fiction http://owni.fr/2011/07/20/le-nouvel-elan-de-la-fan-fiction-harry-potter/ http://owni.fr/2011/07/20/le-nouvel-elan-de-la-fan-fiction-harry-potter/#comments Wed, 20 Jul 2011 06:38:41 +0000 Louis Morales-Chanard http://owni.fr/?p=74218 Time profite de la sortie du dernier épisode de la saga “Harry Potter” pour se pencher sur le phénomène de la fan fiction [en]. Il s’agit, comme son nom l’indique, d’une littérature amateur inspirée plus ou moins librement d’univers fictionnels populaires (romans, films, BD, jeux vidéos, etc.). Une manière de poursuivre l’histoire après le générique ou une fois les dernières pages tournées…

On apprend que le concept de “fanfic” est déjà ancien, les premiers exemples remontant aux années 60, autour de séries telles que “Des Agents très spéciaux” ou “Star Trek”. Mais c’est une fois de plus le Web 2.0 qui a catalysé ces nouvelles pratiques littéraires en simplifiant à la fois l’écriture et l’échange de textes.

Ce que je trouve impressionnant, c’est la liberté avec laquelle les fans pourtant dévoués peuvent recomposer les intrigues, dévoyer les personnages, voire remettre en cause la logique même des œuvres d’origine (je vous passe les détails mais les sous- et sous-sous-genres [en] de la fanfic peuvent aller très loin). Une démarche de réécriture en profondeur, qui va au-delà de l’hommage ou du pastiche et ressemble davantage à du “proto-remix”.

Écriture collaborative et démocratique

Car, si depuis Barthes l’auteur était “mort” au nom de la pluralité des interprétations, il restait la seule source de création littéraire. Un privilège qui lui échappe désormais avec la fan fiction, dont le caractère collaboratif et démocratique le transforme en simple géniteur contraint de partager la garde de ses enfants avec la communauté. Ce qui pose évidemment des problèmes de droits d’auteurs, aussi bien financier que moraux. Cependant, Lev Grossman (qui signe le reportage de Time) nous rappelle -et à juste titre- que le concept-même de droit d’auteur demeure très récent et pourrait évoluer à moyen/long terme vers plus de flexibilité.

En attendant, les stars de l’édition divergent sur l’attitude à adopter face à la fan fiction. Certains y voient un viol pur et simple de leur art, là où d’autres, comme J.K.Rowling notamment, l’encouragent. L’écrivain écossaise aurait semble-t-il prévu une section fanfic au sein de Pottermore [en], le portail officiel qui ouvrira en octobre prochain (cela dit, pas sûr qu’on y retrouve du slash…). C’est que, malgré ses bizzareries, la fanfic revient à de la promo gratuite, de la publicité à l’œil, des earned media quoi…

“Harry Potter”, grande saga de la génération remix

Néanmoins, je pense que dans le cas de Rowling, refuser la fanfic serait carrément un paradoxe, tant l’heptalogie Harry Potter est elle-même le fruit d’innombrables mélanges mythologiques, littéraires et stylistiques. On y retrouve en effet les archétypes et structures de tout grand récit qui se respecte, couplés avec des éléments empruntés au folklore et au cinéma. Sans oublier de troublants parallèles avec notre propre Histoire et le fait que l’action se déroule en parallèle du “monde réel”, et non dans quelque univers isolé dans le temps et l’espace… Véritable méta-récit, “Harry Potter” est en quelque sorte la grande saga de la génération remix. Une saga vouée à se poursuivre sous la plume de ses lecteurs devenus auteurs.


Billet initialement publié sur le blog Pocket Zeitgeist sous le titre “Harry Potter, fan fiction et génération remix”

Illustration CC FlickR PaternitéPas d'utilisation commerciale par Beacon Radio

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La pub ciblée fait flipper l’internaute http://owni.fr/2011/05/23/la-pub-ciblee-fait-flipper-linternaute/ http://owni.fr/2011/05/23/la-pub-ciblee-fait-flipper-linternaute/#comments Mon, 23 May 2011 11:25:50 +0000 Louis Morales-Chanard http://owni.fr/?p=64066 Un petit article qui donne à réfléchir, publié la semaine dernière par Wired. Le journaliste Felix Salmon s’y interroge sur les limites du ciblage comportemental sur Internet, une pratique marketing désormais incontournable et qui ne cesse de s’intensifier.

