OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Les Verts victorieux dans le Bade-Wurtemberg http://owni.fr/2011/03/28/allemagne-les-verts-victorieux-dans-le-bade-wurtemberg/ http://owni.fr/2011/03/28/allemagne-les-verts-victorieux-dans-le-bade-wurtemberg/#comments Mon, 28 Mar 2011 16:21:07 +0000 Daniel Vernet http://owni.fr/?p=53933 Au cours de ce que les Allemands ont baptisé « la super année électorale » marquée par de nombreux scrutins régionaux, tous les regards étaient tournés vers le Bade-Wurtemberg où, pour la première fois dans l’histoire de la République fédérale, le parti écologiste pouvait gagner et nommer le ministre-président. C’est chose faite.

Les Verts, avec leur tête Winfried Kretschmann, ont remporté 24,2% des voix, dimanche 27 mars. Ils auront une courte majorité au Parlement régional avec les sociaux-démocrates (SPD) qui ont obtenu 23,1%. La démocratie-chrétienne reste le premier parti du Land avec plus de 39% des suffrages mais elle perd le pouvoir qu’elle détenait depuis 58 ans. Son allié libéral (FDP) obtient 5,3%, deux fois moins qu’aux dernières élections régionales de 2006 et trois fois moins qu’aux législatives de 2009. Dans l’autre Land, la Rhénanie-Palatinat, où l’on votait aussi dimanche, le SPD perd sa majorité absolue mais pourra former une coalition gouvernementale avec les Verts qui multiplient leurs voix par trois. Les écologistes sont les vrais vainqueurs de ces deux scrutins qui marquent une défaite sérieuse pour Angela Merkel et la coalition chrétienne-démocrate-libérale au pouvoir à Berlin.

Les hésitations de Merkel sur le nucléaire

Les Verts ont certainement profité de la vive émotion suscitée par la catastrophe de Fukushima chez les Allemands traditionnellement hostiles au nucléaire sous toutes ses formes, civiles ou militaires. Ils ont aussi profité des hésitations et des volte-face du gouvernement fédérale en la matière. Il y trois mois, Angela Merkel annonçait qu’elle mettait fin à la politique du gouvernement précédent qu’elle présidait en coalition avec le sociaux-démocrates. Cette politique prévoyait la renonciation à l’énergie nucléaire dans une douzaine d’années. Elle fut accusée, y compris dans les rangs de son propre parti, de céder au lobby énergétique représenté par quelques grandes sociétés. Après le tremblement de terre et le tsunami au Japon, elle a ordonné la fermeture de sept des plus vieilles centrales nucléaires allemandes et annoncé un moratoire de trois mois ainsi que le retour à la politique précédente.

Elle s’est attiré les foudres des industriels sans pour autant gagner la sympathie des adversaires du nucléaire. La démarche a paru d’autant plus opportuniste que son ministre de l’économie, Rainer Brüderle, s’est laissé piégé au cours d’une réunion du patronat allemand, en déclarant que le tournant à 180° pris par le gouvernement dans la politique nucléaire avait été décidé pour des raisons électorales « pas toujours rationnelles ».

Désaveu politique du gouvernement fédéral

Cependant il serait réducteur de voir dans la défaite des partis de gouvernement aux élections du Bade-Wurtemberg une simple conséquence des événements japonais. C’est d’abord et avant tout un désaveu de la politique du gouvernement fédéral, de la chancelière mais surtout peut-être de son allié libéral, en particulier du ministre des affaires étrangères et président du FDP, Guido Westerwelle. La CDU qui régnait sur le Land depuis près de six décennies avait déclaré que son « destin » était en jeu dans cette élection. C’était sans doute exagéré. Mais les effets risquent d’être dévastateurs pour les deux formations. D’abord le gouvernement devra faire face à une opposition renforcée au Bundesrat, la Chambre des États, dont l’accord est nécessaire pour l’adoption d’un nombre important de lois. Ensuite, la fronde qui s’exprimait de manière feutrée au sein de la démocratie-chrétienne à l’encontre d’une chancelière qui semblait avoir perdu des repères solides pour naviguer au gré des écueils, risque de se faire entendre ouvertement.

Le fait que l’Allemagne se soit abstenue au Conseil de sécurité lors du vote de la résolution 1973 autorisant l’intervention en Libye a suscité des critiques dans le groupe parlementaire CDU. Beaucoup ont vu dans cette décision une rupture de la politique traditionnelle de solidarité avec les États-Unis. Là encore, il s’agissait peut-être d’aller au devant des souhaits d’une opinion majoritairement hostile aux opérations militaires. Mais si telle était l’intention, la décision n’a pas été électoralement payante. Même si sa côte de popularité reste élevée, Angela Merkel souffre de plus en plus d’un manque de crédibilité.

Ajoutons que les derniers mois ont été très agité à Stuttgart, la capitale du Bade-Wurtemberg. Les manifestations s’y sont succédé contre le projet de modernisation de la gare, dit projet Stuttgart 21. Elles ont rassemblées toutes les couches de la population, et pas seulement les traditionnels écologistes. Le projet divise le parti vert, qui est contre, et le SPD, qui est plutôt pour, mais les deux partis se sont mis d’accord pour organiser un référendum après que des experts indépendants auront rendu leur rapport.