Salmon fait remarquer que, passé un certain stade de précision, le ciblage semble avoir un effet contre-productif et suscite la répulsion plus que l’intérêt de l’internaute. Un point de bascule que le journaliste rapproche du concept de vallée dérangeante. Selon cette théorie élaborée par l’expert en robotique japonais Masahiro Mori, les robots humanoïdes doivent être soit délibérément peu ressemblants aux humains, soit parfaitement identiques, mais surtout pas entre les deux (d’où l’idée de “vallée”), au risque de provoquer un rejet pur et simple de la part des vrais êtres humains. C’est assez difficile à expliquer comme ça, mais le graphique (à droite) qui accompagne l’article Wikipédia est assez clair.

Pour revenir au ciblage sur Internet : la “vallée dérangeante” serait ici le stade où la publicité devient suffisamment précise pour vous faire flipper tout seul en face de votre écran. Comme dans la théorie d’origine, il est possible de sortir de cet entre-deux contre-productif en poussant la logique du ciblage, mais en veillant à ce qu’il soit accepté par l’utilisateur (par opt in, comme c’est plus ou moins le cas pour l’Instant Personalization de Facebook) et/ou qu’il s’efface derrière les produits et contenus qu’il fait remonter. En d’autres termes, que le targeting devienne aussi utile à l’internaute qu’au marketeur.

FAIL

Mais d’où vient cette répulsion face au ciblage?

Il y a bien sûr le sentiment d’être épié (“Eh, je sais que la semaine dernière tu as cherché la recette de la quiche lorraine, ça te dirait d’acheter le livre 1001 Tartes salées et sucrées ou un paquet de lardons pour ton prochain dîner?”). Le ciblage comportemental, aussi anodin soit-il, rappelle que l’Internet peut facilement se muer en système panoptique. Le grand public est désormais éduqué et toujours plus inquiet quant à la protection de la vie privée à l’ère digitale. Ses craintes, fondées comme infondées, sont régulièrement relancées par quelque scandale, dont le dernier en date concerne l’iPhone d’Apple, qui collecterait les données de géolocalisation de ses utilisateurs sans leur consentement. On devrait bientôt observer une suspicion généralisée vis-à-vis des nouvelles technologies, et certains appellent déjà de leurs vœux des mesures afin de permettre à chacun de mieux maîtriser ses données personnelles, ou du moins de prendre conscience de “ce qu’ils savent” (pour reprendre le titre d’une rubrique du Wall Street Journal entièrement consacrée à ces enjeux).

Cependant, il me semble que les raisons du rejet d’une publicité trop ciblée sur Internet sont encore plus profondes. Un ciblage très précis provoque le dégoût et la peur parce qu’il met à nu la nature finalement très prévisible de l’homme.

Le pouvoir des données est aujourd’hui célébré, et beaucoup voient dans leur collecte et leur exploitation à grande échelle (notamment grâce au smartphone, à la fois objet le plus intime et le plus ouvert sur le monde qui soit) les fondements d’une nouvelle révolution scientifique et humaniste. Cependant, le culte des data, dont participe le ciblage comportemental sur le Net, dévoile tous les déterminismes de l’Homme et pourrait battre en brèche le paradigme (hyper)moderne de l’Individu tout-puissant, certes pas toujours rationnel mais au moins libre de ses actes.

À ce titre, une pub trop ciblée nous mettrait inconsciemment face à nos propres limitations et remettrait en cause notre caractère spécial, unique —humain.


Article publié initialement sur Pocket Zeitgeist

Photo FlickR CC AttributionNoncommercialShare Alike muskva

Graphique Wikimedia Commons de Smurrayinchester et traduction de Yvanhoe en Creative Commons by-sa

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