Enfin, les Verts avaient un atout : leur candidat au poste de ministre-président, Winfried Kretschmann. Ce catholique de 63 ans n’est un écolo typique. Professeur de biologie, de chimie et d’éthique, il est plutôt conservateur dans ses conceptions morales mais engagé depuis longtemps dans les activités sociales. Il remplace Stefan Mappus, un homme politique plus traditionnel, resté longtemps dans l’ombre de Günther Öttinger, qui a quitté, l’année dernière, le gouvernement de Stuttgart pour le poste de commissaire à l’énergie de l’Union Européenne.

Article initialement publié sur Boulevard Extérieur sous le titre “Victoire des Verts dans le Bade-Wurtemberg”

Crédits Photo Flickr CC : benjaminbeckmann / gruenenrw

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De la difficulté d’intervenir en Libye http://owni.fr/2011/03/10/difficulte-intervenir-en-libye/ http://owni.fr/2011/03/10/difficulte-intervenir-en-libye/#comments Thu, 10 Mar 2011 07:30:17 +0000 Daniel Vernet http://owni.fr/?p=50564 Doit-on intervenir en Libye ? Il ne faudrait pas que la réponse à cette question se fasse encore trop longtemps attendre, car cela risquerait d’être trop tard. Les forces fidèles au colonel Kadhafi et les mercenaires qu’il a recrutés un peu partout en Afrique pourraient être venus à bout des insurgés, au prix d’un nombre considérable de victimes dans la population civile.

Pourtant il n’est pas facile de répondre rapidement à la question. Une chose est sûre : les Occidentaux ont exclu une intervention militaire qui supposerait l’envoi de troupes au sol. Avec les Américains encore présents en nombre en Irak et les forces internationales engagées en Afghanistan, il n’est pas question d’ouvrir un troisième « front ». Tout le monde s’accorde à penser que les conséquences politiques en seraient désastreuses.

Les mouvements populaires dans les pays arabes ne sont dirigés ni contre les Occidentaux en général ou les Etats-Unis en particulier, ni contre Israël. Le président yéménite Saleh a bien essayé d’entonner cette vielle antienne pour déconsidérer les manifestants mais sa tentative a fait long feu. Il en irait sans doute différemment si des troupes de l’OTAN foulaient le sol du Moyen-Orient.

L’imposition d’une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Libye (no fly zone) ne présente pas les mêmes risques. Elle est d’ailleurs demandée par le Conseil supérieur de la révolution, représentant les insurgés qui ont pris le pouvoir dans l’est de la Libye, et soutenue par la Ligue arabe. Elle n’en constitue pas moins un acte de guerre, comme l’a rappelé [en] le secrétaire américain à la défense Robert Gates :

Une zone d’exclusion aérienne commence par une attaque sur la Libye pour détruire ses défenses aériennes.

Il s’agit en effet de neutraliser tous les types d’armements encore aux mains du colonel Kadhafi, qui mettraient en danger l’aviation des pays chargés de faire respecter cette zone d’exclusion aérienne. Le sénateur démocrate John Kerry, proche de Barack Obama, considère au contraire [en] qu’une zone d’exclusion aérienne n’est pas synonyme d’intervention militaire.

Souveraineté

Quoi qu’il en soit, c’est une décision grave qui ne peut être prise sans l’aval du Conseil de sécurité de l’ONU. La France et la Grande-Bretagne ont pris la tête du mouvement, devant des États-Unis plus circonspects bien que décidés eux aussi à obtenir la chute du régime Kadhafi. Les ministres des affaires étrangères des deux pays ont précisé que toute décision devait avoir la légitimité internationale accordée par le Conseil de sécurité.
Or, la Russie et la Chine, qui disposent d’un droit de veto, ne semblent pas disposées à soutenir l’instauration d’une zone d’exclusion aérienne au nom du respect de la souveraineté des États.

Cela ne veut pas dire qu’elles ne s’y résigneront pas mais il faudra certainement plusieurs jours de négociations à New-York pour les convaincre de ne pas bloquer un texte qui, de toute manière, sera certainement moins contraignant que nécessaire. Et pendant ce temps, Kadhafi aura tout loisir de poursuivre sa contre-offensive.

Une autre hypothèse, qui n’est pas exclusive de la no fly zone, serait d’armer « secrètement » les insurgés, comme le suggèrent démocrates et républicains américains. Cette politique rappelle le slogan lift and strike (lever l’embargo sur les armes pour les Bosniaques et se livrer à des frappes aériennes sur les positions serbes), qui était à la base de la politique de Bill Clinton dans l’ex-Yougoslavie dans les années 1990. Elle ne fut jamais vraiment appliquée parce que les Européens, qui avaient des soldats au sol parmi les casques bleus, craignaient pour leur vie.

Elle pourrait l’être en Libye mais elle ne produira pas ses effets du jour au lendemain. Or le temps presse.

Article initialement publié le 7 mars sur Boulevard Extérieur sous le titre Les affres de l’intervention

Crédits photo via Flickr: Avion de chasse par Mashley Morgan [cc-by-sa] ; Combattants rebelles en Libye par Nasser Nouri [cc-by-nc-sa]

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